Contraception gratuite : pourquoi cette mesure est jugée « insuffisante » ?

C’est la « bonne » nouvelle qui est tombée il y a quelques jours. À compter du 1er janvier 2022, la contraception sera gratuite et entièrement remboursée par l’Assurance maladie, pour les filles et les femmes, jusqu’à l’âge de 25 ans. Il s’agit certes d’une avancée, mais elle dévoile quelques problématiques non traitées par le ministère de la Santé. Décryptage

La contraception gratuite, une réponse aux freins financiers

Le 9 septembre dernier, le Ministre des Solidarités et de la Santé Olivier Véran annonçait au micro de l’émission « Les Quatre Vérités » sur France 2, une toute nouvelle mesure contribuant à faire avancer l’égalité entre les femmes et les hommes. À compter du 1er janvier 2022, la contraception va devenir gratuite pour les filles et les femmes, jusqu’à l’âge de 25 ans.

Jusque-là, le remboursement des moyens de contraceptions n’était accordé qu’aux mineures, à partir de 15 ans. Dans l’idée, c’est une grande avancée pour les Françaises donc.

« Il y aura une prise en charge de la contraception hormonale, du bilan biologique qui peut aller avec, de la consultation de prescription et de tous les soins qui sont liés à cette contraception jusqu’à 25 ans », a précisé Olivier Véran.

Cela comprend les pilules contraceptives de première et deuxième générations, l’implant contraceptif, le DIU (stérilet) hormonal ou en cuivre, ainsi que le diaphragme. Les pilules de troisième et quatrième générations, le préservatif féminin, l’anneau vaginal, le patch, les spermicides et la contraception définitive (ligature des trompes) restent eux non remboursés par l’Assurance maladie.

Âge limite de 25 ans : pourquoi c’est un problème ?

Olivier Véran a précisé que 25 ans est « un âge qui correspond, en termes de vie économique, sociale et de revenu » à « davantage d’autonomie (…) C’est aussi l’âge où l’on va quitter définitivement la complémentaire de santé de son foyer. » Mais pour certain.e.s, il y a dans cette limite à l’âge de 25 ans une injonction non verbalisée à faire des enfants une fois passé le cap de cet âge fatidique.

Pour Caroline Rebhi, co-présidente de l’association féministe du Planning familial : « Aller jusqu’à 30 ans n’aurait pas été de trop, car à 25 ans, on n’a pas forcément une stabilité financière, professionnelle, on peut être encore en train de faire des études. »

D’autant que les prix des moyens de contraception sont variables. Une plaquette de pilule de première et deuxième générations coûte aux alentours de 1,50 euro par mois, et celle de troisième ou quatrième génération peut dépasser la trentaine d’euros par mois. L’implant contraceptif et le stérilet hormonal eux coûtent une centaine d’euros, l’anneau vaginal environ 15 euros par mois et le diaphragme, à utiliser à chaque rapport sexuel, environ 60 euros. Oliver Véran a affirmé que l’élargissement de la gratuité représente « un effort de 21 millions d’euros » par an à compter du 1er janvier.

Un manque d’information sur la contraception

Cette nouvelle mesure a aussi permis de mettre en lumière une autre difficulté d’accès à la contraception : le manque d’informations sur le sujet. Lorsqu’on pense « contraception » le mot « pilule » arrive par exemple généralement en premier, or il existe divers contraceptifs.

« Aujourd’hui, une mineure a accès à la contraception, mais elle n’y va pas forcément, par manque d’information, parce qu’elle ne sait pas que le médecin ne préviendra pas ses parents. De l’autre côté, le médecin n’est pas forcément formé, n’a pas un logiciel à jour, ou ne sait simplement pas faire et réoriente vers le Planning familial qui est parfois très éloigné », explique Christine Mauget du Planning Familial Charente.

Ainsi, si l’annonce a été largement saluée il faudrait aussi, selon certain.e.s, penser à proposer une meilleure éducation à la sexualité à l’école, d’avantage de gynécologues (dont le nombre a diminué de 42 % entre 2007 et 2017 !) et… davantage de contraceptifs masculins.

La contraception, toujours « un problème de femmes »

En effet, les hommes sont fertiles 365 jours sur l’année, contre 48 jours pour les femmes. Mais la contraception demeure un « problème de femmes ». C’est une question d’habitudes et de normes ancrées dans notre société. Or, en rendant également gratuite la contraception masculine, la « charge contraceptive » des femmes diminuerait grandement.

« Aujourd’hui, nous constatons l’arrivée d’une nouvelle génération de garçons qui se posent la question de savoir comment contrôler leur fécondité. Ils souhaitent assumer la même part de responsabilité que les femmes. Là encore le problème de l’information est essentiel », explique Christine Mauget.

À l’heure actuelle, quelques contraceptifs masculins existent sur le marché français : le préservatif, la vasectomie ou encore le slip chauffant (il permet d’échauffer les testicules en les relevant afin de réduire la production de spermatozoïdes). Un discours public de l’État sur ces dispositifs serait alors un moyen de partager la responsabilité de la contraception entre les femmes et les hommes.

« Il faudrait à nouveau des campagnes nationales et qui intégreraient aussi pleinement les hommes dans la contraception. Les campagnes nationales ont souvent plus d’impact que la diffusion au niveau local », ajoute Christine Mauget. Les scientifiques parlent également de créer une pilule contraceptive destinée aux hommes. Celle-ci n’existe pas encore sur le marché, et n’est visiblement pas encore près de voir le jour…

Et vous, que pensez-vous de cette mesure ? Vous convient-elle ? Dans votre couple partagez-vous la « charge contraceptive » ? Venez en discuter sur le forum de The Body Optimist !

 

Parce qu’il n’existe pas qu’un seul moyen de contraception, pour s’informer sur les différentes méthodes contraceptives utilisables vous pouvez joindre la permanence du Planning Familial gratuitement et en toute confidentialité : 0 800 08 11 11. Ou vous rendre sur la plateforme « Choisir sa contraception », à l’initiative de Santé publique France.

Cindy Viallon
Cindy Viallon
Journaliste free-lance, mes sujets de prédilection sont les féminismes intersectionnels, la société et la culture. J’aime déconstruire l’actualité et briser les tabous une fois pour tous·tes !
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