L’Homme, espèce imposante, extrêmement féroce ravage tout sur son passage. Meurtrier, assaillant cruel, maître de torture, dictateur impitoyable… Il revêt ces costumes démoniaques pour conforter son égo surdimensionné et répondre aux besoins insatiables de notre société consumériste. Des braconniers tirent de sang froid sur des animaux sans défense, puis érigent leur proie comme des trophées. Une poignée d’ouvriers d’abattoir infligent des souffrances indescriptibles à des êtres vivants impuissants. Des touristes s’émerveillent devant des bêtes sauvages affaiblies, cloisonnés dans des cages exiguës. Ces images d’une violence insoutenable s’inscrivent tragiquement entre les lignes des banalités. Pour dénoncer cette cruauté injustifiée, une artiste irlandaise a pondu un projet osé. Dans sa série d’illustrations symboliquement intitulée « La domination sur les Hommes », Barbara Daniels inverse les rôles. La vengeance est un plat qui se mange froid.
L’Homme, assassin sans cœur
D’après la FAO, une branche des Nations Unies, près de 60 milliards de mammifères et 90 milliards d’animaux marins seraient tués chaque année. Les géants du luxe, les industriels puissants ou encore les as du business assoiffés de billets verts, s’approvisionnent dans les entrailles de Mère Nature. Une ressource à ciel ouvert facile d’accès qui regorge de bonnes affaires. Visons, renards, chinchillas sont convoités pour leur fourrure soyeuse, les poules, elles, sont entassées dans des hangars vétustes, engraissées par des tubes à longueur de journée, tandis que les rats servent de cobayes scientifiques…
Ces scandales indigestes sévissent dans un silence assourdissant. À cause de ces actes ignobles, notre planète se vide de ses richesses, mais les brutes sanguinaires s’en lèchent les doigts. Malgré les médiatisations récurrentes, les opérations coups de poing d’associations comme L214 et la montée en puissance d’alternatives bienfaisantes, les mentalités restent endormies. Pendant que ce massacre se tient discrètement, les humains mordent l’hameçon des plaisirs égoïstes.
Les animaux reprennent les rênes de leur destinée
Pour inverser cette tendance affolante, l’illustratrice irlandaise Barbara Daniels a lustré son ampoule de génie. Avec sa patte incisive et volontairement provocatrice, elle tend une perche atypique aux animaux pour s’extirper de cet enfer. Avec ses dessins, réalisés à l’encre et au stylo sur du papier aquarelle, elle vole dans les plumes des non-dits.
Dans son projet « La domination sur les Hommes » ce sont les hommes et les femmes qui se retrouvent enfermés dans la machine infernale de la maltraitance. Pris au piège dans des scénarios atroces, les humains endurent fictivement, ce que les animaux subissent réellement chaque jour.
« Imaginez notre société moderne où les rôles entre humains et animaux seraient inversés. À quoi ressemblerait-elle ? Que ressentiriez-vous à l’idée de vous sentir dominés par d’autres espèces ? Mon actuel travail artistique vise à répondre à ces questions, en s’inspirant des situations et des événements mondiaux d’aujourd’hui », justifie l’artiste sur sa page web.
Des dessins féroces qui rugissent sur la maltraitance
Cet album à la fois perturbant et marquant capture notre attention. Comme une bouteille à la mer, il envoie un message d’alerte cru et sans filtres. « La domination sur les Hommes » plante le crayon dans la plaie. Dans son restaurant étoilé, un homard mijote un fricassé de fillette bien fraîche. Au cœur d’un cours de biologie enrichissant, des grenouilles dissèquent minutieusement le corps d’un homme barbu…
En parallèle, un crocodile apprêté balance de gauche à droite son nouveau sac à main branché orné d’une tête d’enfant frisé. Pendant ce temps, des coqs affamés se ruent sur les menus alléchants des fast-food. Au menu, brochettes de jambes sauce barbecue et steaks d’humains cuits à point.
Dans un décor plus pimpant, une louve prend la pose sur le tapis rouge telle une star de cinéma. Tous les appareils sont braqués sur son fabuleux manteau en peau humaine. D’autres se la coulent douce au-delà des frontières. Des ânes à lunettes ont harnaché des humains pour sillonner les rues colorées de Santorin.
Une œuvre singulière riche de sens
Avec « La domination sur les Hommes », Barbara Daniels allume la flamme de la culpabilité. Comment remédier à ce chaos ? Est-ce qu’à mon échelle, je peux agir ? Pourquoi tant de haine ? Grâce au brillant procédé du miroir inversé, elle irrigue nos neurones et nous invite au pays de la réflexion. Ces tableaux macabres saisissants nous donnent une claque nécessaire.