À l’occasion de la Semaine Mondiale de l’Allaitement Maternel (SMAM) qui se déploie du 17 au 23 octobre, la marque Tajinebanane a concocté une campagne d’affichage aux accents courroucés. L’allaitement public, geste banal en apparence, fait encore trop souvent l’objet de critiques brutales et déplacées.
Ce projet d’envergure, savamment intitulé #milktamère, clame alors le droit d’allaiter en paix et ce dans n’importe quel lieu. C’est parti pour une belle gorgée de tolérance.
#milktamère pour en finir avec les critiques sur l’allaitement dans l’espace public
« Qu’est-ce qui doit nous choquer le plus ? Une mère qui allaite son bébé ou son enfant dans un lieu public ou la réaction de certains face à cet acte du quotidien que l’on devrait banaliser ? ». C’est avec cette question simple, mais brûlante de vérité que la marque Tajinebanane nous interpelle. Griffe spécialisée dans les vêtements d’allaitement, elle a dégainé un #milktamère pour que l’allaitement dans l’espace public vire enfin vers le non-sujet.
En cette semaine mondiale consacrée à l’allaitement maternel, la marque en appelle à l’empathie générale avec une campagne tristement parlante. Les affiches, placardées x8000 à Paris, Bruxelles et Marseille, superposent image de femmes devenues mères qui allaitent et commentaires péjoratifs récoltés sur les réseaux sociaux. Ces clichés accompagnés du #milktamère font écho à une sombre réalité. Ce geste des plus naturels soutire régulièrement des pudibonds « cachez ce sein que je ne saurais voir ».
Pour mener à bien cette campagne percutante, six jeunes mamans répondent à l’acte dans des lieux publics significatifs à savoir le tramway, le restaurant ou encore la laverie. Dressées comme des calques odieux, les captures d’écran recueillies sur Twitter sonnent quant à elles l’urgence de dédiaboliser l’allaitement public.
« Va dans les w.c. ou dans un petit coin”, « nous les mecs nous ne voulons pas voir ça”, « à ce rythme, bientôt on les laissera pondre en pleine rue”. Ces commentaires biberonnés à l’austérité témoignent de cette méfiance qui suit les mères allaitantes au quotidien.
La campagne #milktamère s’adresse aussi au plus grand nombre avec la phrase rugissante « Choqués ? Nous aussi » qui invite à réfléchir. Cette interrogation projetée sur fond noir flirte avec un QR code menant au manifeste de la marque, signée entre autres par Marlène Schiappa et Laure Manaudou.
Un appel à « allaiter partout, tout le temps »
Selon une récente étude, 69 % des mères qui allaitent ne se sentent pas soutenues par la société. Des regards indiscrets aux leçons de morale non-sollicitées en passant par les violences physiques, en s’exposant aux yeux de tou.te.s, les femmes devenues mères qui allaitent se heurtent à une hostilité injustifiée. L’espace public devient alors une espèce de tribunal à ciel ouvert dont elle se passerait volontiers.
En juin dernier, une Franco-Américaine essuyait par exemple un refus catégorique d’allaiter au Louvre, musée qui grouille par ailleurs d’œuvres pointées vers des seins nus. Aujourd’hui, elle pose derrière #milktamère pour prendre sa revanche et encourager à une libération lactée.
Son histoire est malheureusement commune à de nombreuses mères allaitantes. À Disneyland, dans les locaux de la CAF ou encore dans une file d’attente, les femmes voulant nourrir leur enfant par le sein se prennent encore des interdictions en cascade. La campagne #milktamère porte alors haut les couleurs de ce droit, régulièrement empêché sous couvert de la pudeur.
À quand la fin du désert juridique ?
Si dans certains pays comme la Suède, il existe une véritable « culture de l’allaitement » fermement distillée dans les mentalités, en France le constat est plus amer. Sur la question de l’allaitement public, la loi se la joue muette. Certes, il n’est pas interdit par les textes, mais il n’est pas non plus explicitement autorisé.
Pourtant, selon la coordination française pour l’allaitement maternel (COFAM), 68 % des Françaises font le choix d’allaiter. Ce vide intersidéral d’ordre juridique est en partie dû à la lente montée des femmes sur la scène politique. Mais les temps changent doucement. En 2021, une proposition de loi a été déposée en vue decréer un « délit d’entrave à l’allaitement ».
La campagne #milktamère tente de faire bouger les lignes, à sa manière. Une piqûre de rappels d’utilité publique qui, on l’espère, remontera aux oreilles des politiques. En attendant, mesdames, la guerre des tétons se poursuit.