C’est la plus importante grève qu’Hollywood ait jamais vue. Le 8 novembre 2023 marquait la fin de 118 jours de grèves des acteur.ice.s. Après une longue période d’immobilisation massive, quelle suite pour l’industrie du cinéma ? Retour sur ces 4 mois d’arrêt.
Une mobilisation sans précédent des scénaristes et des acteur.ice.s
Hollywood, le cœur de l’industrie cinématographique mondiale, a été le théâtre d’une grève secouant les fondements de l’entertainment. Cette « mobilisation historique » comprenait les scénaristes de la Writers Guild of America qui ont rapidement été rejoint.e.s par les acteur.ice.s du syndicat SAG-Aftra.
Ce vent d’indignation trouve ses racines en mai dernier. L’échec des négociations entre les syndicats, les grands studios de production hollywoodiens (AMPTP) et les plateformes de streaming menait à l’immobilisation de l’industrie. Alors que les scénaristes ont lâché le piquet de grève fin septembre 2023, les comédien.ne.s ont tenu jusqu’au 8 novembre.
Des revendications pour un cinéma plus juste
Les revendications de la grève à Hollywood concernaient une industrie plus humaine. Les travailleur.se.s de l’industrie cinématographique expriment en effet depuis longtemps leur mécontentement face à des conditions de travail souvent précaires, des disparités salariales et autres inégalités flagrantes.
La question de la revalorisation des salaires a ainsi rapidement été posée sur la table. Ces derniers ont baissé avec l’arrivée massive des services de VOD. Il a d’ailleurs été sommé à ceux-ci d’être davantage transparents concernant leurs chiffres de fréquentation.
En effet, la loi veut que les comédien.ne.s perçoivent un pourcentage sur le nombre de visionnages. Pourcentages restant bien souvent secrets. Enfin et pas des moindres, la demande de l’encadrement du recours aux Intelligences Artificielles (IA) menaçant progressivement les métiers de l’écriture.
Des conséquences inédites sur les productions
Sans scénaristes et sans acteur.ice.s difficile de faire un film… Ces 4 mois d’arrêt ont forcé de nombreuses productions à reporter tournages et sorties. Parmi les plus attendues, on nomme notamment la dernière saison de « Stranger Things« et « Beetlejuice 2 ». Également « Deadpool 3 » dont le projet était prêt à 50 % au moment de sa suspension.
Les interventions promotionnelles ont également été interrompues. Les règles mises en place par le la SAG-Aftra, dans le cadre de la grève hollywoodienne, insistaient sur l’absence de tournage et de promotion. De fait, de nombreux films n’ont pu être présentés par les équipes.
Pour exemple, malgré une première vague de rendez-vous presse, « Oppenheimer » a vu ses têtes d’affiche déserter les tapis rouges dès juillet. Seul.e.s de rares interprètes ont pu se voir attribuer des dérogations quand la production du film soutenait le syndicat. C’est notamment le cas d’Adam Driver, aperçu à la Mostra de Venise, où il n’a pas hésité à défendre les intérêts de la grève.
Un retentissement sur l’audiovisuel à l’étranger
Alors que les cérémonies européennes ont dû s’adapter à l’absence d’artistes et d’équipes, elles n’ont pas masqué leur soutien à la grève à Hollywood. La Fédération Internationale des Acteurs (FIA) communiquait en juillet :
« Cela va bien au-delà des acteur.rice.s américain.e.s. Il s’agit de défendre le respect et l’équité pour les acteur.rice.s du monde entier, de reconnaître leur contribution exceptionnelle au succès de notre industrie et à la création de contenus qui divertissent des millions de personnes dans le monde. »
De nombreux syndicats à travers l’Occident ont ainsi souligné l’importance des demandes de leurs collègues étasuniens. Du côté français, le syndicat CGT Spectacle en a profité pour solliciter la ministre de la Culture Rima Abdul Malak concernant les dangers des l’Intelligence Artificielle.
Un avenir plus stable pour le cinéma
Si la conclusion officielle des négociations n’est pas encore connue à ce jour, elle semble être en faveur des grévistes hollywoodien.ne.s. La SAG-Aftra parle en effet d’une « portée extraordinaire » comme le prouvent les répercussions diverses. Les travailleur.se.s de l’industrie cinématographique ont montré qu’iels sont prêt.e.s à lutter pour leurs droits et pour un changement significatif. La grève n’a pas été vaine !
Une revalorisation salariale, un encadrement des IA et une prime de rediffusion en streaming sont une avancée non-négligeable pour les métiers du cinéma. Alors que les projecteurs se sont éteints sur la grève à Hollywood, l’industrie se retrouve maintenant à un tournant crucial. Les partis doivent désormais signer une convention collective pour assurer la bonne mise en place de ces mesures, afin que les studios « puissent reprendre le travail pour raconter de belles histoires ».
Alors que le cinéma semble être un monde de paillettes, il reste une industrie à part entière. Un film compte sur une multitude d’employé.e.s de l’ombre pour atteindre les salles. La coalition des 160 000 travailleur.se.s de l’audiovisuel issu.e.s du syndicat SAG-Aftra et le retentissement de leur mobilisation à l’étranger laisse maintenant envisager une réflexion autour de la précarité des métiers culturels.