Ă l’occasion de la Semaine mondiale de l’allaitement maternel du 1 au 7 aoĂ»t, on vous parle des bienfaits et des limites du « maternage proximal ». Portage, cododo, allaitement tardif, ne jamais laisser bĂ©bĂ© pleurer dans un coin… câest tout un panel de pratiques visant Ă rassurer l’enfant pour sa transition vers lâautonomie. Mais cette mĂ©thode qui sĂ©duit de plus en plus de parents ne fait pas lâunanimitĂ© en France.
Des pratiques de proximité physique et émotionnelle
Le maternage proximal correspond Ă un ensemble de pratiques dĂ©veloppĂ©es Ă diffĂ©rents niveaux : le peau Ă peau Ă la naissance par exemple, recommandĂ© dans la plupart des maternitĂ©s aujourdâhui, rassure le nourrisson. GrĂące Ă lâodeur et au rythme cardiaque du parent, le bĂ©bĂ© sâapaise, ce qui peut ĂȘtre bĂ©nĂ©fique sur les prochains mois, au moment du coucher, ou sâil a des douleurs liĂ©es aux coliques.
Le maternage proximal sâappuie ainsi sur la thĂ©orie de l’attachement Ă©laborĂ©e par le psychiatre et psychanalyste anglais John Bowlby en 1960. Les « maternantes » cherchent Ă offrir Ă leur bĂ©bĂ© une relation de proximitĂ© sĂ©curisante, de leur naissance Ă leur propre envol vers lâautonomie. Presque constamment, ces mĂšres sont Ă lâĂ©coute de leur bĂ©bĂ©, le consolent en direct et sont aux petits soins pour leur progĂ©niture.
Le portage « physiologique », en Ă©charpe ou en porte-bĂ©bĂ©, permet Ă©galement de rassurer le bĂ©bĂ©, en plus dâavoir son cĂŽtĂ© pratique. Tout en portant le bĂ©bĂ©, le parent a les mains libres. On retrouve aussi le cododo (de « co-dormir » ; le bĂ©bĂ© dort dans la chambre de ses parents ou dans leur lit) et lâapprentissage dâun langage des signes. Le bĂ©bĂ© exprime ses besoins primaires Ă travers des gestes simples Ă mĂ©moriser, ce qui lui permet de se sentir moins frustrĂ© de ne pas pouvoir se faire comprendre.
Lâallaitement tardif, lui, est recommandĂ© par l’OMS jusqu’Ă 6 mois de maniĂšre exclusive puis jusqu’Ă 2 ans, « voire plus ». Jusquâau sevrage naturel. En plus des bienfaits pour la santĂ© et le dĂ©veloppement du bĂ©bĂ©, le lait maternel permet aussi une sensation de proximitĂ© et de chaleur rassurante avec la maman.
Et enfin : on ne laisse pas pleurer bĂ©bĂ© dans un coin. De nombreuses Ă©tudes prĂ©conisent cette mĂ©thode de consolation en temps rĂ©el. Elle permet de rĂ©guler le systĂšme nerveux de lâenfant, de ne pas lâenvahir de stress toxiques. Celle technique est Ă©galement trĂšs critiquĂ©e, surtout par les gĂ©nĂ©rations de nos parents.
Des mauvaises habitudes pour lâenfant ?
Pour les adeptes du maternage distal (le contraire du maternage proximal), ces pratiques tirent vers « lâhyperparentalité ». La critique concerne le fait que les maternantes couveraient trop leur bĂ©bĂ©, ce qui lâamĂšnerait Ă prendre de mauvaises habitudes.
Ă priori, ce nâest pas le cas. Un bĂ©bĂ© qui grandit en effet dans un environnement de confiance, sans stress, oĂč il a la sensation dâĂȘtre Ă©coutĂ©, va, justement, dĂ©velopper une plus grande confiance en lui. Cette assurance lui permettra de ne pas avoir crainte du monde extĂ©rieur, et dâĂȘtre plus indĂ©pendant par la suite.
« Pas besoin d’ĂȘtre dans l’excĂšs d’un cĂŽtĂ© comme de l’autre. On peut ĂȘtre trĂšs proche de son bĂ©bĂ© sans crĂ©er de dĂ©pendance, mais la fusion a ses limites. Si elle dure trop longtemps et s’il n’y a jamais de sĂ©paration, l’enfant peut avoir peur du monde extĂ©rieur et le trouver terne. Les enfants Ă©voluent et la parentalitĂ© aussi : il faut passer de super maman de bĂ©bĂ© grĂące au maternage Ă super maman d’enfant en lui apprenant l’autonomie ! », prĂ©cise le pĂ©dopsychiatre MichaĂ«l Larrar Ă Magic Maman.
Notons que cette pratique concerne surtout la mĂšre. Mais dans certains couples hĂ©tĂ©rosexuels, le pĂšre peut effectuer plusieurs tĂąches de proximitĂ© : le peau Ă peau, porter le bĂ©bĂ© en Ă©charpe ou le cododo⊠Il suffit de se mettre dâaccord pour rĂ©partir les rĂŽles de la maniĂšre la plus Ă©galitaire possible.
Une injonction de plus ou un outil dâĂ©mancipation Ă©co-fĂ©ministe ?
Dans les milieux militants écologistes en occident, le mouvement est apparu dÚs les années 70 :
« Ă rebours des fĂ©ministes matĂ©rialistes qui considĂšrent que la maternitĂ© est une aliĂ©nation, nous portions un fĂ©minisme plus Ă©cologique, plus tournĂ© vers la dĂ©couverte du corps, Ă travers le manuel Notre corps, nous-mĂȘmes et les groupes de self-help », confie Claude Didierjean-Jouveau, prĂ©sidente de La Leche League (une association internationale de soutien et dâinformation Ă lâallaitement) de 1989 Ă 1997 Ă Reporterre.
Cette « mode » de maternage peut crĂ©er une pression supplĂ©mentaire pour certaines familles. Dâune part, lâinjonction Ă ĂȘtre un parent « parfait » peut entraĂźner une sensation de culpabilitĂ© chez celle ou celui qui a des difficultĂ©s Ă lâadopter. Ne pas pouvoir allaiter ou se fatiguer et crier sur lâenfant peut ĂȘtre alors dĂ©vastateur pour le moral du parent.
Dâautre part, il faut pouvoir mettre de cĂŽtĂ© du temps, et donc une partie de son travail rĂ©munĂ©rĂ©. Ce qui n’est pas possible pour toutes les mamans. Lorsque cette pratique est rĂ©alisĂ©e Ă partir d’une envie naturelle, avec confiance et indulgence envers soi-mĂȘme et les autres mĂšres, alors elle tire vers un fĂ©minisme.
MoralitĂ© : le maternage proximal est en quelques sortes une question de suivre son instinct et Ă©couter sa progĂ©niture du mieux quâon peut. Il nâexiste pas de maternage parfait ! Chacune des mĂ©thodes suivies doit dans tous les cas sâadapter en fonction de la vie professionnelle, la vie (de couple) de chacun.e. Ăduquer un enfant, câest surtout faire ce quâon peut !
Et vous, que pensez-vous de la maternitĂ© proximale ? Lâavez-vous expĂ©rimentĂ©e ? On en parle dans notre forum, dans le coin Grossesse et ParentalitĂ© !