Après avoir découvert les derniers résultats alarmants du rapport du GIEC sur l’environnement, pris conscience de l’ampleur de la guerre en Ukraine ou encore réalisé que ce fichu virus n’était toujours pas du passé… vous sentez une vague d’anxiété qui ne s’arrête jamais ? On vous comprend et vous souffrez peut-être « d’esprit collant ». Une overdose d’informations négatives qui pèse sur le moral et sur le quotidien. Quelques explications et solutions pour préserver votre santé mentale.
Une situation psychologique dangereuse
Après avoir lu, vu ou écouté pendant une heure les informations anxiogènes, les actualités politiques en continu et les faits-divers locaux, certaines personnes peuvent ressentir une vague d’angoisses. C’est tout à fait normal. Mais si la sensation est tenace le long de la journée, il est possible qu’il s’agisse du phénomène de « l’esprit collant », une situation psychologique critique, dangereuse pour la santé mentale. Beaucoup l’ont ressentie durant ces dernières années de pandémie ou récemment avec le conflit Russie-Ukraine, après avoir été scotché.e.s aux écrans à recevoir des nouvelles inquiétantes.
Le phénomène de « l’esprit collant » (ou du « sticky mind », en anglais) vient de l’idée que l’anxiété engendrée par la surconsommation d’informations négatives se colle comme de la glue à notre esprit.
Cet état implique une « pensée répétitive réitérée en boucle, un sentiment de s’embourber dans l’inquiétude, un talent pour les voyages imaginaires dans des images et des pensées catastrophiques, et une tendance à ce que ces canaux indésirables deviennent bruyants et insistants, au lieu de simplement passer dans l’esprit », expliquent les psychologues Marty Seif et Sally Winston au média Stylist
Cette anxiété colle si fort que la personne a la sensation d’être bloquée dans des pensées négatives. Et il est difficile de s’en détacher.
y'a que moi qui suis plus du tout l'actu tellement ça me déprime ?
— G&B (@gandb_fr) November 5, 2020
Trop d’empathie & de sens de responsabilité
La surconsommation d’informations en continu est à éviter lorsqu’on est une personne déjà sujette à l’anxiété. Anne-Hélène Clair, psychologue et doctorante en neurosciences, le confirme à Slate : « Les études montrent que l’exposition aux médias peut être anxiogène. Ce qui est particulièrement difficile à gérer, c’est de voir une information – de nature angoissante – de manière répétée. Il suffit que vous soyez légèrement anxieux.se pour que cela vous impacte. »
Le phénomène peut venir de la manière qu’on a de lire les informations anxiogènes. La personne à l’esprit collant a également des difficultés à compartimenter ses sentiments. C’est-à-dire qu’elle a du mal à différencier ce qui la concerne directement et ce qui est plus grand qu’elle. Elle n’est pas capable de mettre les histoires qu’elle lit de côté pour continuer à vivre. C’est la même formule pour quelqu’un qui vit avec de l’éco-anxiété, face aux nouvelles sur l’état de notre planète.
La conséquence est que l’individu à l’esprit collant va ressentir de l’empathie et un sens des responsabilités face à la nouvelle qui génère de l’anxiété. Cette sensation de responsabilité lui rajoute une charge mentale, qui la tire moralement vers le bas. Il faut donc, en plus de devoir penser à ses propres problèmes du quotidien, vaincre la déprime, le stress, et les nouvelles sensations qui nous tombent dessus.
Comble de l’histoire, les personnes souffrant de ces troubles anxieux ont tendance à se demander si elles ont passé suffisamment de temps à regarder les informations, et à se réprimander pour avoir été irresponsables ou égoïstes d’avoir choisi de continuer de vivre leur vie. C’est un vrai cercle vicieux…
Que peut-on faire pour contrer cela ?
Afin d’éviter cette situation, reconnaitre les symptômes et les accepter est une première étape. Les expert.e.s préconisent également de ne pas se battre contre ses sentiments, mais plutôt de changer sa relation avec l’anxiété.
« Aussi étrange que cela puisse paraître, le moyen le plus efficace de vivre avec cet esprit fixe n’est pas de lutter contre lui, mais de changer votre relation avec lui », expliquent en ce sens les psychologues Marty Seif et Sally Winston à Psychology Today
Il faudrait donc prendre du recul sur les informations reçues, pour ne plus se sentir trop impliqué.e dans le flux de nouvelles. Il faut essayer d’observer ses sensations de loin, pour mieux les comprendre. Un peu comme dans certaines techniques de méditation, où l’on observe les sensations en nous, on ne les juge pas, on les laisse passer.
« Valorisez une attitude de curiosité et non le jugement direct, l’alarmisme ou encore le sentiment d’urgence », précisent les spécialistes. C’est ce que les psychologues appellent « l’abandon thérapeutique », une méthode qui permet de soulager la détresse en valorisant le détachement.
Esprit collant : savoir ou ne pas savoir ?
Aussi faudrait-il préserver sa santé mentale en faisant une digital detox, pour faire redescendre la pression. Mais il n’est pas nécessaire de faire une diète totale et définitive de l’information.
« S’il peut être bénéfique de s’éloigner quelques jours des médias pour relâcher la pression et calmer son angoisse, il ne faut pas non plus tomber dans un processus d’évitement », prévient la psychologue Anne-Hélène Clair.
Si s’informer reste un droit et non une obligation, avoir envie de se couper totalement des actualités peut être le signe qu’il y a besoin de soutien professionnel et personnalisé. De plus, les informations sont souvent inévitables. « Ce sera d’une autre façon, par une autre source d’information, ou votre entourage vous parlera ce qu’il se passe », rappelle la psychologue.
Vous pensez souffrir « d’esprit collant » ? Partagez vos impressions sur le forum de The Body Optimist !