Dans les années 1600, William Shakespeare écrivait : « La beauté s’estime par le jugement des yeux », soulignant la subjectivité de ce concept. Mais dans un monde globalisé, cette perception varie-t-elle selon les pays ? L’entreprise britannique Superdrug a entrepris une expérience fascinante pour répondre à cette question, en étudiant comment les idéaux de beauté féminine varient à travers le globe. Découvrez les standards de beauté hallucinants qui définissent la perfection du corps de la femme dans différentes cultures.
À noter : ce projet ne cherche pas à célébrer ces idéaux fluctuants, mais à en démontrer l’incohérence, soulignant qu’aucun corps ne devrait être la cible d’une pression pour correspondre à une norme artificielle.
Une expérience visuelle unique
Superdrug a collaboré avec l’agence de marketing Fractl pour recruter des graphistes issues de 18 pays. Leur mission : utiliser Photoshop pour retoucher l’image d’une femme afin qu’elle corresponde aux standards de beauté de leur culture. Les graphistes, toutes des femmes, avaient carte blanche pour modifier les formes et les vêtements, tout en respectant une consigne essentielle : garder les formes corporelles visibles. Cette démarche s’inspire du projet Before & After d’Esther Honig, qui avait exploré la diversité des perceptions culturelles de la beauté en 2014.
Les résultats de ce projet révèlent des différences frappantes dans les « silhouettes idéales ». Par exemple, les pays d’Amérique du Sud, comme la Colombie, privilégient une morphologie en sablier, tandis que les pays européens et asiatiques favorisent des silhouettes très minces. Certaines images montrent des transformations légères, tandis que d’autres présentent des changements radicaux, donnant presque l’impression de voir une personne différente.
Les chiffres derrière les images
Superdrug a également interrogé un petit échantillon de 35 personnes pour estimer le poids des corps retouchés. Les résultats montrent des écarts significatifs dans les poids et les indices de masse corporelle (IMC) idéalisés. Les graphistes des pays asiatiques et européens ont souvent produit des images correspondant à des IMC considérés comme étant en sous-poids, tandis que les graphistes sud-américaines ont favorisé des formes plus voluptueuses.
Cette analyse quantitative met en lumière la manière dont les standards de beauté corporelle peuvent varier non seulement en termes de forme, mais aussi en termes de perception de la santé physique.
Une exploration des pressions culturelles
Toutes les graphistes participantes étaient des femmes, une décision délibérée de la part de Superdrug. L’objectif était d’obtenir une perspective féminine sur ce qui est perçu comme attirant dans leurs cultures respectives, afin de mieux comprendre les pressions auxquelles les femmes sont confrontées. Cependant, l’expérience soulève également des questions plus profondes sur les influences socioculturelles qui façonnent ces standards.
La spécialiste Susan Bordo a souligné en effet dans ses travaux comment la mondialisation des standards de beauté a influencé des régions entières. Par exemple, au Nigeria, les standards locaux ont été éclipsés par les normes internationales imposées par des concours comme Miss Monde. La victoire d’Agbani Darego, première femme africaine à remporter ce titre, a propagé l’idée que la peau claire et une silhouette mince étaient des critères de beauté universels.
Une invitation à réfléchir
Ce projet met en lumière une vérité : il n’existe pas de « corps idéal ». Ce que l’un·e considère comme attrayant peut être perçu différemment ailleurs, révélant que ces idéaux sont non seulement subjectifs, mais souvent influencés par des attentes irréalistes et des pressions sociales oppressantes. Loin d’encourager une quête futile de perfection, cette initiative invite à une réflexion sur les absurdités des standards corporels modernes.
Elle rappelle que la diversité des corps est naturelle et belle, et que l’énergie dépensée à se conformer à des normes arbitraires pourrait être réinvestie dans l’acceptation de soi et la célébration de notre unicité. L’entreprise britannique Superdrug a annoncé qu’elle poursuivra ses explorations en étudiant aussi les perceptions de la beauté masculine, élargissant ainsi la réflexion sur ces normes souvent arbitraires.
Ce projet nous rappelle que la beauté, bien que subjective, est influencée par des forces culturelles, sociales et médiatiques. Il invite chacun·e à reconsidérer les standards imposés et à embrasser une vision plus inclusive et diversifiée de la beauté humaine.