Alors que les films en salle sont de plus en plus longs et monopolisent quasiment une demi-journée, d’autres créations prennent le parti inverse pour coller à nos modes de vie speed. Les courts-métrages déploient ainsi des histoires concises qui se racontent à vitesse éclair. En général, ils ne dépassent pas les 60 minutes, ce qui permet une visualisation expéditive. Tous les genres se prêtent à ce format « compact » de l’animation 3D à la comédie dramatique en passant par la romance. Si vous avez une montre à la place des yeux, voici 7 courts-métrages à dévorer sur le pouce pour une dose de culture express.
L’attente
Ce court-métrage, en lice pour les Césars 2024, franchit les portes intimistes et confidentielles d’une maternité. Il suit Céline, qui est sur le point d’accoucher et qui doit attendre sagement que son bébé se manifeste. Elle peut compter sur la présence rassurante de sa femme Jeanne, qui s’investit corps et âme dans cette première mise au monde.
Une fois l’accouchement terminé, Jeanne déambule dans les couloirs impersonnels de l’hôpital et croise des hommes, eux aussi, rongés par l’impatience. Elle y fait des rencontres marquantes et démultiplie les entrevues avec un enthousiasme communicatif. Les courts-métrages sélectionnés pour les Césars 2024 condensent technicité et récit sensible dans une œuvre qui se dévore en moins de 30 minutes.
Le soleil dort
Parmi les courts-métrages en vedette pour les Césars 2024, il y a également cette création bleu, blanc, rouge percutante où réalité et fiction ne font que s’emmêler. Ce film bref gravite autour d’Octave et Flora. Les deux jeunes gens cultivent une idylle virtuelle à travers le jeu vidéo « Second Life ». Ils vivent leur amour par procuration, depuis leurs avatars, mais ne se sont jamais rencontré physiquement.
Pourtant, si Flora est plus que partante à l’idée de faire ce face-à-face hors des écrans, ce n’est pas le cas d’Octave. Depuis qu’une partie de son visage a été déformé par les flammes, Octave refuse de se montrer. Loin de se douter que ce sont des complexes qui le freinent, Flora décide de confronter Octave à un dilemme radical. Une ode aux paradis artificiels pixellisés, qui servent parfois de rempart contre le mal-être.
La merveilleuse histoire de Henry Sugar
Ce court-métrage est tiré d’une nouvelle de Roald Dahl et retranscrit une histoire vraie sur un ton volontairement « kitsch ». Henry Sugar est un millionnaire qui ne jure que par ses liasses de billets verts. Arrogant, dédaigneux et égocentrique au possible, il a tout d’une personne détestable. Mais il n’en a que faire des relations humaines.
Ce qui l’intéresse ce sont les jeux d’argent envers lesquels ils vouent un véritable culte. Sur un hasard, il découvre l’histoire quasi surréaliste de Imdad Khan, qui peut voir sans ses yeux à la manière d’un devin. Il se met alors en tête d’avoir le même don pour tricher et empocher plus d’argent au poker. C’est l’un des courts-métrages les plus iconiques du catalogue Netflix.
Next floor
Si les bruits de bouche vous irritent les oreilles, il faudra certainement regarder ce court-métrage sans son. C’est probablement l’un des courts-métrages les plus dérangeants qui soit. Des bourgeois sont tranquillement installés autour d’une table et dégustent un festin sous le regard attentif de leurs valais.
Mais à mesure que les plats défilent, le repas se transforme en une écoeurante orgie gustative. Les convives s’empiffrent de mets à l’origine douteuse et au visuel peu ragoûtant jusqu’au débordement. C’est un véritable saccage alimentaire. Cette création est en fait une satire du monde moderne et son apologie du « toujours plus ».
Crème de menthe
Certains courts-métrages ont l’avantage d’être disponibles hors des plateformes de streaming payantes comme c’est le cas pour « Crème de menthe ». Cette fiction canadienne, mise en lumière au festival du court-métrage de Clermont-Ferrand, aborde le deuil sous le prisme de la tendresse. Loin de poser un regard fataliste sur cette épreuve bien commune, il en retire du positif.
Une jeune femme, qui vient en peine de passer le cap de la vingtaine, doit retourner dans sa ville natale pour faire le ménage chez son père, fraîchement décédé. Malgré une peine incommensurable, elle est obligée de vider sa maison en un temps record. Problème : son père, accumulateur compulsif, a laissé un énorme bazar dans sa chaumière. À chaque objet placé dans le sac, les souvenirs affluent et les flashbacks se développent.
In a Heartbeat
Les courts-métrages d’animation ne déméritent pas et laissent entrevoir des récits précieux sur des thématiques courageuses. D’ailleurs « In a Heartbeat » est l’un des premiers dessins animés au format « court » à avoir mis l’accent sur l’amour homosexuel.
Il raconte les sentiments naissants et explosifs entre deux jeunes garçons. Timide, Sherwin n’ose pas déclarer sa flamme à Jonathan, son petit préféré de la cour de récré, mais son cœur le trahit. À chaque fois qu’il croise son bien-aimé, son organe vital semble vouloir se décrocher de son buste. Un récit imagé minimaliste et sans dialogue qui trouve une grande résonance dans les yeux du public.
Une tasse de chlore
Immersion, cette fois-ci, dans les bassins chlorés ponctués de têtes en caoutchouc. Ce court-métrage, confiné entre les murs froids d’une piscine municipale, suit Olivia. C’est la première fois que la jeune fille franchit le seuil du pédiluve de son plein gré, sans aucun impératif scolaire. Mais lorsqu’elle se tient devant ces grosses bassines remplies de corps et de regards, tous ses complexes refont surface.
Barricadée sous sa serviette, elle hésite à se montrer dans ce maillot de bain qui laisse deviner ses formes de femme. Puis, finalement, elle se jette à l’eau (au sens propre comme figuré). Mais cette baignade présagée comme un moment de détente se mue en défi personnel. Sa joie est interrompue lorsqu’elle remarque un ancien camarade du collège, Tom Berré, le bourreau du bahut. Un récit plein de métaphores et de « second degré » qui se veut rafraîchissant.
Ces courts-métrages, beaucoup plus digestes que les blockbusters de 3h30, s’apparentent à des shoots « audiovisuels ». Leur format « condensé » leur accorde le mérite d’aller droit au but et de renoncer aux détails superflus. Ce qui n’est pas un luxe.