Swiper de gauche à droite pour trouver l’âme sœur ou se dénicher un coup d’un soir provoque désormais des haut-le-cœur et des sueurs froides. Cet amour « marchandisé » qui se trame à même les pixels refroidit plus qu’il n’enflamme. Entre les dates non concluants, les conversations intenses laissées soudainement en suspens et les tentatives d’approche ratées… les sentiments ne prennent plus sur les bancs publics 2.0. À cet exercice de séduction, les cœurs finissent courbaturés et la passion devient poussive. Frappés par une lassitude métastatique, les célibataires claquent la porte aux applis de rencontre et laissent leur profil virtuel prendre la poussière. Si vous vous reconnaissez dans ce portrait, vous êtes peut-être en proie au dating burnout, un mal moderne qui s’attrape derrière les écrans.
Qu’est-ce que le dating burnout ?
L’ère où la cour se faisait en contrebas du balcon ou sur le parquet des bals populaires est bien lointaine. Désormais, le flirt s’organise par téléphone interposé. Les célibataires sélectionnent leur « bien aimé » comme iels choisissent leurs fruits et légumes au marché. Iels se ruent sur les applis de rencontre, nouveau carrefour relationnel, pour mettre leur drague à exécution et faire du charme à revers de pouces. Il faut dire que ces outils, conçus pour aller à la pêche aux cœurs, sont assez prometteurs. Du moins, en apparence.
Il suffit simplement de balayer l’écran pour faire connaissance et entamer un tête-à-tête dans des bulles de texte. Au début, le jeu est plutôt émoustillant. Ces conquêtes suscitent une excitation juvénile et des comportements dignes de la pré-adolescence. Il n’en faut pas plus pour se tirer des plans sur la comète et s’imaginer un « happy end » à la Disney. Cependant, trouver le grand amour dans cette fourmilière où grouillent affamés sexuels, manipulateurs chevronnés et dégonflés du cœur relève de l’utopie.
Ces plateformes, qui mettent les sentiments en « libre-service », sont aussi le royaume des désillusions. Malgré une description taillée sur-mesure avec un esprit cérébral, des efforts de langage d’une rigueur scolaire et des prises d’initiatives pour enclencher la deuxième, les dates n’aboutissent presque jamais. Autant d’investissement personnel pour récolter un « vu » rédhibitoire ou un tonitruant « c’était sympa, mais je n’ai pas le feeling ».
Ces échanges virtuels cornent les espoirs de l’idylle parfaite, sapent le moral et anesthésient les projets de couple. Loin d’être un simple spleen affectif, cette fatigue traduit un dating burnout. Dans le sillage du mal-être qui s’applique à la sphère professionnelle, le dating burnout s’amorce par un épuisement et un stress palpable. À l’ouverture de l’appli, le palpitant se décroche, les mains suintent et la boule grossit dans le ventre… Ces signes n’indiquent pas la maladie d’amour, mais un dating burnout bien installé.
Quels sont les symptômes du dating burnout ?
Ghosting en chaîne, rendez-vous physiques chaotiques, dialogues vides, Casanova gauche… à chaque tentative de construction, la romance s’effondre en mille morceaux entre les pixels. Vous avez beau sortir l’artillerie lourde et les discours mielleux pour capter l’attention, vous n’avez jamais un retour à la hauteur de vos attentes. Pourtant, vous travaillez le terrain avec le plus grand soin, vous déballez votre plus belle prose et vous vous montrez aussi convaincant.e qu’à un entretien d’embauche, mais rien n’y fait. Vous repartez toujours bredouille. C’est ainsi que le dating burnout s’insinue.
Vous éprouvez d’abord une profonde déception. Vous vous dites que le problème vient peut-être de vous. Après avoir poncé les applis de fond en comble à la recherche de l’élu.e, vous perdez foi en l’amour. Mais vous vous obstinez. Malgré un dating burnout régnant, vous vous usez à la tâche du cœur. Cette fièvre du date vous transcende et vous détruit à petit feu. Le média Psychology today a d’ailleurs brossé le diagnostic de dating burnout avec précision.
Vous revoyez vos standards à la baisse
Le dating burnout est insidieux et s’installe en silence. Cependant, il sème quelques indices sur son passage. Si auparavant, vous aviez tendance à ausculter les profils à la loupe et à scruter la moindre petite faute d’orthographe, désormais vous prenez tout ce qui vous tombe sous la main.
Vous avez renoncé à toutes vos exigences. La personne peut être en totale contradiction avec vos préférences, elle « fait l’affaire ». Elle a beau être d’un ennui mortel, elle s’intéresse à vous et ça c’est devenu votre critère « number one ».
Vous n’avez plus goût aux rencontres virtuelles
Si vous souffrez de dating burnout, vous partez déjà défaitiste. Vous finissez par vous persuader que votre alter ego est un vulgaire fantôme. Alors vous errez sur les applis de rencontres, sans trop de convictions.
Vous vous laissez aller à un match, mais vous savez que c’est perdu d’avance. En fait, vous avez tellement eu le coeur « martyrisé » sur ces plateformes où le sérieux est une denrée rare que vous préférez mettre une « distance ».
Vous avez un rapport malsain aux applis de rencontre
Il suffit d’ouvrir vos paramètres et de regarder le temps dépensé sur les applis de rencontre pour vous rendre à l’évidence. Si vous êtes scotché.e à vos écrans et que vous boudez le monde réel, gare au dating burnout.
Ce qui n’était qu’un simple loisir s’est transformé en sprint. Vous êtes dans une sorte de frénésie du dating. C’est addictif, vous ne pouvez plus vous arrêter de faire défiler les profils.
Vous ne vous investissez plus dans vos rencards
Cependant, même si vous avez les applis de rencontre ancrées dans la paume, vous êtes assez « détaché.e ». Votre agenda est rempli de tête-à-tête en chair et en os, mais vous y allez souvent à reculons.
Vous vous dites qu’en multipliant les rencontres, vous finirez peut-être par tirer le gros lot. Cependant, vous ne cherchez pas à creuser les informations sur la personne en face, vous entretenez les blancs et vous laissez l’autre prendre les devants.
Comment s’extirper du dating burnout ?
Le dating burnout est éreintant, mais il n’est pas insoluble. Comme le burnout au travail, il est essentiel de faire une coupure. Facile à dire, mais difficile à faire lorsque la source du problème se niche à même le téléphone, objet qui ne quitte pas votre poche.
Pour éviter la tentation, vous pouvez envisager de supprimer momentanément vos applis de votre écran d’accueil, histoire que vos pouces ne divaguent pas. Mieux, vous pouvez carrément faire une digital detox et rompre quelque temps avec votre portable.
« Prendre du recul vous donne le temps de vous concentrer sur qui vous êtes, sur ce que vous voulez et sur la façon dont vous aimeriez vous montrer lors de votre prochain rendez-vous », détaille Logan Ury, directeur en science des relations chez Hinge au média Cosmopolitan UK
Le spécialiste préconise aussi de se recentrer sur soi et de s’octroyer des moments de self-care. Pourquoi ne pas vous essayer au « solo dating« , cette pratique qui consiste à faire un rencard avec… soi-même autour d’une nappe blanche ou dans une salle de cinéma. L’occasion de faire le point sur vos intentions et vos objectifs relationnels.
Demandez-vous pourquoi vous avez installé ces applis. Est-ce par curiosité ? Par solution de facilité ? Ou pour dénicher un amour éternel ? En repartant de zéro et en aplanissant vos « objectifs » vous parviendrez à vous extraire de ce dating burnout qui vous plombe jusqu’au coeur.
Ce dating burnout présage-t-il la chute des applis de rencontres et le recommencement des approches sans la barrière de l’écran ? En tout cas, elles sont en déclin chez les jeunes. Parfois, c’est en restant trop la tête dans le téléphone que nous loupons les plus belles histoires de notre vie…