Tous les nouveaux épisodes de votre série favorite viennent d’être mis en ligne, et ce tout d’un coup. Netflix, OCS, Disney+ ou encore Amazon Prime, les plateformes de streaming savent comment nous faire rester devant la télé. Par réflexe, on se loverait au creux du canapé et on en bougerait seulement une fois le visionnage complet terminé. Mais cela peut rapidement s’avérer problématique, voire nocif. Alors, à partir de quand binge-watcher des séries peut devenir nocif ? Réponse.
Une forme d’addiction
Le binge-watching est le visionnage boulimique et sans interruption d’une œuvre de fiction. Quand on regarde un film ou une série, nous sécrétons de la dopamine, l’hormone du plaisir. Et ce en continu. De fait, nous sommes en état de plénitude permanent et notre cerveau ne voit aucun intérêt à y mettre fin. C’est le principe de la dépendance.
« Lorsque vous regardez la télévision de manière excessive, votre cerveau produit continuellement de la dopamine. Vous ressentez comme une dépendance et votre cerveau commence à la créer. Le simple fait de s’immerger dans la vie des personnages, les intrigues et se demander ce qui va se passer dans le show peut devenir addictif », explique le docteur Paul Stillman.
Les symptômes nocifs de l’addiction au binge-watching peuvent alors survenir assez rapidement. Isolement, troubles du sommeil, troubles de l’alimentation… et tous s’expliquent simplement. On se renferme sur soi-même pour s’adonner à cette activité solitaire, on repousse les heures de coucher pour mettre fin au suspense, on grignote devant la télé… Cependant, certains profils seraient plus à même d’être sensibles à cette dépendance s’ajoutant à l’addiction généralisée aux écrans.
Binge-watcher pour se perdre dans la fiction
Selon des chercheur.e.s des Universités de Cracovie et Varsovie en Pologne, des « valeurs prédictives significatives » existent et favoriseraient l’addiction nocive. Étudiant des profils ayant déjà regardé au moins deux épisodes d’une série de façon consécutive, iels sont arrivé.e.s à la conclusion suivante : « Un manque de préméditation de ses actions, des difficultés de contrôle des impulsions, une envie d’évasion et l’utilisation du « binge watching » pour faire face à la solitude ».
De fait, les témoins âgé.e.s de 18 à 30 ans auraient tendance à « s’engager dans un marathon de séries télévisées principalement parce qu’iels veulent échapper aux problèmes de la vie quotidienne et réguler leurs émotions, mais décident de continuer à regarder d’autres épisodes pour des raisons plus divertissantes », précise Jolanta Starosta, doctorante à l’Institut de psychologie appliquée de l’Université Jagiellonian de Cracovie. Le binge-watching est alors une porte de sortie direct vers des mondes où il n’est attendu de nous que la passivité essentielle du/de la spectateur.rice. Le temps du visionnage, plus de problématiques extérieures ou de pensées intrusives… Nous sommes happé.e.s.
Cependant, il est important de se rappeler qu’il s’agit de fiction. Et qu’elle est d’ailleurs à la demande. En effet, vous pourrez y revenir quand vous le désirez ; pas besoin de tout dévorer en une fois. Ce à quoi nous assistons est créé de toute pièce et en y dédiant tout notre temps, c’est notre histoire personnelle que nous oublions de vivre.
Dans ce sens, Hilarie Cash, conseillère en santé mentale spécialisée dans l’addiction aux écrans et à Internet, incite dans un premier temps à « cerner ce qu’on évite de vivre » pour ensuite « réaliser que la vie elle-même peut être gratifiante ». Car si le binge-watching à outrance affecte la santé mentale, il dégrade également la santé physique.
La position assise, une ennemie cachée
Les kinésithérapeutes s’accordent à ce sujet : rester assis.e longtemps n’est pas bon. La position assise exerce un trop plein de pression sur le dos, la colonne vertébrale et la nuque. Si elle est confortable un temps, il est important de se lever régulièrement et de se dégourdir les jambes de temps à autres pour mobiliser l’ensemble du dos. Cependant, quand absorbé.e.s dans une histoire, c’est bien le dernier de nos soucis… Et c’est bien l’ennui.
Megan Grace, docteure et chercheuse à l’Institut du Laboratoire d’Activité Physique de Melbourne, explique dans une étude que le binge-watching nous incite à rester dans la même position des heures durant. Binge-watcher des séries devient alors nocif. Assis.e.s ou allongé.e.s, nous aurons tendance à ignorer des envies d’uriner, de manger…
D’autant plus que notre corps a besoin d’être en mouvement pour guérir d’une inflammation, quelle qu’elle soit. Quand notre système immunitaire est menacé, il incite la production de protéines dans l’optique de la guérison des cellules et des tissus. Cependant, ces mêmes protéines peuvent devenir dangereuses pour le corps si elles restent statiques trop longtemps.
De l’aide pour éteindre la télé
À partir de l’étude polonaise, l’addictologue Mark Griffiths a proposé une série de critères allant de l’importance de l’habitude à la réaction face au manque en passant par le niveau de tolérance aux écrans. Ces caractéristiques permettent d’évaluer si addiction au visionnage il y a. Quand le sujet coche toutes les cases, on parle de dépendance. On parlera cependant « seulement » de comportement problématique lorsque quelques-uns des comportements sont manifestes. Si des thérapies et des programmes de sevrage existent, il n’existe malgré tout pas d’estimation précise sur le nombre de personnes accros aux séries.
Mais des techniques de décrochage progressif existent. Mark Griffiths propose par exemple l’arrêt d’un visionnage au milieu d’un épisode pour ne pas succomber à l’effet du suspense de fin. Il est également conseillé de se fixer des limites de visionnage, de désactiver la lecture automatique des épisodes et surtout, de ne s’autoriser un moment de binge-watching seulement si les tâches primordiales de la journée ont été complétées.
Si regarder une série est un divertissement à l’aspect inoffensif, ses dérives peuvent mener à de réels soucis. Comme toute activité pratiquée à l’extrême, binge-watcher des séries peut s’avérer nocif. La sur-consommation de films ou séries sur de longues périodes peut être la voie vers des soucis de santé physique en plus de la traduction d’un inconfort mental. Cette addiction, comme toute addiction, mérite un regard médical. Au moindre doute, n’hésitez pas à demander de l’aide.