Tendre des bouquets de fleurs à la Saint-Valentin est un acte qui sème le romantisme et cueille les cœurs transis. Le 14 février, de nombreux gentlemen à retardement se bousculent chez le fleuriste pour se procurer une composition florale à la hauteur de leur amour. Même si ce cadeau sentimental à pétales fait l’unanimité pendant cette fête, il n’est pas très compatible avec les convictions écologiques. Les bouquets, achetés à la hâte à la Saint-Valentin, ont fait un long voyage polluant avant de s’acheminer jusqu’aux vases des dulcinées. Si vous pensiez avoir fait un geste pour la nature, détrompez-vous, c’est tout le contraire. Prenez-en de la graine.
Des roses en février, une aberration écologique
À l’approche de la Saint-Valentin, les devantures des fleuristes croulent sous les sceaux de roses. Des rouges vermillon, des jaunes ou des poudrés, il y en a pour tous les gouts et tous les coeurs. Ces fleurs évoquent des scènes poétiques dignes d’une rom-com et s’érigent entre toutes les mains le 14 février. Éclusées jusqu’à la dernière tige, elles sont presque devenues une offrande « obligée » pour la fête de l’amour. D’ailleurs, elles font la bonne santé financière des fleuristes, qui réalisent 25 % de leur chiffre d’affaires annuel en ce jour.
Pourtant, même si les roses accompagnent inlassablement les déclarations écrites ou orales et parsèment nappes blanches et draps de lit, elles sont en rupture totale avec la saison hivernale. Si vous regardez autour de vous, les roses en sont tout juste à l’état de « bourgeon ». En France, elles ne s’ouvrent qu’à partir de début avril. Les bouquets que vous achetez à la Saint-Valentin sont donc cultivés à l’étranger et rapatriés sur le sol français dans des avions réfrigérés. Investir dans des roses en février est aussi dévastateur que de se faire un gratin d’aubergine ou une salade de tomates hors période estivale.
Selon une étude américaine, les bouquets de roses vendus à la Saint-Valentin dégagent environ 9000 tonnes de CO2, soit l’équivalent de la pollution causée par 2500 automobilistes en un an. Alors même s’ils flattent vos yeux et vos narines, ils ne font pas le même effet sur Mère Nature. Ces roses, qui partent comme des petits pains le 14 février, sont loin d’être traitées avec tendresse et affection.
Des bouquets de Saint-Valentin qui fleurent bon… les pesticides
Lorsque vous plongez votre nez au creux de ces roses, fraîchement offertes par votre moitié, vous ne respirez pas seulement une odeur fruitée, vous sniffez également des substances hautement toxiques. Avant de rejoindre vos étagères, ces bouquets de fleurs glanés à la Saint-Valentin ont subi des traitements très controversés pour pousser à vitesse éclair et avoir une apparence irréprochable. Cultivées en majorité sur le continent africain, ces fleurs sont peut-être belles visuellement, mais elles sont empoisonnées de la tige au pistil.
Selon un laboratoire spécialisé, chaque fleur concentre une quarantaine de produits, dont des pesticides interdits par la réglementation française. Ces ingrédients à forte connotation chimique déciment des populations entières d’abeilles. D’autres comme le chlorothalonil sont nocifs pour la santé humaine. En l’inhalant, vous êtes susceptible de récolter d’innombrables éruptions cutanées et d’avoir les muqueuses des yeux en feu. Mieux vaut donc ne pas y fourrer sa tête. Ces bouquets de Saint-Valentin sont donc plus sales qu’ils en ont l’air.
Une empreinte carbone élevée et des dégâts incommensurables
Les bouquets de fleurs que vous avez reçus avec émotion à la Saint-Valentin ont certainement voyagé plus que vous au cours des deux derniers mois. La plupart des roses pimpantes servies le 14 février proviennent du continent africain. Au Kenya, par exemple, plus de 400 millions de roses sont produites en masse. Le lac Naivasha attenant leur sert de réservoir. Aujourd’hui, le lac ne ressemble plus qu’à une vulgaire mare et a été dépeuplé de quasi tous ses poissons. Mais le fléau ne s’arrête pas là. Une fois à maturité, les roses sont cueillies à la main par des femmes, payées seulement 96 euros par mois pour travailler jusqu’à épuisement 6 jours sur 7.
Vous vous dites alors qu’il est plus judicieux de se tourner vers des roses produites aux Pays-Bas, terre qui a une certaine proximité géographique avec la France. Détrompez-vous, ces roses monopolisent encore plus d’énergie. Privées de lumière naturelle et de soleil, elles poussent artificiellement sous des serres chauffées à 20°C. Kenya, Équateur, Colombie ou Pays-Bas, le désastre est le même. 25 roses importées ont une empreinte CO2 similaire à un vol Paris-Londres. Autant de dégâts engendrés et d’efforts humains dépensés pour des bouquets de Saint-Valentin qui tiendront à peine six jours.
Cependant, les roses ne sont pas les seules à lâcher du kérosène dans le paysage. C’est ce que soulignait le journaliste-militant Hugo Clément dans une enquête réalisée pour le magazine « Sur le Front« . Un hortensia produit en Bretagne est ainsi envoyé aux Pays-Bas, sur une plateforme logistique pour atterrir chez un fleuriste d’Île-de-France. Au total, il a parcouru 1500 kilomètres pour faire un aller-retour sur sa terre d’origine. L’industrie horticole est enlisée dans une profonde absurdité.
Tournez-vous vers des fleurs locales et de saison
Pas question pour autant de renoncer aux traditionnels bouquets de fleurs de la Saint-Valentin. Comme au supermarché, vous allez devoir faire des choix éclairés et vous familiariser avec les espèces de saisons pour ne plus contribuer à ce business barbare de la fleur. Même si les roses s’érigent comme une évidence à la Saint-Valentin, elles sont onéreuses, dévastatrices et beaucoup trop prévisibles. Pour être raccord avec l’écologie, misez plutôt sur des camélias, qui ressemblent comme deux gouttes d’eau aux sempiternelles roses.
Vous pouvez également composer un bouquet hétéroclite ponctué de mimosa, de jasmin et d’iris. Ou alors, déclarer votre amour en toute simplicité avec des tulipes d’un rouge éclatant. Si vous n’avez pas l’âme d’un.e botaniste ni de mémoire visuelle, certains labels peuvent vous servir d’indicateur. Le label Fleurs de France certifie les fleurs et plantes cultivées en France selon une démarche écoresponsable. Plante Bleue assure des végétaux produits par des entreprises françaises, qui œuvrent pour le respect de l’environnement.
L’amour rend aveugle, mais ouvrez bien les yeux lorsque vous choisissez vos bouquets de fleurs à la Saint Valentin. Si vous avez des doutes, vous pouvez toujours offrir à votre moitié une carte « à planter ».
