Il faut « cultiver notre jardin » comme nous a expliqué Voltaire. Avec le temps, les bienfaits du jardinage pour notre santé mentale et physique ne se sont pas démentis. Mais de quelle manière notre esprit s’apaise et se soigne avec les plantes ? Quelques pistes pour le comprendre avec l’hortithérapie. Cette pratique du jardinage, en tant que thérapie, permet d’accompagner le traitement de certaines maladies mentales. Décryptage
Une discipline bénéfique pour la santé mentale
L’hortithérapie se réfère à la pratique du jardinage en profitant de ses vertus thérapeutiques. Elle est fondée dès la fin du dix-huitième siècle par le psychiatre américain Benjamin Rush. C’est « un moyen de venir en aide à une clientèle en difficulté physique, psychique, intellectuelle et/ou mentale, en utilisant le jardin thérapeutique comme support de travail par le biais d’activités encadrées par des professionnel.le.s formé.e.s ».
Cette discipline permettrait de gagner en estime de soi, pour des personnes bien portantes, mais aussi pour accompagner le traitement de l’autisme, des migraines, de la dépression profonde, de l’épilepsie ou encore pour soigner les personnes âgées.
« Jardiner est susceptible de prévenir l’émergence de certains troubles ou d’une dépendance, d’infléchir le cours de certaines pathologies (neurologiques, psychiatriques), d’améliorer les conditions de vie », explique Denis Richard, chef de service à l’hôpital Henri Laborit à Poitiers.
Le plan Alzheimer oblige d’ailleurs les unités à se doter d’un jardin de préférence « thérapeutique » où les patient.e.s, leur famille et le personnel hospitalier peuvent se réunir. Mais on n’aménage pas un jardin pour ces personnes de la même façon que pour des enfants. Ainsi, la mixité de tous ces genres rend l’hortithérapie très riche.
Comment le jardinage a des effets thérapeutiques ?
L’observation de la vie des plantes – de la croissance, en passant par la maturité, à son vieillissement et jusqu’à sa mort – renvoie les jardinier.ère.s à leur propre condition humaine. Le jardinage établit aussi un lien avec l’être vivant avec sa protection des intempéries et des maladies.
Ainsi, le jardinage est une véritable école de patience et de la frustration, où l’apprentissage ne s’arrête jamais. Aménager son jardin stimule alors les fonctions cognitives. Il faut savoir se repérer dans le temps et dans l’espace, mémoriser les noms et les soins spécifiques des végétaux.
Pour les amateur.trice.s, ce travail et le lien entre jardinier.ère.s (échange de conseils et de compliments) permet également de renforcer leur confiance en eux. Car l’hortithérapie est aussi une pratique de groupe. Pour Marc Mennessier, journaliste au Figaro et ingénieur agricole, le jardinage crée une sorte d’équilibre :
« Le contact avec les végétaux a toujours à voir avec la vie. Et les accompagner au jour le jour, cela rend optimiste. Grâce aux soins qu’on leur apporte, des fleurs éclosent, des fruits mûrissent… (…) c’est comme une sorte d’enfantement ! Bien sûr, il y a des déceptions, tout ne marche pas toujours comme on le voudrait : on encaisse de la grêle, une attaque parasitaire… (…) Il y a ainsi une sorte d’équilibre qui se crée. »
Sue Stuart-Smith, psychiatre et psychanalyste anglaise, également enseignante à la Tavistock Clinic de Londres, est l’auteure de « L’Equilibre du jardinier », un essai sur les bénéfices du jardinage pour la santé mentale. En s’appuyant sur des exemples d’expériences d’ateliers thérapeutiques, elle a notamment constaté que les prisonniers récidivaient moins, les ados à risques retrouvaient des repères, les personnes souffrant de syndrome post-traumatique gagnaient une forme d’apaisement, et que les personnes âgées gagnaient une meilleure forme physique et morale.
L’hortithérapie pour traiter les problèmes du surpoids et aider les enfants atteints d’autisme
L’hortithérapie est aussi utilisée pour accompagner les personnes souffrant de surpoids. Une étude menée au Royaume-Uni mesurait le bien-être des personnes lorsqu’ils jardinaient. La moitié des volontaires pour l’étude souffraient de surpoids et d’obésité.
Les résultats ont démontré qu’en pratiquant le jardinage une fois par semaine, pendant une demie-heure, les volontaires ont vu leur estime d’eux-mêmes s’améliorer, et leurs sentiments de colère et de dépression s’apaiser.
À l’hôpital de la Pitié-Salpétrière, le Pr David Cohen, qui dirige le service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent dans l’hôpital, a lui aussi témoigné des apports d’un atelier « potager/fleurs » auprès de ses jeunes patients, notamment autistes. Selon lui, ces ateliers de jardinage permettent de parler aux enfants du temps et de leur dire qu’ils sont comme une plante fragile, et qu’ils peuvent donc progresser.
« Il y a un esthétisme dans le jardin et une fragilité qui rend la chose précieuse. Cela est très important pour nous, parce que les enfants que nous recevons ont souvent beaucoup de reproches à faire au monde des adultes, ils estiment que ceux-ci ne se sont pas bien occupés d’eux, de manière réelle ou fantasmée. »
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