Devenir parent, c’est sauter dans l’inconnu. Et c’est aussi devoir apprendre ou réapprendre la communication non verbale, l’importance des gestes et du comportement. Pratiquée depuis la nuit des temps, oubliée puis en cours de réhabilitation, la méthode du « peau à peau » gagne à être connue. Nous avons recueilli pour vous de précieuses informations auprès de Priscilla. Elle exerce le métier de Doula et accompagne de nombreux parents avant, pendant et après l’accouchement.
Qu’est-ce que le « peau à peau » ?
La méthode dite du « peau à peau » consiste à placer le bébé nu, sur le torse nu d’un de ses parents. Elle peut être pratiquée quelques minutes après la naissance et continuer dans les semaines qui suivent. Cette pratique se normalise et se banalise depuis quelques années, à tel point qu’elle fait partie des recommandations de l’OMS. L’Organisme Mondial de la Santé préconise des séances de plusieurs heures par jour.
Si le « peau à peau » joue un rôle important dans le développement affectif du bébé et l’évolution de ses organes vitaux, pour un bébé prématuré cela devient vital. C’est d’ailleurs le témoignage poignant qu’en fait Héloïse des Monstiers dans son livre « Peau à peau » où elle livre un récit poignant sur la naissance prématurée et sur le rôle que les parents ont à jouer dans le soin et le développement des organes vitaux du bébé.
Les bienfaits du « peau à peau » avec bébé
Véritable processus de soin à part entière, faute de couveuses, le « peau à peau » a été développé en maternité en Colombie avec un bébé prématuré porté « comme un kangourou 22h/24 ». Le lien que le bébé connait dans l’utérus est ainsi maintenu. Il conserve les bénéfices qu’il avait dans le ventre. Notamment le sentiment de sécurité, le fait d’être contenu, une odeur et un toucher connu.
1 – Développe le système immunitaire du bébé et agit comme régulateur
Des études basées sur l’observation de bébés, notamment prématurés, ont mis en évidence l’importance du contact physique « peau à peau » entre le bébé et ses parents. Les paramètres vitaux étaient plus vite déréglés quand le bébé était en couveuse que lorsqu’il se trouvait en contact direct avec son père et sa mère.
Ainsi, il a été observé que le bébé régulait mieux sa température corporelle, de manière plus naturelle et sans effort ou dépense d’énergie en « peau à peau ». Il en est de même pour le rythme cardiaque ou la respiration. Posé sur la poitrine à proximité des battements du coeur et des voies respiratoires, le bébé est en contact direct et se « cale » sur son parent.
2 – Faire du « peau à peau » favorise l’allaitement
L’ocytocine est l’hormone de l’amour, et également l’une des hormones clés de l’allaitement. La sécrétion d’ocytocine permet un relâchement du lait vers le mamelon (grâce à la contraction de cellules, les myoépithéliales). La production de l’ocytocine est augmentée lors des séances de « peau à peau ». C’est un moment de détente et d’observation qui permet à la mère de ressentir pleinement son amour et donc de générer cette hormone.
Le bonus, c’est que l’ocytocine réduit les risques de dépression post-partum et favorise le sommeil réparateur. Sur le ventre, le bébé est placé sur la poitrine de sa mère, cette position l’encourage à aller chercher le sein de manière innée.
3 – Apaise le bébé
Priscilla, nous explique que le « peau à peau » est vraiment bénéfique car :
« Il permet au parent d’être dans une bulle avec le bébé. C’est un temps où tous deux se reposent et reprennent de l’énergie plutôt que d’être dans l’action. Ils prennent un temps où on ne fait rien d’autre que profiter. Le bébé dort plus longtemps quand il est en « peau à peau », car ils sont beaucoup plus apaisés et ont beaucoup moins de réflexes archaïques liés au stress comme l’agrippement ou les bras écartés subitement, dû à des connexions neurones favorisées par un état de stress.
Le « peau à peau » génère de l’ocytocine qui calme l’état de stress. Le bébé humain ne nait pas autonome et a besoin d’être rassuré et de sentir qu’il n’est pas en danger, car il réagit de manière pratico-pratique : il est contre sa mère dont il connait l’odeur et la voix, il est rassuré et retrouve son environnement connu intra-utérin protecteur »
Grégoire, qui a pratiqué le « peau à peau » à la naissance de son fils, nous raconte que pour sa part cette pratique lui a permis « de passer du temps avec mon enfant. Et la proximité ajoute de la tendresse au moment. Je n’ai pas le souvenir de pleurs lors d’un « peau à peau » ».
4 – La méthode du « peau à peau » favorise le lien d’attachement
Si le « peau à peau » permet d’équilibrer les paramètres vitaux et la sécrétion d’hormones importantes au bon développement du bébé, celui-ci permet également d’être actif dans le développement de son bébé.
Et cette pratique n’est donc pas réservée exclusivement aux mères, bien au contraire. Au-delà des bénéfices physiques et physiologiques, cela permet d’intégrer le père à l’évolution de l’enfant et de faire partie du paysage des figures d’attachements du bébé. Arthur témoigne de son expérience de « peau à peau » avec son premier enfant :
« C’est la vie, c’est quelque chose d’unique, surtout au début. Tu as l’impression de former un tout et que c’est le bonheur ultime pour le bébé. Tu sais de manière primaire que tu lui donnes une référence olfactive à vie. Ça te laisse aussi le temps de l’observer et d’entendre sa respiration. C’est une imprégnation physique et mentale, indescriptible, c’est presque quelque chose qui relève du subconscient animal »
Un contact privilégié avec bébé
Si le « peau à peau » est incontestablement une méthode bénéfique pour l’enfant comme pour les parents, il faut veiller à ne pas en faire une injonction ou une obligation. Priscilla nous alerte sur la dimension psychologique dans laquelle le « peau à peau » est pratiqué :
« Si une maman rencontre des difficultés maternelles, il n’est pas opportun d’insister pour créer un contact de « peau à peau » non souhaité ou si le besoin ne se fait pas ressentir. Si la maman ou le papa n’émet pas une intention profonde, le bébé ressent que le mood n’est pas bon et cela va lui générer du stress.
Par ailleurs cela pourrait renforcer le sentiment d’échec et de frustration que la maman pourrait ressentir post-partum. Il faut être très vigilant.e à ne pas se forcer et à vivre sa parentalité selon ses choix et ses possibilités. En tant que Doula, je suis là pour accompagner les mères ou les couples qui me consultent sur ces questions. Je ne conseille jamais, je donne simplement des informations afin que les parents prennent leurs propres décisions de manière éclairée »
Et vous, avez-vous déjà pratiqué le « peau à peau » avec votre bébé ? Que pensez-vous de cette pratique ? Venez échanger sur ce sujet sur notre forum.