Suite à toutes les avancées féministes, impossible de ne pas lutter de façon intersectionnelle. Aujourd’hui, le combat pour les droits des femmes consiste en le rassemblement de plusieurs enjeux. On parle régulièrement d’une déconstruction anticapitaliste, écologique et anti-raciste. En effet, la libération ne peut pas avoir lieu aux dépens de certains pans de la société ; de certaines femmes de la société. Des écrivaines concernées n’ont pas attendu pour s’emparer du sujet et utiliser leurs voix pour faire bouger les lignes. Voici donc 5 autrices noires pour parfaire votre féminisme intersectionnel.
Maya Angelou (1928 – 2014)
Poétesse, écrivaine, actrice, scénariste, militante… Maya Angelou est un des noms à côté desquels il est impossible de passer lorsqu’on parle d’autrice noire. Figure majeure du mouvement américain pour les droits civiques, elle a écrit pas moins d’une vingtaine de livres. Aujourd’hui, plusieurs d’entre eux sont encore intégrés aux programmes scolaires aux États-Unis – et également en France !
Son livre majeur édité en 1969, « Je sais pourquoi chante l’oiseau en cage« , relate sa jeunesse. Violée par son beau-père à 8 ans, elle en parle à son frère qui en informera le reste de la famille. L’homme sera retrouvé mort après n’avoir été enfermé qu’une seule journée. La jeune Marguerite Johnson se persuade alors que son décès a été causé par sa prise de parole et se mure dans le silence. C’est sa rencontre avec la littérature qui l’incite à reprendre la parole.
En 1959, elle intègre le Harlem Writers Guild : le premier groupe d’écrivain.e.s africain.e.s-américain.e.s. parallèlement, elle soutient la Southern Christian Leadership Conference de Martin Luther King Jr. puis, plus tard, les discours de Malcolm X. La mort des deux hommes la désolera et elle se concentrera davantage sur son écriture. Quelques années plus tard, le film « Georgia Georgia » sort en salle. Elle en est la scénariste : c’est le premier film écrit par une femme noire.
Toni Morrison (1931 – 2019)
Toni Morrison est la première autrice afro-américaine a avoir reçu le Prix Nobel de Littérature. Une autrice « qui, dans des romans caractérisés par une force visionnaire et une portée poétique, donne vie à un aspect essentiel de la réalité américaine ». Ses écrits traitent, sous couvert de fiction, du racisme structurel de la société étasunienne.
Son premier livre « L’Œil le plus bleu« voit le jour en 1970. Elle y raconte l’histoire d’une petite fille noire dont le rêve est d’avoir les yeux aussi bleus que ceux des enfants que l’on chérit, les enfants blancs. S’en suivent plusieurs romans mémorables qui lui vaudront de nombreuses distinctions. Son best-seller « Beloved » conte l’histoire de Sethe, ancienne esclave, hantée par son nourrisson a qui elle a dû retirer la vie pour la sauver d’une vie d’esclave. Ce livre lui vaudra le prix Pulitzer en 1988.
Toute sa vie, Toni Morrison a revendiqué des œuvres « belles et politiques ». Jusqu’à la fin, elle a reconnu l’importance des mouvements militants tels que #MeToo ou Black Lives Matter. Dans une interview elle confirmait son caractère révolté et vaillant : « Vous savez, j’ai 87 ans… Si vous êtes en train de me dire que je vais mourir avec lui [Donald Trump] au pouvoir… Non. Je vais survivre à ça. Point ».
Angela Davis (1944 -)
Angela Davis est une philosophe et militante africaine-américaine. Elle reçoit une éducation politisée et assiste directement au racisme d’un pays en pleine Ségrégation. Prônant un schéma de lutte socialiste ; elle ne recevra que rarement la sympathie des organisations. En effet, ces dernières affirment que les personnes noires ne peuvent compter que sur elles-mêmes. Elle rejoindra ensuite le Black Power Party, le mouvement révolutionnaire afro-américain.
En 1970, elle est accusée d’avoir orchestré une prise d’otage ayant fait 4 morts dans un tribunal. Elle ne cessera de clamer son innocence. C’est après 16 mois de détention et un vaste mouvement de soutien à travers les États-Unis qu’elle sera déclarée non-coupable et échappera à la peine de mort.
Angela Davis a écrit de nombreux essais au travers desquels elle aborde notamment l’industrie carcérale et la peine de mort, la paix et le sexisme. Elle lie ce dernier à une lutte anti-raciste. Elle développe son idée dans son livre « Femmes, race et classe« paru en 1981. Sa réflexion avance l’idée selon laquelle les hommes noirs ne peuvent se libérer de leur oppression qu’en cessant d’être eux-mêmes oppressifs à l’égard des femmes.
Encore aujourd’hui, elle prend position sur des sujets d’actualité et a notamment participé à une discussion concernant le racisme et les violences policières aux côtés d’Assa Traoré.
Gloria Jean Watkins – nom de plume bell hooks (1952 -)
bell hooks est une écrivaine et essayiste étasunienne. Elle a principalement écrit à propos du genre et de la sexualité. Mais également des enjeux de la masculinité noire et du besoin de sororité intersectionnelle.
Elle a travaillé au développement la théorie d’un « féminisme noir », luttant contre le sexisme et le racisme s’entremêlant. En effet, ses réflexions l’ont amenée à parler de la double oppression subie par les femmes racisées. bell hooks déplore le féminisme contemporain comme un mouvement excluant la question raciale et sociale. Dans ce sens, elle condamne un féminisme blanc et bourgeois qui ne sert les intérêts que d’un groupe privilégié de femmes.
Parmi une trentaine d’essais majeurs, « À propos d’amour« publié en 2000 reste l’un des plus marquants. Elle y met en avant l’importance de la compassion dans la lutte. Elle prône le besoin de remplacer la rage par l’amour. La fin de la rivalité reposant sur la haine permettrait, selon elle, d’alléger la souffrance des oppressions – notamment dans le cas d’une rivalité entre femmes – et de travailler ensemble pour une libération commune. Une lutte intersectionnelle…
bell hooks a fait le choix d’un nom de plume sans majuscule pour diriger l’attention vers le contenu de son discours plus que vers sa personne.
Chimamanda Ngozi Adichie (1977 -)
Chimamanda Ngozi Adichie est une autrice nigériane. Elle rejoint les État-Unis à 19 ans où elle fera des études de communication et sciences politiques qu’elle complètera avec un Master en création littéraire et un Master d’Études africaines à Yale. Elle a été nommée comme l’une des 100 personnes les plus influentes au monde en 2015 par le TIME.
En 1997 et 1998, elle publie un premier recueil de poèmes et une pièce de théâtre. Or, c’est en 2003 que sa carrière d’écrivaine commence vraiment. Son roman « L’Hibiscus pourpre » sera loué par la critique et sera distingué à de multiples reprises.
En 2012, son TED Talk « We Should All Be Feminists » (« Nous sommes tous des féministes » en français) fait mouche grâce à son accessibilité. Il démarre de nombreuses discussions concernant l’égalité femmes/hommes. Il sera publié en livre par la suite et trône dans de nombreuses bibliothèques. En 2013, elle publie « Americanah« dans lequel elle raconte le départ d’Ifemelu, une jeune femme quittant le Nigeria pour les États-Unis où, soudainement, les questions d’identité et de couleur de peau prennent une importance qu’elle ne leur connaissait pas.
Pour Noël, nourrissez les esprits de votre entourage avec ces 5 autrices noires qui vous guident pour parfaire votre féminisme intersectionnel. Fiction, essais, discours… ces femmes ont utilisé leurs voix pour parler de réalités souvent tues. Elles diversifient les points de vue concernant des combats qu’il est nécessaire continuer à porter.
