Alcoolisme mondain : découvrez la face cachée de cette dépendance

L’alcoolisme mondain s’insinue dans la pinte de bière partagée autour d’un match de foot, dans la coupe de champagne levée au pot de départ d’un collègue et dans le cocktail commandé pour célébrer l’anniversaire d’une amie. À la différence de l’alcoolisme “pur et dur”, qui commence dès 8h le matin et qui continue toute la journée, cette forme de dépendance est plus subtile. Elle se “justifie” par la fête ou la convivialité. Chaque verre est socialement accepté, voire encouragé. L’alcool devient une sorte de trait d’union, une obligation pour se faire “bien voir” du groupe. Comment reconnaître l’alcoolisme mondain ? Pourquoi est-il si difficile à admettre ? Et surtout, comment y faire face ? Voici comme démasquer cette addiction déguisée. 

Alcoolisme mondain : quand la fête devient un piège

L’alcoolisme mondain ne ressemble pas à l’image classique que l’on se fait de la dépendance. Ici, pas de bouteilles vides cachées dans un placard ou de comportement erratique visible à l’œil. Personne ne se rue sauvagement sur l’alcool. Au contraire, c’est l’alcool qui vient tout seul à votre verre, sans que vous ne l’ayez réclamé. L’alcoolisme mondain, c’est le kir que vous buvez pour célébrer un contrat important, la marquisette que vous acceptez volontiers au mariage de votre sœur ou le verre de margarita que vous faites tinter à l’EVJF de votre meilleure amie. En clair, c’est une forme de dépendance qui soutient la théorie du “avec l’alcool, la fête est encore plus folle”. 

Lors de ces événement spéciaux, l’alcool sert de “liant” social. Il fait le pont entre les convives et devient presque une “obligation”. Si vous refusez, vous prenez le risque de vous faire appeler “rabat joie” ou d’être mis de côté. Vous buvez pour “vous détendre”, pour “faire comme tout le monde” ou simplement accompagner un moment festif. Mais que se passe-t-il lorsque ce verre, pris pour “suivre le mouvement”, devient indispensable pour profiter de l’instant ?

L’alcoolisme mondain, feutré sous le prétexte de la convivialité et de la fête, toucherait près de 4 millions de personnes en France. Vous ne buvez pas d’alcool en grande quantité, ni au point de faire un blackout mais vous en consommez dès que l’occasion se présente. Que ce soit lors d’un repas entre collègues ou d’une soirée raclette entre amis, chaque sortie, même la plus banale, rime avec alcool.

Des signes difficiles à repérer

Contrairement à l’alcoolisme “traditionnel” où l’alcool remplace quasiment l’eau et coule à flot du lever au coucher, l’alcoolisme mondain est presque insondable. Vous baignez dedans sans vous en rendre compte. Il est difficile de voir où se situe la limite entre consommation récréative et dépendance. Et c’est justement là le problème. Dans une société française où l’alcool fait partie du “patrimoine”, personne ne trouve “anormal” de boire un petit verre en communauté. C’est un geste tristement banal. Cependant, certains signes peuvent alerter :

  • La fréquence et la régularité. Si vous vous retrouvez à boire presque systématiquement lors d’événements sociaux, cela peut être un indicateur.
  • L’incapacité à refuser. Quand dire « non » à un verre devient inconcevable, ou lorsqu’une soirée sans alcool vous semble ennuyeuse ou inconfortable. Vous avez besoin d’alcool pour survivre aux événements sociaux.
  • Les excuses pour boire. Se convaincre qu’un verre est nécessaire pour “se détendre après une longue journée” ou “s’intégrer dans un groupe”. Tout devient un excellent prétexte pour consommer de l’alcool, même le simple fait d’avoir eu une dure journée de boulot. Finalement, l’alcool devient un loisir, une boisson “plaisir” que vous vous servez en disant “je l’ai bien mérité”.

Dans les colonnes de Santé Magazine, le Dr Jacqueline Kerjean suggère également de faire un test simple pour savoir si vous êtes concerné.e par l’alcoolisme mondain. Stoppez volontairement votre consommation pendant trois jours et voyez ce qui se passe. Est-ce que vous avez ce sentiment de manque ? L’envie irrépressible de décapsuler cette bière dans le frigo ? Ou est-ce que vous supportez ce “sevrage” ?

Des risques sous-estimés

L’alcoolisme mondain n’a rien d’anodin. Même si la consommation semble modérée, elle peut entraîner des conséquences sur le long terme. Et c’est justement ça qui est trompeur. Sur le coup, vous avez l’impression d’avoir été raisonnable en vous limitant à deux verres. Vous vous rassurez avec cette fameuse phrase “un petit verre ça n’a jamais fait de mal à personne”. Sauf que voilà, mis bout à bout, ces verres finissent par représenter une bouteille entière, voire plus encore. À la fin de la semaine, vous avez bu autant qu’une personne alcoolique en une journée. À l’instant T, vous ne ressentez pas les effets de l’alcool, mais votre corps les subit en silence :

  • Des impacts sur la santé : Risques accrus de maladies cardiovasculaires, de troubles du foie ou encore de cancers liés à une consommation régulière.
  • Une altération de l’humeur : L’alcool, bien que perçu comme un « relaxant », peut provoquer de l’anxiété ou accentuer des tendances dépressives.
  • Un effet sur les relations sociales et professionnelles : Si votre consommation devient visible ou problématique, elle peut affecter vos interactions et votre image. Ce n’est pas un scoop : l’alcool désinhibe et vous fait parfois dire des choses que vous regretterez le lendemain.

Comment sortir de ce cercle vicieux ?

Dans la culture française, l’alcoolisme mondain ne porte pas ce nom. C’est simplement une coutume épicurienne, un geste de “bon vivant”. Chez nous, les boissons qui affichent un degré sur l’étiquette font quasiment partie du décor. Elles s’imposent comme une évidence dans les verres vides. Ce n’est pas toujours simple de rompre avec cette fâcheuse habitude. Voici quelques pistes pour vous en libérer :

  • Observez et limitez votre consommation : Essayez de noter chaque verre consommé sur une semaine. Vous serez peut-être surpris.e de constater la fréquence ou la quantité.
  • En soirée, commencez par des softs et autorisez-vous un verre d’alcool. Ne le descendez pas d’une traite. Boire pour boire, c’est là que l’addiction se forge. Prenez le temps de savourer votre boisson comme chaque chose que vous consommez rarement.
  • Expérimentez des alternatives : Lors des soirées, optez pour des mocktails (cocktails sans alcool) ou des eaux aromatisées. Vous profiterez tout autant de l’événement.
  • Exprimez vos ressentis : Parlez de vos inquiétudes à un proche ou à un professionnel. Cela peut aider à lever un poids émotionnel.
  • S’entourer différemment : Si vos cercles sociaux encouragent systématiquement la consommation d’alcool, cherchez des activités qui ne l’impliquent pas : randonnées, ateliers créatifs, etc. Au moins, vous ne serez pas tenté.e.

Pour retrouver un rapport sain avec l’alcool et se défaire de l’alcoolisme mondain, pas question de fuir la foule ou de décliner chaque invitation. Vous pouvez très bien aller en soirée et tourner à la limonade. Ce n’est pas un crime. Et si quelqu’un vous force la main, vous n’avez qu’à dire que vous êtes allergique. 

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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