Bigorexie : révélation sur cette addiction qui peut toucher les athlètes olympiques

Les organismes de santé préconisent de pratiquer une activité physique régulière. Qu’il s’agisse d’enfourcher un vélo ou de soulever de la fonte à la salle, le sport vide la tête et garde le corps dans une forme olympique. Cependant, cet entraînement quotidien qui a tout d’un remède naturel peut rapidement muer en poison. Les athlètes en lice pour les JO sont bien placés pour le savoir. Lorsque le sport s’installe au centre de la vie et commence à prendre un peu trop de place dans l’agenda, c’est peut-être un signe précurseur de la bigorexie. Cette maladie méconnue, qui touche 15 % des sportif.ve.s, est assez paradoxale. Comment le sport, vanté à tort et à travers, peut-il se retourner contre nous et passer de loisir sain à obsession nocive ? Sur fond de bigorexie, la quête de bien-être se transforme en dépassement de soi irrationnel.

La bigorexie, une maladie sous-estimée

Le sport est au cœur de toutes les résolutions et trône en lettre capitale sur les to-do lists des personnes pantouflardes. Comme le vante le ministère des Sports, une activité physique permet de réduire le stress, d’améliorer la qualité du sommeil et de diminuer les douleurs. Mieux encore, elle joue le rôle d’un antidépresseur. Il n’y a aucune excuse pour bouder les baskets, ou presque. Dans les notes de bas de page, pas de message d’alerte sur les effets potentiellement pervers du sport. Le mot « bigorexie » n’est indiqué nulle part. Pourtant, cette maladie est loin d’être isolée.

Reconnue par l’OMS depuis 2011 et classée parmi les maladies psychologiques, la bigorexie traduit tout simplement une dépendance au sport. Il ne s’agit plus de faire deux ou trois séances dans la semaine histoire de se défouler, mais de se surpasser tous les jours et de mettre le sport au premier plan, quitte à sacrifier d’autres activités. La citation « no pain, no gain », étalée sur les murs des salles de musculation devient un mantra plus important que « croque la vie à pleine dent ».

La bigorexie a été identifiée et étudiée pour la première fois en 1976 par le psychiatre américain, le docteur William Glasser. Il la décrivait ainsi : « une addiction positive par opposition aux addictions considérées comme négatives pour l’alcool ou la drogue ». Les personnes en proie à la bigorexie cherchent sans cesse à se muscler pour avoir un physique à la « Hulk » quasi surhumain. Malgré une mécanique déjà bien affûtée, elles ont l’impression de ne pas être au summum de leur condition physique. C’est ce qui s’appelle la dysmorphie musculaire. Alors elles n’hésitent pas à aller au-delà de leur capacité et à franchir leurs propres limites, qu’importe si elles sont au bord du malaise ou de la fracture.

Des conséquences sur la santé physique… et mentale

L’alcoolisme débute avec un petit verre de vin de temps à autre « juste pour se détendre ». Puis à mesure que les jours passent, les quantités augmentent jusqu’à exiger une bouteille entière. Pour la bigorexie, c’est un peu le même schéma qui se dessine. Finalement tout est question de modération. D’abord, ça commence avec une volonté de « se faire du bien » et de sortir de son canapé. Puis une fois les baskets aux pieds, elles n’en ressortent plus. Le temps consacré au sport se démultiplie jusqu’à empiéter sur les sorties entre ami.e.s et les repas dominicaux.

Des lésions graves

Cependant, à force de pousser le corps dans ses retranchements, il finit par dire « stop » et manifester des signes de faiblesse. Les athlètes qui souffrent de bigorexie ne récoltent donc pas seulement des courbatures, ils peuvent écoper de sérieuses séquelles telles que des claquages, des entorses ou des fractures plus « paralysantes ». Outre ces stigmates visibles matérialisés par une béquille ou un plâtre, la bigorexie provoque aussi des blessures psychologiques.

L’isolement social

Déjà, elle enferme les sportif.ve.s dans leur monde fait de whey et de barres ultra protéinées. Les personnes atteintes de bigorexie peuvent carrément sortir de table avant le dessert ou s’éclipser d’un mariage pour accomplir leur quota de sport journalier et espérer avoir le profil de Schwarzenegger. Les rares contacts qu’elles entretiennent les ramènent inlassablement à leur discipline sportive et les condamnent à fournir toujours plus d’efforts.

Le développement de TCA

Elles font également preuve d’hypervigilance avec la nourriture et calculent tout ce qui atterrit dans leur assiette. Elles sont prédisposées à l’orthorexie, TCA qui consiste à manger toujours plus sainement et à peser les aliments au gramme près. Mais elles sont aussi susceptibles de sombrer dans l’anorexie pour perdre du gras et faire ressortir leurs muscles. Les athlètes peuvent également recourir à des pratiques dangereuses pour augmenter leur masse musculaire, comme l’utilisation abusive de stéroïdes ou d’autres substances dopantes.

Des problèmes d’hormones

L’excès de sport laisse aussi entrevoir des troubles hormonaux. Les sportives peuvent ressentir des douleurs plus incisives au niveau des ovaires, avoir des règles plus abondantes ou alors ne plus en avoir du tout (aménorrhées).

Comment se manifeste la bigorexie ?

La bigorexie est assez facile à percevoir, surtout d’un point de vue extérieur. Les fanatiques de sport culpabilisent s’iels ne font pas au moins 1000 abdos dans la journée ou 500 soulevés de terre. Iels ne s’autorisent aucune pause, pas même pour assister à un événement de la plus haute importance. La performance est leur priorité absolue. Plus rien d’autre ne les préoccupe. Iels déclinent les invitations, boudent les loisirs qui leur étaient chers et n’ont de goût qu’à mettre leur corps en mouvement. Leur semaine ressemble ni plus, ni moins au programme d’un.e athlète de niveau professionnel. Elle gravite essentiellement autour de la pratique sportive.

La bigorexie est semblable à l’anorexie. Sauf que les personnes qui en souffrent ne cherchent pas à perdre du poids, mais à gagner du muscle. C’est leur idéal. Éternelles insatisfaites face à leur reflet, elles estiment que leur silhouette n’est jamais assez sculptée et placent la barre un peu plus haute jusqu’à s’auto-saboter. Dans une société qui fait l’apologie du sport et qui diabolise la graisse, la bigorexie est rampante.

Que faire lorsqu’on souffre de bigorexie ?

Le sport est bon pour la santé, à condition qu’il ne se radicalise pas et ne mue pas en devoir ultime. Il doit procurer du plaisir et une certaine satisfaction, pas un sentiment de médiocrité ou un goût d’inachevé. Mais la frontière entre le raisonnable et l’extrême est parfois très mince. Un jour, vous courez pour vous aérer la tête et le lendemain vous vous inscrivez à tous les marathons de France pour vous challenger et vous forger une silhouette de colosse. La bigorexie s’insinue de façon sournoise. Au début, vous vous dites « voyons jusqu’où je peux aller » et ensuite vous faites du sport à outrance pour faire mieux que la veille.

Cependant, cette maladie n’est pas irrémédiable. Elle se soigne de la même manière qu’une addiction « classique ». Elle nécessite aussi un travail de fond en trois temps. Pour espérer vous réconcilier avec le sport et retrouver le sens du mot « modération », vous devez voir un.e addictologue, un.e psychologue et peut-être aussi un.e diététicien.ne. Le but n’est pas d’abandonner totalement le sport, mais de rééquilibrer la pratique.

La bigorexie prouve que le sport peut aussi avoir des méfaits. Cette maladie se transmet désormais sur la toile, à travers des vidéos estampillées « hard sport » et des photos avant/après qui nous font regretter d’avoir mangé des chips devant une série. Notez que la procrastination peut avoir du bon…

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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