S’il y a encore quelques décennies s’aimer jusqu’à ce que la mort nous sépare était la norme, le divorce est désormais entré dans les mœurs. On se marie et on se quitte ainsi à tout âge. Une évolution à laquelle la justice comme la société ont dû s’adapter, pour le meilleur et non pour le pire comme on l’imagine parfois…
On ne se marie plus pour les mêmes raisons
Si l’évolution de la législation est souvent invoquée pour expliquer le nombre grandissant de divorces au cours du siècle dernier, on oublie un détail qui a son importance. Le mariage, au fil du temps, a certes gardé le même nom, mais il a pourtant profondément changé de nature.
En 2020, le mariage est ainsi avant tout romantique. On s’unit à l’être aimé, à l’âme sœur, à celui ou celle avec lequel on veut passer le reste de sa vie. Mais lorsque l’amour s’émousse, lorsque des différends irréconciliables apparaissent au sein du couple, le mariage n’a alors plus lieu d’être. Les termes du contrat, « s’aimer et se chérir » n’étant plus remplis, le divorce s’impose de lui-même pour beaucoup. La question de l’épanouissement personnel, du bonheur, du bien-être de l’individu est ainsi centrale dans cette union.
Quelques siècles et décennies plus tôt pourtant, le mariage par amour n’est pas forcément la norme. L’union n’a pas les mêmes objectifs. Le mariage est ainsi un passage obligé qui peut être arrangé. Il servira alors les intérêts de la famille. Que l’on soit heureux ou non dans cette union n’a finalement que peu d’importance.
L’émancipation de la femme change la donne
Que l’on soit heureux ou plutôt, heureuse. Car si la nature du mariage a changé, le statut de la femme lui aussi a évolué. Le divorce est rendu possible aussi et surtout parce que désormais, une vie hors mariage est possible pour les femmes, ce qui n’était pas le cas auparavant.
Comment divorcer alors que l’on a ni travail, ni argent pour subvenir à ses besoins, pas d’habitation pour quitter le domicile conjugal et parfois aucune aide de ses proches puisque la séparation, à une époque où le mariage religieux est encore la norme est vue comme une faute grave ?
L’émancipation de la femme a ainsi largement contribué non pas à favoriser, mais à permettre le divorce. Les épouses n’appartiennent plus à leur mari après avoir appartenu à leur père. Elles sont des adultes autonomes et indépendantes avec un statut leur offrant désormais la possibilité de s’extirper du foyer.
Un acte entré dans les mœurs
De décennie en décennie, divorcer est ainsi passé de l’exception à la banalisation. La possibilité d’une séparation future est admise et comprise par tous les candidats au mariage. Le tabou de l’amour éternel a ainsi pris du plomb dans l’aile. Y compris chez nos aînés.
Car les seniors n’hésitent plus désormais à sauter le pas. Le divorce n’a rien d’une lubie ou de la défaillance générationnelle que l’on s’imagine parfois. Cet acte est à présent pleinement entré dans les mœurs. On estime ainsi que certaines transitions charnières de la vie, comme le passage à la retraite sont des moments propices aux séparations.
L’allongement de l’espérance de vie n’y est certainement pas pour rien. La possibilité de rencontrer l’amour à tout âge non plus. Ceux qui s’étaient jusqu’ici résignés ne sont ainsi sans doute pas insensibles aux belles histoires de coups de foudre en maison de retraite ou aux nombreuses publicités pour des sites et applications de rencontres pour seniors. La vie ne s’arrête plus à 50 ans. La courbe des divorces reflète alors simplement cette évolution des mœurs.
Une évolution juridique qui facilite l’accès au divorce
Mais si divorcer est devenu un acte aussi banal, c’est aussi et surtout parce que désormais la loi l’autorise, le facilite même. La législation a ainsi grandement évolué au cours des siècles derniers. En 1884, le divorce n’était ainsi admissible qu’en cas de faute grave. Et il fallait être en mesure de la prouver. La justice et la société ne reconnaissaient pas alors qu’on puisse se séparer pour des raisons aussi banales que le manque d’amour.
Les choses ont désormais changé. Selon le Ministère de la Justice, en 2016 seuls 6,9 % des divorces étaient prononcés pour faute. Le divorce par consentement mutuel représentait ainsi 55,2 % des séparations. Le divorce à l’amiable s’établissait lui autour de 25 %.
Le mariage a ainsi perdu de son caractère sacré, pour le meilleur et non pour le pire comme on l’entend souvent dire. La banalisation du divorce permet ainsi à de nombreuses personnes de ne plus se retrouver piégées dans des relations peu épanouissantes, toxiques voire dangereuses. Une réalité à ne pas oublier.