Tout au long de l’histoire, les femmes ont joué un rôle important dans le façonnement de la société, mais leurs contributions ont souvent été négligées ou attribuées aux hommes. Cela est dû au « biais androcentrique ». Une perspective culturelle et historique omniprésente qui donne la priorité aux expériences masculines. Pourtant, des civilisations anciennes aux temps modernes, il existe d’innombrables exemples de femmes qui ont apporté d’importantes contributions. Décortiquons ce fameux biais androcentrique pour en savoir plus sur l’histoire.
Qu’est-ce que le biais androcentrique ?
C’est une manière de penser, qu’elle soit consciente ou inconsciente, qui perpétue une vision du monde à travers les yeux des hommes. Le terme dérive d’ailleurs du mot grec « andro-« qui signifie « mâle ». Il désigne une forme de préjugé qui marginalise la perspective des femmes. En bref, il suppose implicitement que le point de vue masculin est neutre, objectif et universel, sans remise en question.
Il est important de remettre en question cette notion d’universalité et de reconnaître que le biais androcentrique a limité, et limite encore aujourd’hui, la diversité des voix. En prenant conscience de ce biais, nous pouvons travailler vers une vision plus inclusive de l’histoire, en donnant plus de visibilité aux femmes et en valorisant leurs contributions souvent négligées.
L’impact sur la représentation des femmes dans l’histoire
Le biais androcentrique a eu un impact significatif sur la représentation des femmes dans l’histoire. Leurs réalisations ont souvent été minimisées, marginalisées ou même effacées des récits historiques.
Il y a une sous-représentation systématique des femmes dans les domaines de la politique, de la science, de l’art, de la littérature et dans bien d’autres… Elles ont été globalement reléguées à des rôles secondaires ou considérées comme des exceptions, plutôt que comme des actrices centrales de l’histoire.
Ce qui a créé un déséquilibre dans la manière dont nous comprenons et interprétons le passé. Il y a eu un énorme impact sur la perception de la valeur et de la contribution des femmes dans la société. Comme elles ont souvent été dévalorisées, cela n’a fait qu’augmenter et perpétuer les stéréotypes et les préjugés sexistes.
L’omniprésence des hommes dans toutes les disciplines
Au fil des siècles, toutes les disciplines ont été largement dominées par les hommes. Avec des figures classiques telles que Jules César, Claude Lévi-Strauss, Léonard de Vinci ou encore Émile Zola. Leurs travaux ont souvent été influencés par un biais androcentrique. Ce qui signifie qu’ils ont été façonnés par (et pour) une perspective masculine. Leurs œuvres et travaux reflètent donc une vision du monde centrée sur les hommes.
Reprenons Léonard de Vinci par exemple : que représente-t-il dans ses recherches scientifiques ? Des hommes. Sa célèbre illustration l’Homme de Vitruve en est la preuve même. Sachant qu’il représente 2 corps d’homme superposés, en voulant représenter les proportions parfaites du corps humain. On se demande donc « Pourquoi n’a-t-il pas tout simplement mis un homme et une femme ? ». Car c’est une parfaite allégorie de l’Humanisme, qui rejoint la locution du célèbre penseur Protagoras : « L’homme est la mesure de toute chose ».
Il y a ainsi depuis toujours une vision non inclusive dans l’histoire, laissant la part féminine ignorée et dans l’ignorance. Mais alors, comment changer ce biais androcentrique ? Cela implique de mettre en lumière les réalisations des femmes, de réévaluer les récits historiques à travers une lentille plus inclusive. Sans oublier de donner une voix aux femmes dans la narration de l’histoire.
Le féminisme : un rôle important dans la levée de l’occultation de la représentation des femmes dans l’histoire
Le mouvement féministe a remis en question les biais androcentriques. Il a mis en lumière les contributions, passées et présentes des femmes, dans tous les domaines de la société.
Le féminisme a contribué à la création d’un discours et d’un espace pour les voix des femmes, permettant ainsi de rétablir leur importance dans l’histoire. Il a encouragé la recherche, la réécriture de l’histoire et la mise en valeur des réalisations des femmes qui avaient été négligées ou minimisées !
De plus, le féminisme a mis en avant la nécessité d’une représentation équilibrée des femmes dans les domaines de l’éducation, de la politique, de la culture, de la science, de l’art… Cela a conduit à des efforts pour promouvoir leur inclusion dans les programmes d’études, la reconnaissance des femmes dans les prix, ainsi que dans les postes de pouvoir.
Les membres du Mouvement de libération des femmes (MLF)
Les MLF, actif à partir de 1970, étaient principalement des femmes très éduquées. Elles étaient formées dans les domaines des sciences humaines et sociales. Mais surtout, elles étaient très conscientes de l’invisibilité historique des femmes, comme le témoigne leur hymne emblématique intitulé « Debout les femmes » : « Nous qui sommes sans passé, les femmes / Nous qui n’avons pas d’histoire / Depuis la nuit des temps, les femmes / Nous sommes le continent noir ».
Ainsi, leur première action médiatique a été de dénoncer la prédominance masculine dans les lieux de mémoire, en août 1970. Leur action ? Elles ont déposé du vomi sur la tombe du Soldat inconnu en l’honneur de « la femme du soldat inconnu ». C’est-à-dire, une femme encore plus inconnue que le soldat lui-même ! Cette action symbolique visait donc à attirer l’attention sur l’effacement des femmes de l’histoire et à remettre en question les conceptions traditionnelles de la mémoire collective, qui privilégient les figures masculines.
Leur engagement a ouvert la voie à un mouvement féministe encore plus large. Non seulement, pour rétablir la place des femmes dans l’histoire, mais aussi pour promouvoir une société plus juste et équilibrée.
4 femmes méconnues de l’histoire
La reconnaissance des contributions des femmes ne doit pas se limiter à mettre en lumière quelques personnalités célèbres. Nous devons reconnaître les innombrables femmes anonymes qui ont apporté des contributions importantes dans tous les domaines de la société.
Des militantes luttant pour la justice sociale aux scientifiques repoussant les limites du savoir… les femmes ont joué un rôle essentiel dans la formation de notre monde.
Hypatie d’Alexandrie
Philosophe, mathématicienne et astronome de l’Antiquité, elle a vécu au IVe siècle. Une époque où Alexandrie était un important centre intellectuel et culturel. Hypatie y a été une figure importante dans le développement de la philosophie néoplatonicienne.
En tant que femme érudite et intellectuelle de renom, elle a défié les normes de genre de l’époque. Elle a joué un rôle majeur dans l’éducation des hommes et des femmes, et a acquis une grande influence en tant qu’enseignante. Sauf que ses travaux ont été perdus ou attribués à d’autres et son héritage a été largement oublié.
Son assassinat a été largement considéré comme un acte d’intolérance envers une femme intellectuelle influente de son temps. Hypatie d’Alexandrie reste un symbole de la lutte pour la reconnaissance des femmes dans les domaines de la connaissance et de la pensée. Son héritage continue de rappeler l’importance de la contribution des femmes à l’histoire et à la société.
Rosalind Franklin
Rosalind Franklin était une scientifique britannique du XXe siècle, spécialisée dans la chimie et la cristallographie des rayons X. Elle est connue pour sa contribution majeure à la découverte de la structure de l’ADN.
Dans les années 1950, Rosalind a utilisé la technique de diffraction des rayons X pour étudier la structure des fibres de l’ADN. Ses travaux expérimentaux ont produit des images clés. Elles sont connues sous le nom de « photographies de diffraction ». C’est donc son travail qui a révélé la structure en double hélice de l’ADN. Ces images ont ainsi fourni des preuves cruciales pour comprendre la manière dont les molécules d’ADN s’organisent et se reproduisent.
Ses photographies ont malheureusement été utilisées sans son autorisation par d’autres chercheurs. Ils ont publié un article décrivant la structure de l’ADN et ont reçu le prix Nobel pour cette découverte en 1962. Ce n’est que bien après sa mort en 1958, que sa contribution a été pleinement reconnue. Son travail a ouvert la voie à des avancées majeures dans la compréhension de la génétique et de la biologie moléculaire.
Ada Lovelace
Ada Lovelace est une mathématicienne et une écrivaine britannique du XIXe siècle. Elle a développé des travaux précieux sur la machine analytique de Charles Babbage. Pour cela, elle est souvent considérée comme la première programmeuse de l’histoire.
Dans ses notes sur la machine analytique, publiées en 1843, Ada a écrit un algorithme destiné à être exécuté par la machine. Cela en fait le premier programme informatique de l’histoire. Elle a aussi émis l’idée que ces machines pourraient être utilisées pour bien plus que de simples calculs mathématiques. Anticipant ainsi le potentiel de l’informatique moderne.
Son travail visionnaire sur l’utilisation des machines a malheureusement été largement ignoré pendant de nombreuses années. Au fil du temps, il a finalement été reconnu. Ada Lovelace est aujourd’hui considérée comme une figure emblématique de l’histoire de l’informatique. Mais aussi un symbole de l’importance de la participation des femmes dans les sciences et les technologies.
Chien-Shiung Wu
Physicienne sino-américaine, Chien-Shiung Wu a joué un rôle essentiel dans la découverte de la violation de la parité en physique des particules et de la physique nucléaire. Son travail a permis de remettre en question une loi fondamentale de la physique à l’époque.
Dans les années 1950, elle a mené une expérience révolutionnaire connue sous le nom d’expérience Wu. De manière simple, ses travaux ont montré que la symétrie de parité n’était pas conservée dans les interactions faibles. Contredisant ainsi l’idée, largement acceptée à l’époque, selon laquelle les lois de la physique devraient être symétriques par rapport à une transformation miroir.
Malgré sa contribution majeure, elle n’a pas reçu le prix Nobel de physique en 1957, contrairement à ses collègues masculins. Toutefois, elle a reçu de nombreux honneurs tout au long de sa carrière, dont la médaille nationale de la science aux États-Unis en 1975. Elle est également devenue une figure emblématique pour les femmes, en tant que défenseuse de l’égalité des genres dans les sciences.
Même si l’histoire souhaite nous faire penser l’inverse, les femmes ont toujours travaillé. En célébrant et en reconnaissant leurs contributions nous pouvons créer une compréhension plus inclusive de l’histoire, tout en inspirant les générations futures à suivre leurs traces. L’asymétrie des sexes ne devrait plus être d’actualité en 2023 !