Si vous avez constamment le nez dans les compétitions olympiques, vous avez certainement dû remarquer que la plupart des épreuves mettent les femmes d’un côté et les hommes de l’autre. Sportifs et sportives ne sont presque jamais en concurrence, hormis lors des relais mixtes. La seule discipline où les athlètes concourent ensemble sans distinction de genre se pratique avec une bombe sur la tête et des rênes entre les mains. L’équitation est l’unique sport où hommes et femmes sont sur un même pied (ou plutôt étrier) d’égalité. Découvrez pourquoi cette discipline inscrite aux JO est la seule réellement mixte et à avoir un galop d’avance sur les 32 jeux à l’affiche.
Le sport équestre aux JO, une épreuve mixte « à part »
« Les Jeux olympiques de Paris 2024 seront les premiers Jeux strictement paritaires de l’histoire« . C’est ce que vantait le Comité National Olympique dans un communiqué, à l’aube de cette grand-messe du sport. Avec 49,14 % de femmes qualifiées parmi les athlètes, le défi semble plutôt bien relevé. Cependant, il suffit de creuser un peu en profondeur et de gratter ce vernis rutilant pour entrevoir certaines failles.
Si les sportives sont plus nombreuses à défendre les couleurs de leur pays cette année, elles n’ont pas encore la « chance » de se frotter à leurs homologues masculins et de défier les lois de la « corpulence ». Assister à un duel entre Teddy Riner et Romane Dicko en judo ou à un combat de boxe entre Tony Yoka et Estelle Mossely reste encore un beau fantasme. Selon la pensée collective, les hommes ont un avantage « physique » sur les femmes : c’est une réalité anatomique.
Cependant il y a bien une discipline des JO mixte qui fait une entorse à cette croyance. Il s’agit de l’équitation. Dans ce sport qui se décline en trois épreuves, le saut d’obstacles, le dressage et le concours complet, c’est le cheval qui fait la plus grosse partie du travail. C’est lui qui accomplit la prouesse sportive. Les cavalier.ère.s, elleux, supervisent les mouvements de leur monture à coup de talon ou à revers de rênes. Mais le cheval est l’acteur principal de leur réussite.
Les femmes en nombre supérieur dans le monde de l’équitation
Contrairement à des épreuves de « contact » comme la lutte gréco-romaine, l’équitation se joue à distance, depuis la selle. Ce n’est pas une démonstration de « force », mais plus un exercice d’adresse et une histoire de connexion avec l’animal. C’est en partie pour cette raison que le hippisme est la seule discipline des JO totalement mixte. Une égalité parfaite qui était pourtant loin d’être gagnée. À sa genèse, l’équitation était le propre des militaires. Jusqu’en 1948, les hommes d’arme avaient le monopole de la discipline.
Les femmes, elles, n’étaient pas forcément les bienvenues sur le dos des chevaux. Cette position à califourchon éveillait visiblement l’esprit mal placé de ces messieurs et jurait avec leur soi-disante « grâce innée ». En plus, à cette époque, elle n’avait pas le droit d’arborer le pantalon. Difficile alors d’enfourcher la bête avec une jupe longue qui handicape les mouvements. C’est seulement lorsque l’équitation se mue en « loisir bourgeois » que les femmes peuvent abaisser ces innombrables obstacles et s’adonner à cette activité. Il faudra attendre les Jeux de 1964 pour que hommes et femmes confondus se tiennent tête dans les manèges. En plus d’être la seule discipline mixte des JO, l’équitation est le sport qui compte le plus de femmes licenciées. Un beau coup de cravache dans les clichés !
La natation artistique ouverte aux hommes, mais peu paritaire
Au-delà de l’équitation, une autre discipline des JO prône le mélange des genres et se revendique mixte depuis 2022. Il s’agit de la natation artistique, un sport chorégraphié auquel les hommes peuvent désormais participer. Cependant, malgré cette nouvelle « liberté », rares sont les Poseidons qui s’adonnent à cette danse aquatique et qui « osent » se hisser aux côtés des ballerines des eaux chlorées. Lors de ces JO 2024, aucun nageur n’a été retenu pour intégrer une équipe.
Pourtant, un candidat se rêvait déjà au cœur de ces pyramides construites en apnée. Son profil est pour le moins atypique. Bill Ray, 45 ans, était sorti de sa retraite pour embrasser les eaux, devenant ainsi la nouvelle mascotte de l’équipe américaine de natation artistique. Malgré des journées entières à écumer les bassins et à multiplier les figures, l’américain n’a pas réussi à se qualifier. Cet acrobate à contre-courant des normes n’était pas encore totalement « au point ». Il faut dire que les hommes sont un peu à la traîne par rapport à leurs consoeurs, qui cumulent beaucoup plus d’heures d’entraînement.
« Le niveau n’arrive pas comme ça. Et on avait bien vu que Bill May ou le nageur chinois Haoyu Shi avaient été testés aux Mondiaux uniquement sur l’acrobatique. Ils sont plus puissants, mais il faut que ça suive au niveau technique », expliquait Virginie Dedieu, triple championne du monde de natation artistique à FranceInfo
Plus d’épreuves mixtes pour ces JO 2024 ? Seulement sur le papier
Si le Comité Internationale Olympique revendique « l’égalité des chances » et en fait presque son hymne, il y a encore de grands pas à faire pour que femmes et hommes soient au même niveau. La parité est un terrain glissant. Et les stéréotypes collent toujours aux baskets des athlètes. Ainsi, les sportives féminines ne sont que un tiers à s’être qualifiées pour participer à la lutte gréco-romaine. À l’inverse, les hommes sont aux abonnés absents pour la gymnastique rythmique. Étrangement, le sport qui concentre le moins de femmes implique du combat et de la brutalité tandis que celui qui est le plus déserté par les hommes est synonyme de douceur et de beauté visuelle.
Coïncidence ? Pas vraiment. Ce n’est que le sombre reflet d’une société très genrée où les femmes sont dépeintes comme soigneuses et les hommes impulsifs. L’équitation, quant à elle, a beau être la seule discipline des JO véritablement mixte, elle laisse les femmes à l’écurie, en marge de la scène centrale. Pour ces JO 2024, la discipline affiche ainsi plus de 60 % d’hommes. Seules deux femmes représentent la France sur un total de douze cavalier.ère.s. Preuve qu’il y a toujours des « ratés ».
L’équitation, seule discipline des JO entièrement mixte, en inspire d’autres. Le public a ainsi pu assister au premier « relais mixte marche marathon ». Cette épreuve olympique, inédite, remplace 50 kilomètres marche masculin. La course à l’égalité est éprouvante, mais peut-être pas impossible…