Certaines tournures que nous employons à l’oral, presque sans y penser, en disent long sur notre rapport à nous-mêmes. Parmi elles, des expressions telles que « je sais pas si c’est clair », « enfin voilà quoi », « je dis ça, je dis rien » ou encore les sempiternels « euh » et « en fait » peuvent être plus révélatrices qu’il n’y paraît. Elles trahissent souvent un manque d’assurance, un besoin de validation ou une peur de déranger, surtout en contexte professionnel ou social tendu.
Des tics verbaux anodins… mais révélateurs
Selon le Projet Voltaire, ces tics de langage servent souvent à gagner du temps pour réfléchir, mais ils peuvent aussi traduire un manque de maîtrise ou une nervosité sous-jacente. Quand ils deviennent systématiques, ils finissent par entamer la crédibilité de la personne qui parle et suggèrent un manque de confiance en soi. Parmi les plus fréquents, on retrouve :
- « Euh » : utilisé pour marquer une hésitation ou une recherche de mots.
- « En fait » : souvent redondant, il sert à reformuler ou se raccrocher à une pensée.
- « Tu vois » ou « voilà quoi » : sollicitent inconsciemment l’approbation de l’interlocuteur.
- « Je sais pas si c’est clair » : remet en question la clarté de ce qu’on vient d’exprimer.
- « Je dis ça, je dis rien » : permet de se dédouaner d’un avis qu’on n’assume pas totalement.
Ces expressions peuvent sembler inoffensives mais, selon la psychologue Christine Marsan, elles traduisent parfois une peur du jugement, un besoin de rassurer l’autre ou soi-même, ou encore un manque d’affirmation personnelle.
Quand le langage devient un masque
Des chercheurs en communication orale ont observé que les personnes peu sûres d’elles ont tendance à s’excuser d’exister à travers leur façon de parler. En plus des tics verbaux, elles utilisent des formulations atténuantes comme :
- « Je vais peut-être dire une bêtisse mais… »
- « Je suis pas experte mais je pense que… »
Ces tournures visent à adoucir un propos ou à se protéger d’un éventuel rejet, mais elles envoient un message implicite : je ne crois pas totalement en la valeur de ce que je dis. Sur le long terme, elles peuvent empêcher d’être entendue, comprise ou respectée à sa juste valeur.
Comment reprendre confiance dans sa parole
1. Identifier ses propres tics
La première étape consiste à en prendre conscience. On peut par exemple s’enregistrer ou demander un retour bienveillant à une personne de confiance.
2. Accepter les silences
Un tic verbal comble souvent un vide. Pourtant, une pause silencieuse est souvent perçue comme plus posée et maîtrisée qu’un remplissage sonore. Apprendre à respirer dans ses silences, c’est aussi affirmer qu’on a le droit de réfléchir.
3. Reformuler avec assurance
Remplacer un « je sais pas si c’est clair » par « dites-moi si je peux préciser un point » change la posture : on n’exprime plus un doute sur soi, mais on s’ouvre à l’autre.
4. Travailler l’estime de soi
Les tics ne sont qu’un symptôme. Derriere, il y a parfois une estime de soi fragilisée. Des outils comme la thérapie, le coaching ou la pratique régulière de la prise de parole (même en petit comité) peuvent aider à restaurer cette confiance.
Nos mots nous trahissent parfois. Un tic verbal n’est jamais anodin quand il devient systématique. Il peut être un signal d’alerte sur notre façon de nous percevoir et d’interagir avec les autres. Bonne nouvelle : il est tout à fait possible de s’en libérer. Cela commence par l’écoute, de soi et de ses propres mots.