Le mois de sensibilisation au cancer du sein, Octobre Rose s’est fait une certaine renommée. En revanche, le Septembre Turquoise, dédié aux cancers gynécologiques, lui, peine encore à s’imposer. Pourtant, le cancer des ovaires figure à la huitième place des plus fréquents chez les femmes. Utérus, vulve, endomètre… tout l’écosystème génital féminin peut tomber entre les griffes de la maladie, mais le dépistage reste trop souvent minimaliste. La prévention permet alors de lever le voile sur ces symptômes avant-coureurs qui lancent le SOS. Tour d’horizon.
Les cancers gynécologiques, en quelques chiffres
Le sexe féminin, mystérieux et sans cesse érotisé, est régulièrement mis en lumière pour son indéchiffrable « point G » ou son clitoris bien caché. À l’inverse, lorsque la maladie franchit cette zone si sensorielle, l’attention n’est plus la même. L’entrejambe des femmes, objet de tous les fantasmes, semble intouchable.
Et pourtant, les chiffres témoignent d’une autre réalité, moins glorieuse. Le cancer de l’ovaire a d’ailleurs la triste réputation d’être l’un des plus dévastateurs. En France, sur les 5000 cas recensés en 2018, plus de la moitié des femmes y ont laissé leur vie. Pour cause, il s’installe en silence, sans symptômes saillants et se propage par son absence d’examen de dépistage.
Parmi les cancers gynécologiques, le cancer du col de l’utérus, lui, possède son propre vaccin. Particulièrement virulent dans les pays en voie de développement, il résulte d’un papillomavirus persistant. En France, on compte 3000 cas chaque année. Entre 2015 et 2017, 59 % des femmes de 25-65 ans se sont fait dépister, soit à peine plus de la moitié, ce qui reste assez faible.
Même son de cloche pour le cancer de l’endomètre, en haut du classement des cancers de l’appareil reproducteur féminin. L’endomètre est la muqueuse qui habille les parois du corps de l’utérus et qui abrite le bébé pendant la grossesse. L’âge moyen au moment du diagnostic est de 69 ans. Ce type de cancer concerne essentiellement les femmes ménopausées. Plus de 8000 nouveaux cas ont été recensés en 2018. L’endomètre, c’est également le point de départ des cancers dit « du corps utérin ».
Les parties extérieures du sexe féminin ne sont pas épargnées non plus. La vulve, qui englobe grandes lèvres, petites lèvres, clitoris, orifice urétral et vaginal, périnée, anus et glandes de Bartholin est également vulnérable face à ce monstre invisible. Le cancer de la vulve est souvent laissé dans l’ombre puisqu’il concerne une à deux femmes sur 100 000 chaque année en France.
La peur du/de la gynéco, une bombe à retardement pour le diagnostic
Pour poser un diagnostic et pousser les examens, la case consultation gynécologique est inévitable. Cependant, ce passage entre les étriers est loin d’être une épreuve anodine. Selon une étude Ifop, 60 % des femmes ont d’ailleurs déjà renoncé à des soins gynécologiques. Et hormis les délais d’attente aberrants, la peur panique du/de la gynécologue arrive en tête de lice des arguments.
Entre les pratiques abusives, les violences gynécologiques et les attouchements, la pilule ne passe plus chez certaines femmes. Ces dérives terrifiantes qui sévissent entre les murs médicaux freinent la prise en charge. Ces rendez-vous manqués à cause d’une méfiance justifiée peuvent être fatals. Recréer un espace sûr et respectueux est une réelle urgence. Heureusement, le Planning Familial ou les sages-femmes donnent accès à des consultations en toute confidentialité, dans un cadre rassurant.
Repérer les cancers gynécologiques, à temps
Les cancers gynécologiques, fléaux endémiques, s’engouffrent souvent sans faire de bruit. Mais des signaux corporels peuvent mettre la puce à l’oreille et donner lieu à une consultation immédiate. Écouter ses parties intimes, écarter les jambes devant le miroir, scruter sa culotte à la loupe… ces gestes, peu sexy certes, ont toute leur importance.
L’apparition de saignements anormaux
C’est un indicateur commun à de nombreux cancers gynécologiques. Les pertes de sang, en dehors du cycle menstruel, sont à prendre très au sérieux. C’est un des symptômes les plus visibles qui soit. Qu’elles surviennent après un rapport sexuel ou par petites touches rosâtres dans les leucorrhées (pertes blanches), ces saignements ne passent généralement pas inaperçus.
Ils sont d’autant plus marquants lorsqu’ils surviennent chez une personne ménopausée. La consistance du sang pendant les règles sème aussi le doute. On peut par exemple observer des ménorragies, une sorte d’hémorragie menstruelle. Le flux est alors plus abondant, le sang est rouge vif et la présence de caillots y est courante.
Des douleurs pelviennes régulières
La sensation de recevoir des coups de poing dans le bas du ventre est récurrente chez certaines femmes en période de menstruation. Mais ces douleurs pelviennes, lorsqu’elles martèlent sur la durée, sont handicapantes et surtout annonciatrices d’un cancer déjà ancré.
La fâcheuse tendance à toujours remettre les maux sur le dos des hormones peut se révéler dangereuse. Mieux vaut ne pas minimiser ces douleurs qui pèsent sur le quotidien. Si cette souffrance s’accompagne d’apesanteur, un autre ressenti propre à la période pré-menstruation, elle peut notamment indiquer un cancer de l’ovaire.
Des pertes vaginales à l’apparence inhabituelle
Les pertes vaginales, aussi appelées pertes blanches ou leucorrhées, permettent de maintenir un certain équilibre dans la flore vaginale, notamment pour l’évacuation de cellules mortes ou de corps étrangers. Sous le poids de l’excitation, ce sont elles qui lubrifient le vagin avant un rapport sexuel. Mais pas seulement.
Les pertes vaginales changent parfois subitement d’apparence et d’odeurs. Cette modification peut simplement provenir d’un aliment au parfum coriace à l’image de l’oignon. Cependant, si sans ce facteur, elles deviennent malodorantes, aqueuses et abondantes, elles méritent toute votre attention.
Une sensation de démangeaison permanente
Parmi les cancers gynécologiques, le cancer de la vulve possède quelques particularités. Il peut provoquer des démangeaisons gênantes et envahissantes. Au moindre contact avec la vulve, que ce soit en s’essuyant aux toilettes ou en enfilant une culotte, des picotements prennent possession de toute cette zone.
L’envie irrépressible de se gratter est plus rugissante que jamais. L’apparence de la vulve, elle aussi, en dit long sur sa santé. Changement de couleur, épaississement de la peau, impression de dureté, grains de beauté plus gros… se palper la vulve n’a rien de curieux, au contraire, c’est un geste valeureux.
Des infections urinaires qui s’étalent sur la durée
Environ 50 % des femmes expérimentent le supplice de l’infection urinaire au moins une fois dans leur vie. Cette maladie commune brouille souvent les pistes. Sans examen, difficile d’en connaître l’origine. Elle peut être tout à fait bénigne ou au contraire cacher un problème plus profond, comme un cancer de l’utérus.
Des douleurs au moment de la miction, des difficultés à uriner qui se soldent par quelques gouttes et une vague de brûlures ou du sang dans les urines… ces signes, au caractère inoffensif et trop souvent dénigré, peuvent être plus graves qu’ils n’y paraissent.
Une perte d’appétit
Au même rang que la fatigue, la perte d’appétit fait partie des symptômes dits « secondaires », ceux qui jumellent d’autres signes plus probants. Les troubles alimentaires sont d’autant plus difficiles à déchiffrer puisqu’ils peuvent prendre racine de plusieurs façons. Intimement liée à la santé mentale, cette aversion de l’assiette n’est parfois que la partie visible d’un profond iceberg.
C’est le cas notamment du cancer de l’ovaire. Au moindre aliment, qu’il soit léger ou copieux, l’estomac est comblé instantanément alors que le corps, lui, ne l’est pas. Constipation, crampes, ballonnements… d’autres dérèglements d’origine gastrique ne sont pas à exclure du paysage.
Même si ces signes peuvent parfois être liés à des problèmes moins graves, il est impératif de consulter un.e professionnel.le de la santé en cas de doute. La vigilance et l’écoute de son corps sont des armes puissantes dans la lutte contre les cancers gynécologiques. En parallèle, les recherches concernant ces cancers avancent. Une simple prise de sang pourrait dépister une trentaine de cancers, même s’ils sont précoces. Une nouvelle piste révolutionnaire qui permettrait de limiter les ravages de ces intrus virulents.