Ils sont encore nombreux à le croire. Une fois en couple la question du consentement ne se poserait plus. Le fameux « devoir conjugal » est ainsi encore bien ancré dans les mœurs et génère autant d’incompréhensions que de souffrances. De la non-prise en compte du consentement dans le couple découle ainsi un lourd tabou : le viol conjugal.
Si tu me donnes ton cœur, tu me donnes ton corps !
Il a fallu de multiples affaires très médiatisées telles qu’un débat sur le viol conjugal sur le plateau de Cyril Hanouna pour que l’on comprenne, s’il le fallait encore, que la notion de consentement dans le couple ne va pas de soi pour tout le monde.
Pour de nombreuses personnes en effet, accepter d’être en couple avec un individu signifie encore qu’on offre son cœur, mais aussi son corps à son partenaire. Il s’agirait presque d’accorder un « bon à disposer de notre corps comme bon nous semble » valable tout le temps que durera la relation, parce que c’est encore ça, partager son intimité pour certains. Si ton cœur m’appartient alors ton corps aussi…
Pour certains ainsi, la question du consentement dans le couple ne se pose pas. Si tu es ma petite amie ou mon chéri, je peux te toucher, te caresser, te pénétrer alors que tu dors, alors que tu es ivre, alors que tu ne le veux pas…
Céder à son partenaire : le poids écrasant du devoir conjugal
Cette idée que l’on peut disposer du corps de son partenaire ne sort d’ailleurs pas de nulle part. Elle est encore largement appuyée par la notion de « devoir conjugal ». La femme (dans l’imaginaire collectif) est censée satisfaire les besoins de son mari. C’est ainsi, cela fait partie du « contrat ». Celui des deux partenaires qui ressent le moins de désir devrait donc se forcer, se sacrifier. Et c’est exactement ce qui semble se passer.
Étudiant le sujet, le sociologue Jean-Claude Kaufmann rapporte ainsi qu’au cours de ses entretiens, la même phrase revient régulièrement dans la bouche des femmes interrogées :
« Je n’ai pas trop envie mais je le fais pour lui faire plaisir. »
La notion de consentement dans le couple semble donc largement balayée ici par la notion de devoir conjugal. Pour que le couple tienne, pour que le foyer reste stable, il faut céder, même si on n’a pas envie, faire fi de son propre manque d’envie, se sacrifier au moins de temps en temps, se donner pour « faire plaisir » avec toutes les souffrances que l’on imagine à la clé.
Subir : le tabou du viol conjugal
Mais il arrive aussi parfois que l’un des partenaires ne se « donne » pas et que l’autre prenne quand même. Pour certains cela ne peut pas être considéré comme un viol, parce que le consentement dans le couple, nous l’avons vu, n’existe pas pour eux.
Le viol conjugal est pourtant bien réel, mais il est tout autant difficile de le faire admettre par la justice que par la victime elle-même. Difficile de poser le mot viol quand le violeur est aussi le mari. Difficile aussi d’être catégorique et de comprendre et dire non, je n’étais pas consentant.e. Comment alors le faire reconnaître ou condamner ?
Le tabou du viol conjugal commence doucement à s’effriter. Mais du chemin et beaucoup de prévention restent encore à faire pour que chacun comprenne que le consentement dans le couple n’est pas une question qui se pose une seule fois, à l’entrée dans la relation. C’est une demande que l’on doit renouveler chaque fois et qui n’est accordée que pour une fois.