Dans les abysses du 7e art, la communauté LGBTQIA+ reste à l’arrière-plan. En 2019, les minorités de genre ne représentaient en effet que 18,6 % des films. Un chiffre consternant qui révèle une certaine hostilité à l’égard des personnes gays, trans ou encore bi. Du côté des séries, le constat est un peu moins morose. Ces derniers temps l’ouverture d’esprit se dessine. Mais la France reste sur le banc de touche. D’un pas hésitant, les producteur·trice·s de l’Hexagone valorisent difficilement cette frange de la population.
Le média pro-LGBT « Têtu » pointait d’ailleurs du doigt cette lente évolution. En effet, il faut attendre 2018 pour voir apparaître le premier personnage transgenre dans « Plus belle la vie ». À l’inverse, les séries anglo-saxonnes, elles, surfent sur la vague de la diversité depuis plus de quinze ans. Pour plonger dans ces scénarios teintés de couleurs arc-en-ciel, nous avons concocté, pour vous, une sélection croustillante de séries LGBTQIA+.
Bref point culturel
Dans les années 70, les orientations sexuelles moins conventionnelles commencent à émerger dans les séries. Cependant, elles restent recouvertes d’un voile de pudeur. Entre les allusions homosexuelles présumées des « Mystères de l’Ouest 2 » ou encore les héros asexuels qui règnent en maître dans « Dynastie »… le petit écran s’enrichit doucement.
Quelques décennies plus tard, les esprits s’éveillent et le progrès s’enclenche. La communauté LGBTQIA+ n’est plus cloisonnée dans des rôles secondaires. « Will et Grace », « Queer as folk » ou encore « The L Word » sont des pionnières en la matière. Très visionnaires pour l’époque, elles ont redoré dignement le blason de ces minorités oubliées. En faisant des lesbiennes ou des homosexuels, leurs personnages centraux, les réalisateur·trice·s ont bousculé les traditions. Désormais, les séries LGBTQIA+ se normalisent et des héros/héroïnes plein·e·s de charme crèvent l’écran.
1 – Euphoria
Immersion dans le quotidien mouvementé de la Génération Z. Cette série reflète avec justesse les failles de notre société moderne. Elle met en scène des jeunes en pleine quête identitaire. À la recherche de repères, ils sombrent parfois dans des vices attractifs. Visualisation massive de films porno, utilisation abusive des réseaux sociaux, échanges de drogue, recours au revenge porn, situation familiale compliquée… on pénètre dans une spirale réaliste haletante. Par son honnêteté, le scénario retranscrit fidèlement les histoires trépidantes de l’adolescence. Cette période charnière rime surtout avec découvertes et questionnements.
À travers toutes leurs facettes, ces lycéens avides de nouveautés, brisent les clichés. Ils apprivoisent doucement leurs orientations sexuelles et assument leurs différences. D’ailleurs, parmi les personnages clefs, Jules Vaughn, femme transgenre, attire tous les regards. En définitive, « Euphoria » est un outil culturel qui lutte contre les injonctions de genres. C’est une des séries LGBTQIA+ les plus complètes.
À retrouver sur Canal+.
2 – Mr Fletcher
Quarantenaire divorcée, Eve Fletcher digère mal le départ de son fils adoré. Lorsqu’il quitte le cocon familial, la mère de famille se retrouve seule. Pourtant, cet événement marque un tournant dans sa vie de célibataire. Après un rude passage à vide, elle décide de se lancer dans des aventures sexuelles pimentées. Une forme de libération s’opère. Son amie la qualifie même de MILF (Mother I’d Like to Fuck), expression anglaise désignant une mère encore sexuellement attirante.
Au fil des épisodes, elle troque les hommes de son âge contre des relations beaucoup moins conventionnelles. Eve s’essaye à de nouvelles pratiques et explore tous les pans de ses fantasmes les plus profonds. Avec sa vision décomplexée et son ouverture d’esprit, elle sort de sa zone de confort. Elle prend son pied avec une collègue queer et enchaîne les coups d’un soir avec des ados en rut. Cette série dépeint avec humour les tumultes de cet âge pivot.
À retrouver sur OCS.
3 – The L World
Jusque dans les années 2000, la communauté LGBT reste la grande absente du petit écran. « The L World » a vu le jour en 2004 pour répondre à ce cruel manque de visibilité. À l’époque, cette série suivait un gang d’amies lesbiennes dans leurs vies quotidiennes. On assistait à leurs galères, à leurs moments de folie et à leurs histoires amoureuses. Riche de ses 70 épisodes, la série s’achève en 2009. Mais dix ans après, une nouvelle saison commence et vibre sous le signe de la diversité.
« The L World – Génération Q » relance l’intrigue dans un nouveau contexte, plus représentatif de notre époque. On y retrouve les personnages principaux, qui ont vieilli, mais qui restent toujours aussi déjantés. Et de nouveaux profils s’imposent. C’est le cas de Micah, interprété par l’acteur trans Leo Chang. « The L World » met en lumière des pratiques sous-représentées voire bannies des séries. Cunilungus en période de règles, utilisations de sextoys… tous les tabous tombent.
À retrouver sur Canal+.
4 – Transparent
Cette série inspirée d’une histoire vraie retrace le parcours d’un père de famille qui souhaite changer de sexe. Morton Pfefferman, professeur exemplaire à la retraite, annonce cette nouvelle inattendue à ces trois grands enfants. La transition s’opère, il quitte son corps masculin et se fait appeler Maura. Ce changement radical renverse l’équilibre familial. Touchant et salutaire, « Transparent » esquisse un envers du décor en demi-teinte. Maura se sent mieux dans sa peau, mais ses proches peinent à accepter cette transformation brutale. Un avenir semé d’embûches et de moments tendres se profilent. Chaque épisode résonne comme un nouveau combat.
Au-delà de ce côté poignant, le réalisateur du film a pris son engagement LGBT à bras le corps. « Transparent » est la première série américaine a mettre en scène une femme transgenre comme personnage principal. Mais cette diversité ne se résume pas à la fiction. Des coulisses à la scénarisation, une cinquantaine de transgenres ont travaillé sur la série.
À retrouver sur Amazon Prime.
5 – Fiertés
Le drapeau arc-en-ciel est fièrement brandi dans cette série haute en couleur. « Fiertés » se déroule en trois épisodes et chacun d’entre eux nous immerge dans une époque différente. Le scénario gravite autour de Victor, un adolescent qui découvre son homosexualité. Il découvre la lutte acharnée des associations LGBT. Toutes mènent la barque de la tolérance dans un flot mouvementé d’ignorance. Le jeune homme pousse les portes d’un militantisme justifié.
Au fil des épisodes, on suit son évolution dans ce milieu engagé et chaque jour, il fait face à de nouveaux obstacles. Dépénalisation de l’homosexualité, mariage pour tous… toutes ces rudes avancées brûlent sous le feu des projecteurs. « Fiertés », sort aussi de l’ombre le lien complexe qui unit un père et son fils. Dans le large spectre des séries LGBTQIA+, celle-ci confirme que la route vers l’acceptation peut s’avérer rocailleuse.
À retrouver sur Canal+.
6 – Hit & Miss
Mia est une femme trans travaillant comme tueuse à gages. Elle découvre qu’elle a eu un fils avec une ancienne petite amie morte d’un cancer. Elle est nommée tutrice légale du garçon, ainsi que des trois autres enfants de son ex, qui vivait dans une ferme du Yorkshire. La femme fatale combine rôle parental et métier périlleux. Ce scénario alléchant met en appétit. Cette série aborde ouvertement les questions autour du genre et casse les idées préconçues.
Sur fond de scènes burlesques et endiablées, Mia apparaît comme une héroïne téméraire sulfureuse. En combinaison moulante, armée d’une artillerie lourde, elle a soif d’aventures audacieuses. Au début, l’entente familiale est quelque peu chaotique et Mia semble totalement impuissante dans son apparat de mère. Pourtant, une belle complicité se noue au gré des épisodes. Preuve que chaque modèle parental apporte son lot de tendresse et d’amour.
À retrouver sur Canal+.
7 – Fleadbag
Un pitch loufoque, une héroïne à la répartie cinglante, des péripéties surprenantes… ce délicieux mélange vitaminé donne du fil à retordre à nos zygomatiques. Fleabag, soit « sac à mouches » est le personnage clef de cette série. Londonienne trentenaire célibataire, Fleabag est une femme pleine de pep’s. Avec son humour acerbe et son addiction au sexe, elle envoie valser les critiques. La série nous plonge dans son quotidien au rythme effréné. Complètement déboussolée depuis le décès de sa meilleure amie, Fleabag joue les vagabondes et vogue de lit en lit pour trouver un brin de réconfort.
Imprévisible, naturelle et armée d’une franchise aiguisée, elle affiche une personnalité flamboyante. Libre comme l’air, la jeune téméraire se glisse aussi sous les draps de femmes séduisantes. Entre plans torrides, déceptions et exaltation passagère… elle traverse des émotions plurielles, toujours avec un sourire forcé. Fleabag est extrêmement attachante et nous embarque facilement dans cette épopée fantastique.
À retrouver sur Amazon Prime.
8 – Sex Education
Plus instructif qu’un manuel de SVT, « Sex Education » s’érige comme un support clef pour gommer tous les tabous autour de la sexualité. La première saison se penchait sur des thèmes de l’ombre comme la masturbation, le vaginisme, les difficultés à atteindre l’orgasme, le sexe lesbien, le consentement ou la communication entre partenaires sexuels. Otis, un lycéen de 16 ans pilote la série. Avec Maeve, son amie rebelle, il décide de créer un business florissant.
Au cœur de leur école, les deux adolescents se transforment en sexo-thérapeutes. Ils proposent des séances d’éducation sexuelle à leurs petits camarades. Leurs conseils portent leurs fruits et leur notoriété s’envole. Dans une démarche toujours plus inclusive, la deuxième saison laisse davantage de place aux autres orientations sexuelles. Tous les personnages, adolescent·e·s comme parents empruntent le merveilleux chemin de l’émancipation. « Sex Education » efface cette image lisse des ébats et met en lumière une sexualité débridée.
À retrouver sur Netflix.
Hypnotiques, réalistes et enrichissantes, ces séries LGBTQIA+ font résonner la voix de la bienveillance. Loin des clichés caricaturaux qui gravitent autour de la communauté LGBTQIA+, elles portent un regard tendre sur ce quotidien parfois amer.