Que faire si vous apprenez que votre enfant est victime de harcèlement scolaire ? 6 étapes précieuses

En France, un.e enfant sur dix navigue dans les tourments du harcèlement scolaire. Une souffrance, souvent silencieuse, que les victimes préfèrent taire au risque de voir leur « peine » s’alourdir. Pourtant, certains indices peuvent trahir cette oppression précoce qui se vit derrière la grille de l’école et bien au-delà. Des affaires toutes neuves qui disparaissent du cartable, des maladies simulées dès le saut du lit, un changement radical de comportements en classe… Nul besoin de parcourir le journal intime de son enfant pour déchiffrer son mal-être. Toutefois, lorsque les parents s’aperçoivent que la chair de leur chair est sous le joug d’une bande de bourreaux prépubères, la colère peut rapidement talonner la raison. Mais effrayer ces tortionnaires des cours de récré en les attrapant par le colback n’est pas la meilleure issue. Plutôt que d’en faire une affaire personnelle, voici 6 étapes intelligentes pour aider votre enfant en proie au harcèlement scolaire. 

Écoutez votre enfant et cultivez un dialogue sain

Lorsqu’un.e enfant fait face au harcèlement scolaire, iel est plongé.e dans un sentiment de crainte permanent et intarissable. Iel a donc besoin de gestes calmes et de paroles rassurantes pour se confier. Privilégiez une approche douce et un cadre feutré qui lui inspire confiance. Même si son histoire vous torture de l’intérieur, gardez la face. Évitez les phrases culpabilisantes comme « pourquoi tu ne t’es pas défendu.e ? » ou « est-ce que tu as fait quelque chose pour qu’iels s’en prennent à toi ? ». Ces questions invalident les ressentis de l’enfant et le forcent à croire que c’est lui/elle qui est en tort.

Lorsque votre enfant passe aux aveux et qu’iel vous déploie tout ce qu’iel endure à l’école, ne le.a coupez pas. Témoigner lui demande déjà un effort surhumain alors attendez son « point final » pour rebondir. Limitez l’effet « interrogatoire de police » qui pourrait braquer l’enfant. Préférez des questions « guidées » sur ses émotions et sa perception de la situation. Évitez également de surréagir ou de vous emporter à travers vos réponses. Votre enfant pourrait ensuite minimiser le problème pour ne pas vous contrarier. Même si la haine vous démange, essayez de la retenir et de rester le plus neutre possible. Ce qui compte c’est que l’enfant victime de harcèlement scolaire soit entendu et cru.

Essayez de ne pas personnaliser ce qui se passe

Ce témoignage à cœur ouvert de votre enfant peut raviver des souvenirs aigus. Si vous avez aussi enduré le même sort pendant votre tendre âge, ces confidences sont susceptibles de créer un « effet miroir » inconscient. Votre passé d’enfant brimé.e se confond alors avec le calvaire actuel de votre bambin.e. Indéniablement vous faites l’amalgame et vous vous réappropriez personnellement le douloureux vécu de votre enfant.

Au lieu de résoudre le problème présent, vous tentez de régler vos propres comptes. Cependant, même si cette réaction est plus un mécanisme d’auto-défense qu’une vraie volonté, mieux vaut prendre du recul. Vous pouvez faire des petites digressions vers votre histoire, à condition que ce soit pour enrichir votre enfant dans sa rude quête de tranquillité. Faites le parallèle avec votre expérience seulement si c’est pour en tirer des leçons utiles et applicables au cas de votre enfant. Un.e enfant qui subit du harcèlement scolaire a surtout besoin de « repères » dans ce quotidien brouillon.

Donnez-lui des pistes pour réagir modérément

Si vous apprenez que votre enfant est le souffre-douleur d’un gang de tyrans juvéniles, vous pouvez être tenté.e de riposter par la menace et la violence. Mais camper à la sortie de l’école pour les effrayer à votre tour risque plutôt d’envenimer le problème. Il ne faut pas omettre les représailles futures que vos enfants peuvent endurer à cause de votre « coup de sang ».

Pas question non plus d’inciter votre enfant à devenir un Mohammed Ali de la cour de récré en lui enseignant tous les arts martiaux possibles et imaginables. Loin de là le concept du « si on t’attaque, fais pareil ». Planter ses crocs dans le bras de l’adversaire ou lui arracher les cheveux n’arrange rien. En plus d’écoper d’avertissements dans son carnet de liaison, votre enfant peut être encouragé.e à, lui aussi, intimider par la terreur.

Les harceleur.se.s sélectionnent finement leur cible. Iels se tournent généralement vers des élèves sensibles aux critiques, mais de nature « trop » réservée pour répliquer. Si votre enfant subit du harcèlement scolaire, donnez-lui des clés pour qu’iel puisse répondre intelligemment.

Apprenez-lui à exorciser ses émotions autrement que par le dialogue : à l’écrit, à travers le dessin ou en se défoulant dans la cour de récré. Musclez sa répartie au gré de mises en situation et de jeux de rôle. Ou montrez-lui le pouvoir de l’ignorance. Évoquez également les personnes « piliers » à solliciter à l’école si jamais iel se sent en insécurité.

Apprenez à votre enfant à nommer ce qu’iel subit

Un.e enfant victime de harcèlement scolaire a souvent tendance à sous-estimer la situation et à penser que les brimades sont un « passage obligé » de la scolarité. De leur point de vue, les grand.e.s terrorisent toujours les petit.e.s. Les victimes vont alors dénigrer le problème en disant que « c’est pour rire » ou que « ce n’est qu’un jeu ». En tant que parent, n’hésitez donc pas à poser les bons termes.

Ne tentez pas d’adoucir la réalité avec des mots plus « gentillets ». Votre enfant a besoin d’être légitimé.e dans son ressenti et ses angoisses. Dire que votre enfant est le bouc émissaire d’une bande de harceleur.se.s sans pitié permet une vraie prise de conscience. L’enfant peut ainsi reconnaître son statut de « victime » et arrêter de se voiler la face.

Avertissez l’établissement scolaire

Depuis peu, le gouvernement a étayé de nouvelles mesures pour éradiquer le harcèlement scolaire des écoles. Parmi elles, le départ systématique du/de la harceleur.se de l’établissement scolaire concerné. Cependant pour que cette règle s’applique, il faut briser la glace et alerter l’école. Une démarche que les victimes osent rarement entreprendre par crainte de ne pas être prises au sérieux.

En tant que parent, vous êtes la « voix porteuse » de votre enfant. Plutôt que de forcer votre enfant à pousser la porte du/de la CPE ou du/de la directeur.rice pour tout leur révéler, prenez les devants. Demandez un entretien avec le.a professeur.e principal.e de votre enfant. Présentez-lui les informations que vous avez recueillies et appuyez votre discours avec des preuves si vous en possédez (SMS, marques physiques…).

Aidez votre enfant à reconquérir son estime

Un.e enfant victime de harcèlement scolaire garde de lourdes séquelles de ces moqueries. Ces critiques « gratuites » se déroulent souvent pendant une période charnière, lorsque l’enfant cherche à se construire et à trouver son identité. Elles désapprouvent tout « l’être » d’un enfant. Leur confiance est totalement effritée et leur crédibilité auprès des autres élèves est quasi nulle. Même si l’itinéraire « médical » peut être une bonne voix pour résorber cette estime écorchée, il existe aussi d’autres raccourcis.

C’est le cas du théâtre qui a une fonction cathartique et émancipatrice. Mais pas seulement. Si votre enfant excelle dans un domaine comme le sport ou l’art, encouragez-le.a sur ce chemin. Ne le.a couvrez pas inutilement de fleurs, mais montrez-lui qu’iel a du potentiel. Petit à petit, votre enfant se sentira plus « valide » aux yeux des autres et aura une perception « rafraîchie » d’elle/lui-même.

Un.e enfant qui se heurte au harcèlement scolaire se tricote souvent une fermeture éclair invisible sur les lèvres. Ce qui complique l’intervention des parents. Pour sonder votre enfant sans le braquer, posez-lui des questions « éclairées » à la sortie de l’école.

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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