Ce soir 30 mars, France 2 organise une soirée spéciale autour de la « pornodivulgation », aussi connue sous le nom « revenge porn ». France Télévisions souhaite en effet se mobiliser en tant que « lanceur d’alerte » en luttant contre le cyberharcèlement et la haine en ligne, sous le hashtag #AimeSansHaine.
Lors de cette soirée spéciale, vous découvrirez à 21h10, « Mise à nu », une fiction inédite de Didier Bivel traitant du revenge porn et de ses ravages. Suivie, à 22h50, du documentaire Infrarouge intitulé « Ennemi intime », écrit par Emilie Grall. On vous en dit plus.
La « pornodivulgation » , qu’est-ce que c’est ?
Si vous en avez déjà entendu parler, c’est tout simplement parce que ce phénomène prend de l’ampleur dans le monde. Et pas que chez les anonymes. On se souvient encore de l’affaire concernant l’actrice Jennifer Lawrence, dont les photos dénudées sont toujours accessibles sur internet. Mais aussi de l’affaire de l’homme politique français Benjamin Griveaux, en passant par la mort d’Alisha, collégienne de 14 ans noyée à Argenteuil en mars 2021.
En termes clairs, la pornodilvulgation est un acte qui consiste à se « venger » de son ex en publiant, sans son consentement, des photos, des vidéos ou des vocaux à caractère sexuel. Ces contenus numériques peuvent avoir été pris avec ou sans l’accord de la personne. En revanche, la diffusion sur internet est toujours faite sans le consentement de la victime. Une forme de torture moderne qui est un acte de cybercriminalité.
« Les associations militent pour qu’on parle de « pornodivulgation » plutôt que de « revenge porn », c’est très important. Parce que dans le caractère du revenge porn, il y a une notion de vengeance et donc une notion de culpabilité pour les victimes. Ces dernières sont culpabilisées, alors qu’en aucun cas, ce n’est de leur faute », expliquent Marie-Christine Gambart, la réalisatrice et Émilie Grall la scénariste du documentaire « Ennemi intime », au micro de Sonia Devillers sur FranceInter
Le but étant d’humilier la personne en dévoilant son intimité suite à une rupture. Un motif de vengeance cruel qui fait beaucoup plus de ravages que l’on pourrait imaginer. En effet, une fois postés sur la toile, les contenus à caractère sexuel peuvent se répandre comme une traînée de poudre. Sans parler du fait que le cyberharceleur peut décider de les envoyer également aux proches (famille, collègues, ami.e.s) de la victime.
Ici, l’utilisation du masculin pour le terme « cyberharceleur » est voulue. Selon les derniers chiffres rapportés par Francetelevisions.fr, 99 % des cas de pornodilvulgation concernent en effet un homme qui fait subir cela à une femme.
« Mise à nu » de Didier Bivel : un téléfilm glaçant
Imaginez-vous une petite librairie de quartier et son libraire, que tou.te.s les habitant.e.s adorent… Lorsque soudain une femme entre, et tire sur Vincent, le commerçant. Deux ans plus tard, le procès a lieu. Vincent (interprété par Julien Boisselier) est en fauteuil roulant et Sophie (jouée par Julie de Bona), sur le banc des accusé.e.s. Mais si on vous disait que le bourreau n’est pas forcément celui que l’on croit ?
Inspiré de fait réel, ce téléfilm raconte l’histoire de Sophie, mère de famille, tombée amoureuse d’un gentil libraire après avoir fraîchement divorcé. Les choses dérapent et la mère de famille prend la décision de le quitter. Vincent ne le supporte pas et décide de se venger en envoyant des vidéos intimes de leurs ébats sexuels sur les réseaux sociaux. Alors que Sophie, profondément humiliée, tente de s’excuser auprès de ses proches, Vincent se transforme en harceleur. Il met tout en oeuvre pour détruire la vie de Sophie, jusqu’à usurper son identité et publier des vidéos sur des sites pornographiques. En l’absence de preuves, va-t-on la croire ?
« Mise à nu » s’inspire de l’histoire vraie vécue par Sophia D., victime de pornodilvulgation pendant 4 ans. Il met en lumière un « viol de l’intimité » destructeur avec un objectif en tête : alerter et sensibiliser le public sur le danger d’échanger des images sur la toile.
« Ennemi intime » : enquête sur la pornodivulgation
Le téléfilm est suivi d’un documentaire racontant l’histoire de Charlotte, Samira, Maëlle, Sophia et David. Leur point commun ? Ces femmes et cet homme ont été victimes de pornodivulgation et leur vie a basculé le jour où des contenus privés ont été publiés sur internet, sans leur consentement.
Dans ce documentaire écrit par Émilie Grall et réalisé par Marie-Christine Gambart, on découvre leurs récits intimes, celui de leurs proches et aussi ceux des personnes qui luttent contre ce fléau grandissant. Tou.te.s parlent « d’un viol numérique sans fin » car profondément détruit.e.s par cette humiliation publique. Émilie Grall et Marie-Christine Gambart racontent :
« En choisissant de se pencher sur ce phénomène, nous avons rencontré bon nombre de victimes, de tous les profils et de tous les âges. C’est d’abord entendre leur récit glaçant et celui de leurs proches qui nous a convaincues de faire ce film. La violence de la trahison d’un être aimé. Les conséquences de l’humiliation publique vécue en découvrant son intimité relayée sur les réseaux. Et enfin la bataille menée pour faire effacer ces contenus compromettants, qui ne disparaîtront jamais vraiment…
C’est ensuite en réalisant l’ampleur du phénomène, qui explose littéralement ces dernières années, en particulier chez les jeunes, que nous avons pris conscience de l’urgence de rendre compte de la réalité de ces nouvelles violences. »
La pornodivulgation peut prendre différentes formes et avoir différents motifs. Mais alors qui est responsable ? Les ex-conjoints ? Les plateformes numériques et les algorithmes qui favorisent la propagation de ce type de contenus ? La justice qui peine à identifier et condamner les coupables ? Ou enfin, certain.e.s d’entre nous qui ne mesurons pas la gravité de nos propos en jugeant les victimes en partie responsables de ce qui leur arrivent ?
À noter que cette soirée spéciale sera conclue par un débat animé par Marie Drucker et mené en collaboration avec Samuel Comblez, directeur des opérations de l’association e-Enfance et du numéro d’urgence « 3018 », dédiée aux victimes et témoins de cyberharcèlement. Ainsi que Marguerite Girardin Hersen, psychologue clinicienne. Une soirée à ne pas manquer !