Les VTC lancent une initiative révolutionnaire avec des psychologues dans les voitures

Franchir le seuil d’un cabinet de psy n’est pas toujours simple. Vous vous dites certainement « il y a plus grave que moi ». Pourtant, il n’y a pas de « petits » problèmes ou de mal-être plus légitime qu’un autre. Alors pour vous confier dans un cadre moins formel et intimidant, l’application Heetch déporte les psys derrière le volant de ses VTC. Une opération inédite intitulée « Première conversation » et menée en partenariat avec la Fondation Falret du 28 au 31 mars pour sensibiliser les jeunes à la santé mentale. Une consultation déguisée qui donne l’illusion d’un simple échange entre chauffeur.se et passager.ère. Au lieu de prendre place sur un fauteuil en velours, vous racontez ce qui vous pèse depuis la banquette arrière et vous le faites presque naturellement. Mettre des psys dans les VTC désamorce la honte et les tabous. 

Psys dans les VTC, comment l’idée a-t-elle germé ?

À la base, lorsque vous commandez un taxi, c’est pour vous rendre d’un endroit à un autre, rien de plus. Si vous êtes dans un bon jour, il vous arrive de faire la conversation au/à la chauffeur.se, par politesse, mais les discussions se limitent souvent à la pluie et au beau temps. Cependant, du 28 au 31 mars, les voitures Heetch se métamorphosent en exutoire, en lieux de confessions. Vous pourrez y lâcher tout ce que vous avez sur le cœur et dire tout haut ce que vous gardez tout bas.

Du moins c’est toute l’ambition de l’opération baptisée « Première conversation ». Elle a été initiée par Heetch en collaboration avec la Fondation Falret qui œuvre pour les personnes en souffrance psychique. Pour l’occasion, des psys qualifié.e.s se convertissent en chauffeur.se.s VTC et laissent leur oreille attentive à disposition. Vous ne vous contentez pas de rebondir sur le bulletin d’information recraché par la radio. Mais vous parlez de votre actualité à vous, de ce que vous réservez généralement à votre journal intime (ou à votre chat).

Les psys, qui ont exceptionnellement troqué leur bureau cossu contre l’habitacle des VTC, sont là pour vous guider, vous sortir de votre mutisme sans que ça ne paraisse « forcé ». D’ailleurs, Heetch a créé ce concept salutaire suite à un constat : de nombreux.ses passager.ère.s déballent leurs maux les plus secrets une fois passé.e.s la portière. C’est comme si l’anonymat que suggère le taxi avait un effet désinhibant. Si la plateforme Heetch a invité des psys sur le siège conducteur des VTC, c’est avant tout pour choyer la santé mentale des jeunes de moins de 30 ans, qui constituent 70 % de ses usagers.

Ouvrir la discussion dans un endroit plus familier

Le sentiment de mal-être n’a pas d’âge ni de visage. C’est un état commun à toutes les générations. Selon les chiffres de Santé Publique France, un jeune sur cinq est en proie à des troubles dépressifs. Mais rares sont celleux qui prennent l’initiative de réserver une séance de psy. Beaucoup s’imaginent qu’il faut avoir vécu des drames atroces pour s’allonger sur le canapé et avoir sa place entre les murs des cabinets de psy. Il y a aussi cette image très caricaturale du lieu froid, haut de plafond et minimaliste où seul un divan culmine au centre de la pièce. Les jeunes ont plus tendance à voir la séance de psy comme un genre d’interrogatoire plutôt qu’un éclairage émotionnel vertueux.

Passer la porte du cabinet de psy peut être intimidant, voire angoissant. Même si la plupart des structures sont pensées pour mettre à l’aise, il y a toujours cette crainte de ne pas savoir quoi dire. Avec des psys dans les VTC, l’ambiance est plus détendue et confortable. L’espace confiné des voitures, plus familier que les lieux de « thérapie », est également plus propice au bavardage. Il y a pas non plus ce face à face frontal traditionnel avec le.la professionnel.le de santé. Le seul eye contact que vous pouvez avoir, c’est éventuellement à travers le rétroviseur, et encore.

La discussion démarre sur des généralités : les JO à venir, la météo capricieuse du moment, Anne Hidalgo… Puis elle s’affine pour se recentrer sur vous, vos soucis personnels et vos tourments. Un revirement malin opéré par les psys de l’autre côté du VTC pour que vous vous racontiez comme un livre ouvert, sans filtre ni barrière. Contrairement aux vrai.e.s chauffeur.se.s de taxi qui se contentent d’écouter d’une seule oreille, les psys apportent leur regard « expert » et guident vos propos.

Un premier contact avec les psys qui peut déboucher sur un suivi

Cette opération menée par Heetch et la Fondation Falret a une finalité : encourager les jeunes à poursuivre la discussion chez les psys, dans leurs vrais lieux d’exercice. C’est une façon de leur prouver qu’il n’est pas nécessaire d’être plus bas que terre pour avoir besoin de se livrer ou de solliciter les lumières de ces ambassadeur.ice.s de la santé mentale. Vous ressortez du véhicule plus léger.ère, comme délesté.e d’un poids. Vous changez de regard sur les psys et vous vous faites une meilleure idée de ces entretiens confidentiels. Dans la voiture, les étiquettes « patient.e.s » et « thérapeutes » s’estompent pour donner lieu à un rendez-vous plus « banal ».

Cette séance sur quatre roues qui se confond avec un échange amical est d’ailleurs offerte. Vous ne déboursez pas plus en cochant l’option « Première conversation ». Vous pouvez ensuite programmer une autre rencontre au cabinet, sans forcément vous engager sur la durée. D’ailleurs, au terme de la course, lorsque vous arrivez à destination, Heetch vous envoie un message pour vous suggérer une prise de contact. Ces psys hissé.e.s aux manettes des VTC deviendront peut-être fidèles à votre agenda.

Mettre des psys dans les VTC, là où personne ne les attend, est une démarche prometteuse. Cette opération ponctuelle permet de faire un premier pas vers les cabinets de psychologue, encore campés par les idées reçues.

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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