La rentrée approche et la grande question qui se pose est celle de la tenue professionnelle à arborer, surtout sous cette chaleur. Combi-short avec des Birkenstock, jean et tee-shirt avec des baskets, ou retour du tailleur ou costume ? Le choix est d’autant plus difficile quand on a passé plusieurs années dans un jogging super confortable, à travailler depuis notre canapé (coucou la pandémie).
Toutefois, les bonnes vieilles habitudes du travail au bureau reprennent peu à peu. Peut-on s’habiller comme on veut pour aller travailler ? Doit-on forcément enfiler sa tenue de working girl ou boy ? Entre injonctions sexistes et confort, les femmes sont-elles libres ? Décryptage des uses et coutumes vestimentaires au travail.
Jogging en bas et chemise en haut : la mode sous covid
Chemise repassée en haut et jogging en bas, c’était cela le code vestimentaire de millions de Français.es durant la pandémie. Pourquoi souffrir dans un costume ou un tailleur trop moulant alors qu’on peut travailler en pyjama confortable, ni vu.e, ni connu.e ?
La flemme vestimentaire s’est répandue comme une traînée de poudre dans nos placards. Exit les tenues trop formelles, les uniformes standardisés et les jeans trop étroits. En 2021, une étude de IWG a démontré l’importance de la tenue vestimentaire pour les travailleur.se.s. 59 % d’entre iels déclaraient que « l’époque des tenues formelles était révolue ». Iels sont même 55 % à affirmer « mieux travailler lorsqu’iels s’habillaient comme iels le souhaitaient ».
« Les nouvelles habitudes vestimentaires professionnelles post-Covid sont à la fois plus décontractées et plus confortables : abandon des robes étriquées ou de la veste de costume jugée trop contraignante pour le corps, au profit de tenues plus souples et moins formelles, baskets aux pieds… », explique Agnès Ceccarelli, professeure associée, enseignante-chercheuse (département RH) à l’ICN Business school au média la Croix
Les femmes doivent toujours avoir l’air pro
Si enfiler des tenues confortables devient, peu à peu, la norme au bureau, du côté des femmes la tendance a du mal à se généraliser. Et les injonctions sexistes refont surface.
« Professionnaliser » son apparence, disent-iels, c’est renvoyer une image présentable de l’entreprise. Mais si pour les hommes, il s’agit seulement de se vêtir de son meilleur costard et d’une cravate assortie. Pour les femmes, c’est une tout autre affaire. Elles doivent s’apprêter, mais pas trop non plus. Il faut se maquiller, mais attention, il ne faut pas « exagérer » sur le highlighter. En bref, la tenue et l’apparence d’une femme ne doivent pas interférer avec son discours.
Résultat : au placard le jogging comfy et bonjour les injonctions sexistes. Pire encore, en 2011, des chercheur.se.s de Harvard et de Boston avait dévoilé, au travers d’une étude, que la charge esthétique au travail pèse davantage sur la femme que l’homme. Elles seraient par exemple perçues plus compétentes, fiables et professionnelles lorsqu’elles sont maquillées.
« Il faut jongler entre plusieurs injonctions contradictoires. Plein de petits calculs s’ajoutent à la charge mentale des femmes qui coûtent du temps, mais aussi de l’argent, puisque ces efforts de coiffure, maquillage et vêtements ne sont pas considérés comme des frais professionnels. Sauf dans le cas où l’entreprise impose son uniforme. J’ai reçu plein de témoignages de femmes blondes qui se sont teint les cheveux en bruns afin d’être davantage prises au sérieux, par exemple. Implicitement, pour faire plus pro », explique Lucile Quillet, autrice de l’essai féministe de coaching pro « Libre de prendre le pouvoir sur ma carrière« , au média Madmoizelle
Les femmes racisées toujours discriminées
Et cette « tendance » ne semble pas évoluer positivement, en 2022. Bien que l’employeur.se ait le droit, selon la loi, d’imposer une tenue de travail à ses salarié.e.s « en justifiant par la nature de la tâche à accomplir et proportionné au but recherché », les femmes racisées subissent au quotidien des discriminations. Par exemple, certaines entreprises refusent d’employer des femmes voilées et interdisent le port de la coupe afro ou les locks.
S’habiller n’a jamais été une mince affaire pour les femmes, qu’elles aient vécu au XVe siècle ou en 2022. L’habit a toujours soulevé des problématiques et des injonctions liées à leurs corps. Mais fort heureusement, la mode s’adapte. Aujourd’hui, la mode propose des vêtements, plus confortables, innovants et à la fois très élégants. Et les moeurs, elles, évoluent également petit à petit.