Ce film du Taïwanais Patrick Liu, disponible depuis le 23 décembre 2020 sur Netflix a fait une entrée discrète sur la scène du petit écran. Pourtant, le film LGBT « Ton nom en plein coeur » hisse haut les couleurs du drapeau arc-en-ciel. Au cœur d’une intrigue qui se tient dans les années 80, deux lycéens tombent amoureux l’un de l’autre. Mais leur union se heurte à une société taïwanaise autoritaire en pleine transition. Entre douceur et déchirement, cette romance met en lumière le long chemin pour atteindre l’acceptation des différences.
Lorsqu’on pousse les portes du film « Ton nom en plein cœur », on plonge dans le Taiwan des années 80. Une époque morose pour les habitants qui sont contraints de vivre dans un État strict. Mais dans cette impression de chaos sommeille une tendresse irrésistible entre Jia-han et Birdy, les deux protagonistes.
Avec leurs personnalités attachantes, ces lycéens nous attrapent par la main et nous invitent à passer un moment dans leur quotidien. On sillonne les couloirs, les dortoirs, chaque recoin du pensionnat pour garçon dans lequel ils résident. Malgré leurs différences de caractère, Cupidon tire la flèche de l’amour entre ces deux êtres en pleine quête identitaire.
La flamme de l’amour menacée par le vent des critiques
Tous deux expriment une certaine difficulté à s’avouer leurs sentiments. Être à contre-courant les effraie, ils redoutent le regard des autres et craignent d’être reniés par leur propre famille. Pourtant, le bout du tunnel est proche, en 1987, la loi martiale est abolie, une annonce synonyme de liberté et d’évolution. Le blason de la communauté LGBT est redoré, mais les mentalités, elles, restent arriérées.
Si cette société conservatrice n’est plus au goût du jour, l’amour des deux hommes, lui, est toujours malmené. Leur pensionnat devient mixte et une jeune lycéenne séduisante vient semer le trouble dans leur relation. « Ton nom en plein coeur » est une romance semée d’embûches qui fait écho au passé du réalisateur Patrick Liu, lui-même homosexuel.
Le reflet de la vie du réalisateur en toile de fond
Le réalisateur plante dans son œuvre quelques fragments de sa vie, notamment de ses années lycée mouvementées. Il déclarait :
« J’espère que les spectateur.rice.s s’identifieront à l’affection et aux peines de cœur ressenties par la communauté LGBTQ, qui sont tout aussi authentiques que celles des autres. Je souhaite que ce film contribue à libérer la parole dans toute l’Asie. Je rêve d’un monde sans discrimination, où règnent un peu plus d’amour et de tolérance. »
Un message de paix et de tolérance tout à fait symbolique puisque la production du film a débuté en 2018. Année à laquelle le mariage gay n’était pas encore autorisé à Taïwan. Les couples homosexuels devront attendre 2019 pour sceller leur union en toute légalité. Ce drame romantique dépeint aussi cette lente évolution qui colle à la peau de la petite île d’Asie.
Un film inspiré d’une histoire vraie
Au-delà de cette dimension autobiographique dominante, « Ton nom en plein coeur » fait aussi un clin d’œil à l’activiste taïwanais Chi-Chia Wei. Devenu une véritable icône dans le pays, il a fait avancer les droits LGBT et s’est battu pour estomper les discriminations à leur égard. Dans une scène du film, les deux jeunes tourtereaux croisent ainsi la route de cet homme engagé. On le voit sur une place de Taipei, vêtu d’une robe fabriquée à partir de préservatifs, prenant la pose comme un Rodin des temps modernes et affichant une hargne palpable.
Cette image saisissante du long métrage n’est autre que le reflet de la réalité. Peu de temps après, le militant se fait violemment arrêter par la police. Une fresque amère qui met en lumière des morceaux de l’histoire volontairement laissés dans l’ombre.
Pour le pays, ce film est presque une révolution et apparaît même comme une arme fatale pour dépoussiérer les mentalités. Loin du film à l’eau de rose, « Ton nom en plein coeur » est nourri par des instants délicats et candides. À découvrir !