Si certains hommes comme Camille Lacourt et le Prince William sont restés au chevet de leur femme malade, d’autres, plus lâches, prennent la fuite. Incapables de revêtir l’étoffe de l’infirmier et de prodiguer le réconfort espéré, ils semblent aimer leur compagne uniquement dans la gaieté. Même s’ils ont fait la promesse de leur être fidèle « dans la joie et la douleur », ils n’hésitent pas à rompre ce pacte dès que la santé se gâte. De nombreux hommes, pourtant conditionnés à être « protecteurs », abandonnent leur partenaire à la prononciation du mot « cancer ». Au lieu d’ouvrir grand leurs bras, ils désertent le foyer au pire moment. La séparation est leur réponse au cancer du sein. Mais pourquoi ces hommes, d’ordinaire fiers de jouer les chevaliers blancs, baissent si souvent les armes face à la maladie de leur moitié ?
Les femmes quittées à cause du cancer, une tragédie silencieuse
Camille Lacourt, ex-champion de natation, en a connu des défis. Or, le plus gros challenge de sa vie n’a pas été de nager le 100m en un temps record, mais de s’occuper de sa femme lorsqu’elle était au plus bas et de lui être utile dans ce quotidien chamboulé par le cancer du sein. Pourtant, Alice Detollenaere, frappée par la maladie à tout juste 32 ans, lui a laissé le choix : rester ou partir. De l’annonce au traitement jusqu’à la rémission, le nageur ne lui a jamais lâché la main.
Devant la maladie, il n’a pas décampé ni regardé sa femme souffrir, passivement. Il l’a aidée activement. « Nous les hommes, on est capables d’accompagner les femmes pendant la maladie, mais on doit être aussi des acteurs avant ! », évoquait-il sur le plateau de C à Vous. Si la maladie solidifie les couples, elle peut aussi les déchirer, surtout lorsque le diagnostic se conjugue au féminin. Selon une étude publiée dans la revue Cancer, les femmes assiégées par la maladie ont six fois plus de chance de subir une séparation.
Après l’annonce d’un cancer, le taux de séparation des patient.e.s en couple est de 20,8 % lorsque c’est la femme qui endosse la maladie. Le chiffre chute à 2,9 % dans le scénario inverse. Les hommes, pourtant forgés pour être des « remparts », se font alors tout petits quand la maladie accapare leurs femmes. Ils déclarent forfait avant même que la vraie bataille ait commencé. Si ce phénomène n’est pas une généralité, il est malheureusement bien réel. Quand les hommes abandonnent leurs femmes alors qu’elles tentent de braver le cancer du sein, c’est un ultime coup de massue. Cette séparation anesthésie un peu plus ce goût de vivre.
Les hommes, peu habitués à se « dévouer » et à « prendre soin »
Depuis toujours, la société hisse la femme dans la blouse de l’infirmière. Dès le plus jeune âge, les fillettes apprennent à chouchouter les autres et à être à leurs services. Fibre maternelle oblige… De leur côté, les garçons jouent à la bagarre et se complaisent dans des activités casse-cou. Plus tard, la femme va donc tout naturellement se plier en quatre pour faire le bien autour d’elle. Le syndrome du sauveur rapplique presque toujours. L’homme, quant à lui, aura plus tendance à se faire assister qu’à porter secours.
Plus habitué à recevoir qu’à donner, l’homme n’est pas vraiment familier avec le soin et l’empathie. Ce manque de préparation, couplé à la peur de l’inconnu, pousse certains à s’éloigner, incapables de répondre aux besoins de leur partenaire malade. Aussi paradoxal que cela puisse paraître l’homme a beau être de nature résistante, il n’est pas toujours armé pour ce bras de fer contre le cancer du sein. Pour certains hommes, accepter ce rôle d’auxiliaire peut être perçu comme une menace à leur virilité, une remise en cause de leur identité masculine. La faute, en partie, aux normes sexistes qui régissent ce monde.
Si les hommes abandonnent leurs compagnes à la découverte du cancer du sein, c’est surtout parce qu’ils ne se sentent pas aptes à s’occuper d’elles et à assumer cette part de responsabilité. Mais ça ne justifie pas pour autant leur départ et ce n’est en aucun cas une circonstance atténuante. Se mettre en couple, ce n’est pas seulement vivre le meilleur, c’est aussi traverser des tempêtes ensemble et surmonter les obstacles à deux.
Un sentiment d’impuissance qui pousse le couple à sa perte
Certes, les hommes ne maîtrisent pas vraiment l’art de « dorloter », mais ce n’est pas l’unique raison qui les pousse à claquer la porte définitivement. Si les hommes abandonnent leurs partenaires en proie au cancer du sein, c’est aussi parce qu’ils se sentent comme des incapables, des feuilles transparentes. Voir un être cher affaibli pour ne pas dire mourant ne les laisse pas insensibles.
Mais ils ne savent pas comment devenir un personnage de premier plan. Rester spectateurs de ce sombre tableau les torture et s’investir pleinement dans cette bataille les effraie. Ils préfèrent alors parfois mettre fin à leur relation plutôt que de tendre simplement leur main. L’homme, souvent conditionné à être celui qui « protège » et qui agit héroïquement, peut se retrouver paralysé, ne sachant pas comment agir ou réagir face à cette situation qui échappe à son contrôle.
Comment les hommes peuvent-ils agir face au cancer du sein ?
Si certains hommes abandonnent délibérément leurs partenaires à l’annonce du cancer du sein, il y a aussi des « happy end » et des histoires heureuses. La maladie n’a pas toujours raison du couple. Ces hommes, qui n’ont pas la prétention d’être courageux, mais juste amoureux, servent de béquille dans cette épreuve. Ils affrontent ce cancer comme si leur vie en dépendait et se consacrent entièrement à leur moitié.
À l’image du prince William, ils deviennent les gardiens du foyer et gèrent toutes les tâches qui vont avec. Ils prennent en charge la partie administrative et se font le secrétaire attitré de madame. En plus de l’intendance, ils accompagnent leur femme sur les bancs de l’hôpital et s’assurent constamment de leur bien-être. Bref, cet homme qui fait figure d’exemple libère sa femme malade de toutes les préoccupations quotidiennes. Il chasse les éléments parasites de sa vie. Il y en a assez d’un au creux du sein. Même si l’avenir semble trouble pour la femme, cette simple présence et cette attention constante procurent une rage de vaincre.
Les chiffres sont formels. Les hommes abandonnent plus souvent leurs femmes à l’évocation du cancer du sein. À croire que ce terme est un puissant répulsif. Or, de nombreux couples affrontent aussi la maladie à l’unisson.