Manon, une jeune femme de 25 ans, était en recherche d’un stage d’apprentissage en 2017. Elle cumule alors les envois de candidatures, jusqu’à décrocher un entretien dans une boulangerie située aux environs de Bordeaux. Le hic : son recruteur a passé l’essentiel de l’entretien d’embauche à la critiquer sur son surpoids. C’est ce qu’on appelle de la discrimination à l’embauche. Elle se confie.
Manon, 25 ans, vit en Gironde. En 2017, elle est apprentie en recherche d’un stage pour valider son CAP boulangerie-pâtisserie. Démarrent alors les envois d’e-mails de candidatures. Les refus se suivent, jusqu’au jour où elle obtient un entretien. Après une réponse positive par mail à la suite de l’envoi de son CV et de sa lettre de motivation, elle décroche un rendez-vous téléphonique.
« Mon entretien téléphonique préalable s’était vraiment très bien passé. Sur mon CV, il n’y a pas de photo, le premier contact s’est juste fait à la voix et s’est très très bien passé. Le monsieur était très charmant et très gentil »
« Ah, mais vous êtes grosse ! »
Conviée à un entretien physique, c’est la désillusion. Et ce dès le premier face à face. « Je suis arrivée, l’employeur m’a immédiatement ouvert la porte de son bureau. Quand il m’a vue, il m’a regardée de haut en bas et a fait un pas en arrière. Je tendais alors la main pour lui serrer la sienne et il m’a dit : ‘Ah, mais vous êtes grosse !’ ». Son recruteur passera ensuite l’essentiel de l’entretien à la critiquer sur son surpoids. Lui expliquant même que son physique pourrait porter atteinte à l’image de la boulangerie.
Un épisode traumatisant, comme elle l’a confié au micro d’Olivier Delacroix, sur Europe 1. À cette époque-là, Manon est en effet très complexée et suis même un régime. « La seule chose que j’ai réussi à lui dire c’est : ‘Oui, mais je fais un régime’ comme si c’était de ma faute. Je me suis presque sentie obligée de m’excuser ».
« J’étais dégoûtée »
Après cette triste entrée en matière, l’entretien tourne littéralement au calvaire. Le gérant de la boulangerie focalise la discussion uniquement sur le physique de la jeune femme. « Tout mon entretien était centré sur mon poids et non par rapport à mon CAP de vendeuse en boulangerie », raconte Manon. Le poste de vendeuse n’est que très peu abordé. L’employeur choisissant de lui asséner des propos grossophobes. « Vis-à-vis des clients, l’image que vous renvoyez en étant grosse… ce n’est pas très bon pour l’entreprise » ; « vous allez rester bloquée à certains endroits dans la boulangerie, vous êtes tellement grosse, vous n’allez pas passer » ; « vous savez il y a quelque temps j’ai eu une employée qui était grosse comme vous. Je lui ai conseillé de mettre un anneau gastrique, elle ne voulait pas mais vous savez maintenant ça va mieux, elle me remercie ».
Une situation invraisemblable qui décontenance la jeune femme. « J’étais dégoûtée. Mais je me suis dit : ‘Va jusqu’au bout de l’entretien, ne sois pas malpolie. Si jamais il avait des contacts pour trouver du travail, je ne voulais pas avoir une mauvaise image qui se serait retournée contre moi », explique Manon. Finalement l’homme ne donnera pas suite. « Tant mieux, parce que je n’aurais pas répondu », déclare-t-elle.
Grossophobie et discrimination à l’embauche
Manon vient tout bonnement d’être victime de grossophobie couplée à de la discrimination à l’embauche. Et elle n’est pas la seule. 1/3 des demandeur·euse·s d’emploi ont déclaré en 2016 avoir subi de la discrimination à l’embauche en raison de leur surpoids. Les femmes y étant 4 fois plus sujettes que les hommes.
Malgré l’avis de ses proches, Manon renoncera cependant à porter plainte. Avec le recul, elle reconnait toutefois : « j’aurais peut-être dû le faire, pas en pensant à moi mais en pensant aux autres à qui cet homme pouvait aussi faire subir ça. Je me suis dit qu’il était fatiguant de se lancer là-dedans. Mais si ça devait se reproduire, je ne me laisserais pas faire, parce que ce sont les autres qui ont un problème, pas moi. Je suis normale, moi ».
À chacun·e de nous de déconstruire les normes de « beauté » ! Parce qu’on est bien loin de la « simple » critique physique. Ces « remarques » subies par Manon, sont injurieuses et diffamatoires. Un employeur n’a pas à tenir de tels propos lors d’un entretien, ni même votre mère ou un(e) ami(e). La grossophobie est une discrimination. Une discrimination malheureusement encore peu exposée comparativement au nombre de personnes exposées. Un vrai racisme anti-gros qu’il est intolérable de rencontrer encore au 21ème siècle !
Vous avez vous aussi été victime de grossophobie et/ou de discrimination à l’embauche ? Venez en parler librement sur son forum !