Les hommes qui se déguisent en femme à Halloween : problématique ou émancipateur ?

À Halloween, tout le monde rivalise de créativité pour susciter la frousse. Mais au milieu des clowns ensanglantés, des sorcières badass et des momies possédées, un costume visiblement « hors sujet » fait tâche. Dans cette foule de monstres et d’esprits maléfiques, des hommes grimés en femmes provoquent l’indignation plus que l’effroi. Ils répugnent, non pas par leur allure, mais par leur démarche et leur parti pris. Les hommes qui se déguisent en femme à Halloween veulent jouer les petits comiques. Même si ce déguisement semble inoffensif sur la forme, il l’est un peu moins sur le fond. Bien souvent, ces costumes tournent les femmes en ridicule. C’est une abomination pour la gent féminine. Voici pourquoi les hommes ne devraient pas se déguiser en femme à Halloween. Le drap blanc, au moins, c’est une valeur sûre.

Le risque de ridiculiser l’autre genre

À Halloween, les hommes ont l’embarras du choix. Ils peuvent mimer le physique lugubre du Joker, arborer le masque de Scream, revêtir des cornes de diable ou encore des dents pointues pour incarner Dracula. Ils ont la possibilité de muer en être diablement maléfique avec quelques coups de pinceau et une étoffe sur le dos. Mais certains préfèrent enfiler un collant, une robe issue de la garde-robe de leur sœur et une perruque démesurée pour prendre les traits du genre opposé.

Ces hommes qui se déguisent en femme ont plus à coeur d’amuser la galerie que de lever les poils et éveiller les cris de peur. D’ailleurs ils dégainent souvent l’argument du second degré pour justifier cet accoutrement. Hissés dans l’habit de la soubrette sexy, de la none dévergondée ou de la mamie exhibitionniste, ils poussent parfois la dérision trop loin. Les costumes de femmes à destination des hommes sont souvent caricaturaux et à des années-lumière de la réalité. Ils ne sont pas à la gloire de la final girl inspirante des films d’épouvante ou de l’héroïne revancharde.

Ils ont tous un style grotesque et un patron originel satirique. En fait, ils réduisent les femmes à une apparence superficielle et totalement clichée. Même si les hommes qui se déguisent en femme ne pensent pas à mal en portant des bas résille et une paire de talons, ils colportent malgré eux des stéréotypes qui donnent des haut-le-cœur. Il ne manque plus que le revers de main dans les cheveux, la voix fluette et le roulé de hanches pour entacher définitivement l’image de la femme. Petit rappel : être une femme n’est pas drôle.

Un costume insultant du point de vue des transgenres

Lorsque des hommes cisgenres, un peu machos sur les bords, se travestissent en femmes pour le fun, ils offensent indirectement les hommes qui ne sont pas nés dans le bon corps et qui se sentent plus femmes. Ils minimisent la complexité des expériences liées au genre. Certains hommes transgenres portent des jupes, des cheveux longs et du maquillage dans la vie de tous les jours. À leurs yeux, c’est un acte naturel, pas un gag ou une plaisanterie. Pour eux, le genre n’est pas un déguisement, mais une réalité profonde. À la différence des hommes cis qui ne se prennent pas au sérieux dans cet habit aux caractéristiques dites féminines, les transgenres en font un marqueur d’identité.

Les hommes qui se déguisent en femmes à Halloween le font rarement pour explorer leur part de féminité et naviguer librement à travers les genres. Ceux qui s’emparent du vestiaire féminin au bal de l’horreur et qui se pressent dans des robes étriquées massacrent l’image des transgenres. Ils ne veulent pas mimer la femme ou investir ce genre, ils souhaitent simplement le parodier. Ils méritent un oscar au concours de la médiocrité.

Le travestissement comique ne fait plus rire

Il fut un temps où le travestissement comique musclait les zygomatiques et laissait le public hilare. Dans « La Cage aux Folles » ou « Certains l’aiment chaud ! », les hommes se transformaient en femmes et surjouaient volontiers leur personnage. Sur les sièges rouges des salles obscures, les spectateur.rice.s en avaient des crampes au ventre. Mais désormais ce type d’humour ne passe plus. Malgré toute la légèreté et l’innocence qu’il porte, il est associé au « mauvais goût ».

Les hommes qui se déguisent en femme à Halloween sont donc plus susceptibles de faire un bad buzz et de s’attirer les foudres des féministes que de provoquer les applaudissements et les éclats de rire d’autrefois. Cet humour facile peut ne plus correspondre aux normes sociales actuelles.

Une façon d’embrasser sa féminité ?

Halloween est aussi une opportunité pour s’exprimer librement. Cette fête offre une occasion unique de s’affranchir des contraintes sociétales. C’est la seule soirée lors de laquelle on peut concrétiser ses désirs les plus privés sans trop subir le regard des autres. Cette nuit-là, tout est permis et désinhibé. Les femmes peuvent porter des costumes provocants faits de latex et de jupes mini sans se faire insulter de fille de joie ou incarner le mal dans toute sa splendeur.

Les hommes qui se déguisent en femme à Halloween prennent peut-être leur pied dans cette tenue qu’ils ont plus l’habitude de reluquer que de porter. Contrairement aux femmes, qui osent se présenter en « bad bitch » ou en « tomboy« , ces messieurs camouflent soigneusement ce fantasme sous l’ironie. Au-delà de la vanne, ils cherchent peut-être à exploiter leur côté féminin. Ou à se débarrasser temporairement de ce masque du mâle Alpha. Cependant, pour ne pas trahir le plaisir éprouvé dans ce costume, ils s’en remettent à l’absurde. Cet excès d’humour dissimule peut-être un bonheur intérieur qu’il ne pensait pas goûter avec une jupe et des faux cils. Rares sont les hommes qui disent « j’ai choisi de m’habiller en femme parce que ça me titille depuis des années« .

Les hommes qui se déguisent en femme ne sont pas tous à blâmer ou à attaquer. Certains costumes ont, certes, leur place sur le bûcher, mais d’autres peuvent s’avérer inclusifs et émancipateurs. Un costume qui met en avant la force ou l’élégance des femmes pourrait être une manière plus respectueuse d’explorer ce terrain. Dans le doute, privilégiez la combi de La Casa de Papel… 

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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