À l’occasion de la Journée internationale des personnes âgées ce jour, démontons quelques clichés et idées reçues sur leur vie sexuelle. Dans l’imaginaire collectif, un.e sénior est abstinent.e ou asexué.e, et préfèrera les câlins aux bonnes parties de jambes en l’air. Libido, ménopause, viagra, positions sexuelles, sextoys, plans à trois… Contrairement à ce que l’on croit, nos aîné.e.s profitent bien de la vie, et pas seulement en tricotant des pulls de Noël.
1 – Les séniors n’ont pas de vie sexuelle
Faux ! Les séniors ne sont pas forcément abstinent.e.s ou asexué.e.s. Selon une récente enquête internationale menée par We-Vibe, nous serions près de la moitié (48 %) à penser que le désir sexuel diminue avec l’âge. Et en France, près de 40 % des répondant.e.s à l’enquête sont du même avis. Pourtant, en 2015, les Archives of Sexual Behavior révélaient qu’en Angleterre 54 % des hommes et 31 % des femmes de plus de 70 ans étaient encore sexuellement actif.ve.s.
La recette d’une vie sexuelle épanouie à tout âge est assez simple : un.e partenaire (ou zéro, ou plusieurs !) avec un désir mutuel, de l’intérêt pour la chose, et une bonne hygiène de vie. Car ce sont surtout les personnes en mauvaise santé qui jouissent moins des plaisirs sexuels, puisque l’effort s’avère bien souvent trop important.
2 – Le sexe, c’était mieux avant
Faux, là encore ! Une enquête réalisée par l’université de Duke, dévoile d’ailleurs que 20 % des plus de 65 ans ont une sexualité plus épanouissante que jamais auparavant. Selon l’enquête de We-Vibe, la sexualité des séniors n’évolue peut-être pas en quantité, mais elle gagne en qualité.
Il n’est plus question de chercher la performance, mais plutôt le plaisir mutuel. Dr Gilbert Bou Jaoudé, Médecin Sexologue, explique en ce sens :
« Avec l’âge, on devient plus focalisé sur les sensations et les émotions qu’on est en train de vivre. On profite mieux de ce moment et on est moins concentré sur la performance sexuelle. Le sexe n’est alors plus un moment sportif, mais un moment émotionnel. Les sensations et les émotions sont parfois même meilleures. »
3 – Une femme ménopausée a de moins en moins de désir
Vrai et faux. La ménopause traduit la fin des cycles menstruels, de l’ovulation et de la fertilité. Mais pas nécessairement la fin du désir sexuel. S’il peut en effet changer pour des questions de routine de couple ou autre, le désir sexuel persiste toute la vie. En réalité, une femme sur deux n’aura aucune conséquence sur la sexualité de sa ménopause.
« On ne voit que la bouteille à moitié vide, on ne cite que les bouffées de chaleur, la sécheresse vaginale voire l’atrophie vaginale, les douleurs au moment des rapports et la diminution du désir. Et il faut donc citer le fait qu’une femme sur deux va traverser tout ça en ayant un désir qui ne bouge pas ! », explique le Dr. Patrick Papazian.
4 – Les personnes âgées n’attrapent pas d’infections sexuellement transmissibles
Faux ! La sexualité des ainé.e.s paraît si anecdotique que le personnel médical ne fait pas l’objet de prévention sur les infections sexuellement transmissibles chez les personnes âgées. Et ceci n’est pas sans conséquences : ces personnes ne se considèrent pas comme « à risque » et ne se protègent donc pas lors de leurs rapports sexuels. Or en 2019, on a observé chez les hommes de plus de 50 ans une part non négligeable de nouvelles contaminations au VIH.
Aussi, les préservatifs sont aussi souvent ignorés car associés à la prévention de la grossesse. Ce manque de sensibilisation générale sur le sujet est risqué. « De même que chez la femme, le frottis doit rester d’actualité. La femme peut attraper une infection à gonocoque ou chlamydia à un âge avancé, la syphilis… », explique le Dr. Patrick Papazian.
5 – En Ehpad, les personnes âgées n’ont pas de vie sexuelle
Vrai… et faux. Dans les EHPAD, si rien n’interdit les pratiques sexuelles dans l’espace intime des résident.e.s, l’intimité serait plus difficile à obtenir, c’est un fait. Les allées et venues régulières du personnel soignant et les chambres partagées limiteraient les possibilités d’intimité des personnes institutionnalisées.
« D’une part, chez les personnes qui sont en couple et où l’un des deux seulement est placé, il est assez rare qu’on organise des choses pour que la vie intime soit préservée quelle qu’elle soit. Là aussi, on va avoir des tas de représentations et de croyances. Par exemple, on va estimer que parce qu’une personne a une maladie d’Alzheimer, elle n’a plus de sexualité. Lorsque j’ai travaillé en gériatrie, j’ai eu des témoignages très touchants qui expliquaient au contraire que la sexualité était un moment où la mémoire était complètement différente et où la personne retrouvait un peu de son éclat. », regrette le Dr. Patrick Papazian.
Pour l’anthropologue et professeure au département de sexologie de l’Université du Québec Isabelle Wallach, « Même la masturbation peut devenir difficile. Les professionnel.le.s ont une vision erronée et âgiste de la sexualité ». Et pourtant, un sondage Ifop réalisé en 2017, dévoilait que 43 % des femmes de plus de 60 ans ont recours à un sextoy. L’anthropologue remarque tout de même que les choses sont en train d’évoluer, et que depuis quelques années, il y a un réel intérêt pour le sujet de la part du personnel médical.
6 – En avançant en âge, on n’est plus assez désirable pour faire l’amour
Faux ! Dans notre société où l’on nous rabâche que la jeunesse est synonyme de beauté, beaucoup de séniors s’interdisent de désirer une vie sexuelle. Isabelle Wallach a réalisé une étude auprès de 25 Québécoises âgées de 65 ans et plus. Ses résultats ont montré que les femmes avaient quelquefois honte de leur corps, ce qui pouvait représenter un frein pour s’engager dans une nouvelle relation.
« Il y a l’enjeu de la minceur, les signes physiques du vieillissement… cela peut créer une réelle anxiété. Certaines vont la dépasser en trouvant des solutions comme éclairer à la bougie, se mettre sous les draps, avoir un peignoir à proximité. D’autres vont jusqu’à renoncer à la sexualité à cause de leur corps. »
Quant aux hommes, ils auraient également des appréhensions sur leur aspect physique, mais aussi des craintes vis-à-vis de leurs difficultés érectiles, et redouteraient de décevoir une femme au lit.
Finalement, si une personne âgée prend soin d’elle et s’aime comme elle est, sa vie sexuelle sera aussi épanouie que celle des jeunes, voire plus ! N’en déplaise a certain.e.s, oui on peut avoir une sexualité épanouie à tout âge.