La plateforme TikTok qui regroupe plus de 970 millions d’utilisateur.ice.s fait régulièrement émerger les tendances de demain. C’est une mine aux trésors pour les modeur.se.s dans l’âme et les beauty addicts. Mais hormis ces sujets « superficiels » qui affolent les likes, le réseau chinois s’ouvre aussi sur la diversité corporelle. Les challenges bienveillants écrasent d’une main de fer l’apologie de la maigreur.
TikTok est devenu le nouveau lieu d’expression du body positive. Les silhouettes s’affirment dans une belle sororité, faisant trembler les haters aux doigts bien pendus. Cette arme d’acceptation 2.0 a-t-elle détrôné Instagram ? Éclairage.
Les défis « minceur », au placard, la diversité aux commandes
TikTok, le réseau des jeunes, a longtemps été investi par des challenges grossiers prônant la minceur absolue. C’était le cas avec le « Earphone Waist Challenge ». L’objectif ? Faire deux fois le tour de sa taille avec des écouteurs filaires pour montrer à la toile entière sa taille fine. Ces démonstrations publiques dangereuses et surtout complètement déconnectées de la réalité se font doucement doubler par des contenus plus sincères.
Le mouvement body positive s’est d’ailleurs fait une place de choix dans le paysage TikTok. Le hashtag éponyme a été mentionné 6,7 milliards de fois. Désormais, des « madames tout le monde » délicieusement imparfaites révèlent leur corps sans fard. Les standards de beauté passent en sourdine devant ce soulèvement de selflove. À contrario de ces femmes « post bad », dissimulées sous des filtres, ces influenceuses décomplexées font tomber les injonctions, sur fond d’autodérision.
La tendance est à la normalisation des corps
En 2020, Lizzy Khang a par exemple lancé la mode du « vrai ventre ». Dans une vidéo, elle fait rouler sa bedaine rebondie par-dessus son pantalon en se déhanchant sur une musique de Nicki Minaj. Avec ses quelque 480 000 abonné.e.s, une heure a suffi pour que d’autres femmes lui emboîtent le pas. Ce côté viral, permis grâce à TikTok, donne davantage de résonance à cette vague d’acceptation.
Cette représentation à la fois brute et humoristique donne les clefs d’une confiance affirmée. Ce sont des « role models » accessibles et nécessaires pour une construction personnelle plus juste. Loin du ton grave et fataliste, TikTok prône l’affirmation de soi en musique. Une particularité propre au réseau qui permet de dédramatiser certains tabous, dans la bonne humeur. C’est un acte militant doux, mais à l’influence puissante.
La preuve, la tendance « LizzoBigGrrrls dance » inspirée de la chanteuse grande taille Lizzo recense un milliard de vues. Derrière la caméra, des personnes corpulentes dansent avec brillo sur les titres de l’artiste. Sous cette auto-célébration rythmée se cache un message puissant contre la grossophobie.
@lexodarealo Watch Out For The Big Grrrls!!!!#LizzosBigGrrrls #fyp #foryoupage #fypシ #4upage
D’autres hashtags comme #filtersareunhealthy, comprenez les « filtres sont malsains », préviennent aussi de certaines dérives fabriquées par les réseaux. Les femmes passent d’un visage repulpé par la technologie à une mine 100 % naturelle, laissant libre cours aux « imperfections ».
Même son de cloche pour la mode de « l’anti-contouring » qui soulève les clics depuis juin. Le contouring, astuce makeup connue pour sculpter le visage, voire l’affiner, est délaissé au profit d’un maquillage plus naturel. Les initiatives engagées qui clament haut et fort le mantra body positive secouent TikTok.
Mais face à ce grand étalage de chair gondolée, les commentaires dégradants rappliquent au galop. Bien décidé.e.s à en finir avec les remarques haineuses, les TikTokeur.se.s rebondissent, sans rougir.
Des messages grossophobes déjoués dans un élan collectif
TikTok sonnerait-il le glas du fat shaming ? En tout cas, les commentaires déplacés sur les rondeurs n’y sont plus les bienvenus. D’ailleurs les tendances douteuses sur le culte de la minceur n’ont plus autant la cote. Récemment, des femmes rondes prenaient même le parti de les détourner. Elles se sont appropriées la tendance « Je parie qu’elle est grosse sous ses vêtements ».
À l’origine, des utilisatrices s’affichaient face caméra dans des habits volontairement larges et resserraient le vêtement pour montrer leur silhouette fine. Une aberration pour les utilisatrices body positive qui se sont empressées de réagir. “Je préfère être grosse plutôt que d’humilier les autres pour booster mon propre ego”, disait @soulmori dans une vidéo vue par plus d’un million de personnes.
@casischaotic 😫😫
Dans le même registre, Ebony Matheson, une des figures du body positive sur TikTok a répondu avec tact au message « Ne sois pas grosse » d’un internaute. Elle a concocté une vidéo spéciale pour se moquer gentiment de cette remarque. Marqueur en main, elle dessine des traits sur les parties de son corps qu’il faudrait « raboter » selon cet homme. Grâce à ses talents en montage, elle a opéré une vraie chirurgie… virtuelle. À la fin, elle renchérit en disant “Est-ce que ça te rend heureux maintenant ?”. La vidéo aux 5 millions de vues a été inondée de gentillesse et de soutien.
TikTok prend des mesures contre les pubs sur la perte de poids
TikTok tente aussi de faire pencher la balance de la tolérance avec des décisions fortes. En septembre 2020, la plateforme chinoise annonçait de nouvelles restrictions sur les publicités de régime. Les campagnes pour des applications de jeûne et des compléments alimentaires liés à la perte de poids ont été bannies.
« Ces types d’annonces ne prennent pas en charge l’expérience positive, inclusive et sûre que nous recherchons sur TikTok », indiquait Tara Wadhwa, chargée de la politique de sécurité de TikTok
Cependant, ce parti pris est à prendre avec des pincettes. Il a aussi pour vocation d’étouffer certaines polémiques. Selon une étude de la société de cybersécurité Tenable, des publicités de ce genre ont longtemps entaché TikTok. En prime, ces dernières étaient trafiquées. Des célébrités influentes comme Snoop Dog ou Oprah Winfrey y vantaient les mérites de produits minceur. Or, les principaux.les concerné.e.s n’ont jamais prononcé ces paroles.
Si la plateforme préférée des ados commence à changer de visages grâce à des utilisateur.ice.s plus ouvert.e.s, elle continue de transporter certains vices. Par exemple, les régimes « maison » nocifs parviennent à se frayer un chemin sur l’application, de façon détournée. La dernière folie en date : consommer de l’Ozempic, un antidiabétique puissant. En Australie, le médicament est en rupture de stock, preuve que la bêtise humaine est aussi relayée par ce canal. Pour arriver à un monde 2.0 plus inclusif, des contrôles stricts ont aussi un rôle à jouer.
Et vous, pensez-vous que TikTok est un bon moyen pour accepter son corps ? Qu’est-ce qui vous donne confiance au quotidien ? Livrez-nous votre avis en toute transparence sur notre forum.