Le patriarcat étant un phénomène systémique, comme partout, la téléréalité n’est pas épargnée par le sexisme. Encore aujourd’hui en 2022, ces émissions accentuent largement les stéréotypes, montrant des femmes superficielles, écervelées, colériques, etc. Les hommes, eux, sont montrés comme des machines à testostérones. Ils sont tout aussi stéréotypés. Et les minorités de race, de classe ou d’orientation sexuelle n’échappent pas aux préjugés non plus !
Dans son dernier ouvrage intitulé « Téléréalité : la fabrique du sexisme », l’essayiste et journaliste féministe Valérie Rey-Robert analyse les mécanismes sexistes de ces émissions. Elle rappelle également la part de responsabilité des scénaristes à représenter une telle vision stéréotypée au grand public.
Un sexisme grand public
La téléréalité a beau avoir célébré ses 20 ans il y a à peine quelques mois, certains préjugés qu’elle véhicule paraissent sortis d’un autre siècle. On voit des femmes vulnérables, fragiles, en quête absolue de mariage, réceptives sexuellement et qui ont bien sûr le désir naturel et évident d’être mères. Une vision assez – pour ne pas dire très – stéréotypée et réductrice des femmes. Le Haut Conseil à l’Egalité (HCE) avait d’ailleurs déjà pointé du doigt cette image véhiculée des femmes en 2020, rappelle Le Parisien. L’impact de ces idées reçues n’est pas négligeable.
En effet, la téléréalité est très populaire. Chaque année en France, on diffuse 9 600 heures de ses programmes. Les « Marseillais », les « Reines du shopping » ou encore « Mariés au premier regard »… Pas moins de 140 émissions différentes ont été lancées ces dix dernières années. Plutôt destinées à un public issu des classes populaires, les « CSP+ » (les catégories socioprofessionnelles les plus favorisées) aiment également poser un regard moqueur sur ces émissions. La téléréalité plait au grand public.
La crédibilité du mouvement #MeToo de la téléréalité
Il y a eu également une vague #MeToo de la téléréalité. Alix Desmoineaux a fait parler de sexisme dans ce petit monde lors de son témoignage en tant que victime de violence sexuelle. Déjà préparée pour s’exprimer dans les médias, elle aurait moins souffert de « victim blaming ». Ceci serait dû notamment à son apparence ou à sa façon de parler. Son langage serait moins condamnable que celui de ses consoeurs de la téléréalité.
Cependant, les autres femmes ayant participé à ces émissions de téléréalité ont vu leurs plaintes peu écoutées. Pour quelles raisons ? L’essayiste féministe Valérie Rey-Robert explique à Terrafemina qu’il est en partie question de mépris de classe sociale sur les victimes. Ainsi, ce mépris normalisé décrédibilise la parole des candidates témoignant de violences sexistes. Elles souffrent alors d’une double peine.
« J’ai réalisé que selon la victime que l’on est, c’est-à-dire si l’on est une jeune femme des quartiers populaires, qui ne s’exprime pas forcément très bien, qui est très refaite, il y a un certain mépris de la part d’à peu près tout le monde », explique la journaliste Valérie Rey-Robert à TerraFemina
Téléréalité : la fabrique du sexisme ?
Face au constat du sexisme dans le monde de la téléréalité, la journaliste et essayiste féministe Valérie Rey-Robert a sorti le 13 avril 2022 un nouveau livre. Intitulé « Téléréalité : la fabrique du sexisme », l’ouvrage est une analyse vulgarisée de l’ensemble des productions de téléréalité et de leur part de sexisme. L’auteure constate non seulement que rien n’a changé depuis des années, mais aussi que le sexisme est encore plus présent aujourd’hui dans la téléréalité.
Voir ce livreMis à part le sexisme, Valérie Rey-Robert observe également du racisme, de l’homophobie ou encore de la grossophobie, bien visibles à l’écran. En effet, ces émissions ne présentent que peu de personnes racisé.e.s, de lesbiennes ou de personnes transgenres. Les représentations sont ainsi hétéronormées, blanches et peu représentatives de la diversité dans nos réalités.
Son livre rappelle également que ce sont les productions qui accentuent ces discriminations, pas les candidat.e.s. Les séquences ne représentent pas la réalité, mais plutôt des choix scénaristiques.
« Je voulais montrer que, s’il y a du sexisme ou du racisme, ce n’est pas une question de bêtise, mais parce que des gens, parmi les candidat.e.s et les producteur.rice.s, pensent que les femmes valent moins que les hommes. Les séquences auxquelles nous assistons ont été délibérément choisies : elles ont été jouées, filmées et conservées au montage », explique Valérie Rey-Robert
Et vous, pensez-vous que la téléréalité est sexiste ? Si oui, que faudrait-il mettre en place pour que les représentations des femmes changent ? Venez en parler sur le forum de The Body Optimist !