À l’occasion de la Journée mondiale du cœur ce jour 29 septembre, parlons des inégalités persistantes entre les femmes et les hommes, dans la recherche et le traitement des maladies cardio-vasculaires. Avec la méconnaissance générale des facteurs de risques chez les femmes, elles accèdent en effet plus lentement aux diagnostics et à la prise en charge de leur maladie. Et pourtant, elles sont plus nombreuses à mourir de crises cardiaques. Une meilleure prise en compte des caractéristiques du cœur des femmes et de l’organisme féminin pourrait ainsi contribuer à une protection médicale égale à celle des hommes. On fait le point.
Genrer les facteurs de risques de maladies cardio-vasculaires ?
La première cause de mortalité des femmes dans le monde sont les maladies cardiovasculaires, bien avant le cancer du sein. Seul.e.s 51.3 % des étudiant.e.s en médecine en sont conscient.e.s. Les femmes sont aussi plus vulnérables aux maladies cardiovasculaires que les hommes : 56 % en meurent contre 46 % des hommes. Pour le Dr Stéphane Manzo-Silberman, ce sont les changements de mode de vie des femmes, depuis vingt ou trente ans, qui ont changé la donne. Les femmes auraient une moins bonne hygiène de vie qu’avant : elles font moins de sport, fument et boivent plus d’alcool qu’avant, et ont une plus mauvaise alimentation.
La gent féminine est également impactée par le stress, pour tout un tas de causes, telles que la charge mentale, la précarité économique (due, entre autres, à une petite retraite, qui leur fait renoncer à des soins trop chers) ou encore le harcèlement quotidien. Bref, tout ceci augmente les risques de diabète et d’hypertension, et donc le risque de maladie cardiovasculaire chez les femmes. Et chaque année, le nombre de femmes de moins de 50 ans hospitalisées pour des problèmes cardio-vasculaires augmente de 5%. Ce nombre reste stable pour les hommes.
Des symptômes peu reconnus chez les femmes
Les stéréotypes de sexe et de genre influencent le diagnostic des maladies. Le myocarde ou l’AVC, considérés dans le milieu médical comme des maladies de l’un ou l’autre sexe, sont donc sous-diagnostiqués selon les sexes. L’infarctus du myocarde est par exemple connu pour être une « maladie masculine », caractéristique des hommes d’âge moyen stressés au travail.
Une patiente qui se plaint d’oppression dans la poitrine se verra alors prescrire des anxiolytiques, car on lui aura attribué une crise d’angoisse. Un homme sera plutôt orienté vers un cardiologue. Or d’après Santé publique France, le myocarde a augmenté de 20 % chez la femme entre 2008 et 2013.
Une prise en charge plus tardive pour les femmes
Au niveau de la prise en charge, les inégalités persistent. Ainsi, une femme attendra en moyenne une heure de plus qu’un homme pour que son entourage appelle un numéro d’urgence. Et à son arrivée à l’hôpital, elle attendra en moyenne encore une heure de plus que son homologue masculin avant d’être prise en charge par un.e cardiologue. Ce manque de réaction de la part de l’entourage proviendrait de la méconnaissance des symptômes chez les femmes, et en partie des normes genrées. Rares sont les partenaires masculins qui s’inquiètent, prendre soin des autres est un rôle qu’on réserve aux femmes, selon les stéréotypes dominants. Cette prise en charge tardive des femmes explique alors qu’entre l’admission aux urgences et la sortie de l’hôpital, le taux de survie atteint seulement 37 % chez les femmes, contre 55 % chez les hommes.
Aux méconnaissances des symptômes s’ajoute une norme médicale pensée pour et à partir des hommes, qui se voit notamment sur les mannequins pour s’exercer au massage cardiaque. Nous écrivions dans un autre article que le manque de massages cardiaques sur les femmes (elles sont 27 % moins susceptibles que les hommes d’en bénéficier) était dû en partie aux mannequins aux torses uniquement masculins. Ce qui entraîne une réticence des personnes formées à toucher les seins d’une femme, même lorsqu’elle se trouve en danger.
Solutions : plus de recherche et de traitements adaptés pour les femmes
Des enquêtes internationales et françaises montrent que sur l’ensemble des protocoles de recherche clinique, seulement 33,5 % des participants sont des femmes. Ce large manque de représentation de l’organisme féminin, dans la recherche des facteurs, des symptômes et jusqu’à leur parcours de soin, traduit alors un bien plus grand risque de maladies cardiovasculaires chez les femmes.
Face à cela, une meilleure prise en compte des caractéristiques du cœur et du corps des femmes, ainsi qu’un effort de prévention et de sensibilisation publique, pourrait contribuer à une protection médicale égale à celle des hommes.
Si on sait que les femmes ont une espérance de vie de 85,4 ans, contre 79,4 ans pour les hommes, on ne sait pas que cet écart se réduit nettement lorsque l’on regarde l’espérance de vie en bonne santé. En 2018, une femme en bonne santé vivra jusqu’à ses 64,2 ans, et un homme jusqu’à ses 63,4 ans. Autrement dit les femmes vivent plus, mais en plus mauvaise santé.
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