Parentalité et doubles standards : pourquoi ce que les pères font paraît toujours génial, mais normal chez les mères ?

Être parent, c’est une série d’improvisations sans fin, un peu comme un spectacle où il n’y aurait pas de script, juste des applaudissements (ou des hurlements) venant d’un public impitoyable de moins de 5 ans. Mais il y a quelque chose d’ironiquement injuste dans la parentalité : pourquoi ce que les pères font paraît toujours incroyable, tandis que les mêmes gestes sont considérés comme « normaux » ou même insignifiants chez les mères ? Bienvenue dans l’univers des doubles standards parentaux, un monde où un père qui change une couche mérite presque un standing ovation, tandis qu’une mère qui gère la maison, les devoirs, et les couches en simultané récolte souvent… un silence. Pourquoi cette différence de perception ? Plongeons dans le vif du sujet.

Les racines historiques : un héritage ancien et têtu

Historiquement, le rôle parental était bien tranché : les pères ramenaient les ressources, tandis que les mères restaient au foyer pour élever la progéniture. Ce modèle de famille, qui a régné pendant des siècles, a laissé des traces persistantes dans notre vision collective de la parentalité. Les mères ont été vues pendant très longtemps comme des « professionnelles » de l’éducation et de l’affection : elles seraient naturellement douées, instinctives, toujours prêtes à tout pour leurs enfants. En revanche, les pères étaient rarement présents dans le quotidien des soins aux enfants, et même lorsqu’ils participaient, c’était perçu comme une « aide » ponctuelle, pas comme une responsabilité de premier plan.

Ainsi, le regard porté sur le père qui s’occupe de son enfant a longtemps été perçu comme un geste d’exception. Ce regard, hélas, n’a pas tellement changé. Aujourd’hui encore, malgré la révolution de la paternité moderne et l’avènement du papa impliqué, nous en sommes parfois au même stade : ce que fait un père est applaudi comme étant « génial » et « tellement rare », même si de plus en plus de papas accomplissent leurs tâches parentales au quotidien.

Les louanges au quotidien : pourquoi tant d’admiration ?

Prenons un exemple courant : le père qui se rend à l’école pour récupérer ses enfants. Les regards admiratifs, les sourires attendris… il semblerait presque qu’on lui ait attribué une médaille pour un acte héroïque ! Mais quand la maman vient chercher les petits, c’est la routine ; après tout, c’est « normal ». Pourquoi cette différence ? Peut-être parce que nous sommes encore peu habitué.e.s à voir des papas gérer des activités parentales traditionnellement dévolues aux mamans. D’où cette idée persistante que tout geste paternel mérite des applaudissements pour sa « rareté ».

En somme, le père bénéficie souvent de ce que les psychologues appellent « l’effet de moindre attente » : les stéréotypes font en sorte que nos attentes envers lui soient basses dans le domaine de la parentalité. Du coup, le moindre geste est automatiquement perçu comme « plus » grand, plus important, plus généreux que s’il était réalisé par une mère. Le fameux « c’est génial de voir un papa si impliqué ! » fait partie du quotidien de nombreux pères dits modernes, pour qui ces gestes ne sont pourtant ni rares ni exceptionnels, mais bien une part essentielle de leur rôle de parent.

Les réseaux sociaux et le mythe du « papa héro »

Les réseaux sociaux jouent également un rôle dans la façon dont nous percevons les rôles parentaux. Il n’est pas rare de voir des vidéos de pères en train de faire des choses ordinaires (préparer le petit-déjeuner, faire des courses avec bébé dans les bras) devenir virales, accompagnées de légendes comme « regardez cet incroyable papa multitâche ! ». Bien sûr, c’est touchant, mais où sont les vidéos virales de mamans qui font ces mêmes activités ?

Dans une certaine mesure, les réseaux sociaux amplifient ce double standard, en cherchant à mettre en avant un modèle de paternité idéalisé, souvent éloigné de la réalité. Cette mise en scène peut donner l’impression que les pères sont ces héros modernes qui, malgré leur emploi du temps chargé, prennent le temps de s’occuper de leurs enfants, tandis que les mamans… et bien, elles font juste leur boulot. L’effet est doublement problématique : d’une part, il met une pression supplémentaire sur les mères, et d’autre part, il renforce l’idée qu’un père impliqué est quelque chose de si exceptionnel qu’il mérite d’être célébré.

La charge mentale : invisible pour les mères, remarquable pour les pères

Un autre point crucial du double standard parental réside dans la gestion de la charge mentale. La charge mentale, c’est cette planification continue des tâches familiales et domestiques, cette constante liste de choses à faire dans un coin de la tête, souvent portée par les mamans. C’est la mère qui, sans que personne ne le remarque, se souvient des dates de vaccination, du jour de l’anniversaire des copains/copines d’école et de la quantité exacte de couches restantes. Pourtant, cette charge est si ancrée dans le rôle maternel qu’elle en devient invisible.

Quand un père gère ne serait-ce qu’une partie de cette charge mentale, par exemple en se souvenant des rendez-vous chez le.e pédiatre, il est souvent perçu comme un modèle, un exemple de modernité. Or, si les mères recevaient la même reconnaissance pour chaque rendez-vous pris, chaque course planifiée et chaque déjeuner fait maison, elles seraient probablement aussi admirées. Mais, encore une fois, ce qui est attendu d’une mère est valorisé comme un choix et un « effort » chez un père.

La perception de la parentalité : quand « aider » paraît suffisant

Une expression courante, lorsqu’il s’agit de pères engagés, est qu’ils « aident » leur partenaire. Une formule qui, à elle seule, contient tout le biais du double standard parental. Parce que, dans cette logique, le père n’est toujours pas perçu comme un acteur à part entière de la vie familiale, mais comme un assistant dans le quotidien géré par la mère.

Il est intéressant de noter que, dans les familles où le père est impliqué à parts égales ou même majoritaires, cette perception persiste souvent dans l’entourage. Combien de fois une mère entend-elle la remarque : « Tu as de la chance, il t’aide beaucoup ! », comme si le père « aidait » dans sa propre maison. Ce langage est révélateur de la façon dont la société perçoit encore la répartition des rôles.

Un changement en cours, mais loin d’être total

Heureusement, le monde évolue. De plus en plus de pères sont conscients de ces clichés et rejettent les compliments excessifs qui leur sont adressés pour des gestes de parentalité basiques. Ils expriment, parfois même publiquement, leur souhait d’être perçus comme des parents à part entière, et non comme des seconds couteaux qui « aident » la vraie figure parentale : la mère. Cependant, les mentalités mettent du temps à évoluer, et la société dans son ensemble est encore en chemin vers une vision réellement égalitaire de la parentalité.

Pour changer tous ces doubles standards, il est essentiel de redéfinir ce que signifie être parent aujourd’hui. La parentalité devrait être vue comme une tâche partagée, où chaque geste, qu’il soit réalisé par un père ou une mère, est simplement normal, ni héroïque ni insignifiant. Peut-être qu’un jour, nous verrons un père ou une mère impliqué.e non comme un.e héros/héroïne, mais simplement comme un parent aimant et impliqué, ce qui devrait juste être la norme.

Margaux L.
Margaux L.
Je suis une personne aux intérêts variés, écrivant sur divers sujets et passionnée par la décoration, la mode et les séries télévisées. Mon amour pour l'écriture me pousse à explorer différents domaines, qu'il s'agisse de partager mes réflexions personnelles, de donner des conseils en matière de style ou de partager des critiques de mes séries préférées.
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