Lorsqu’on lui demande ce qu’elle pense du déconfinement, Amandine, infirmière depuis 2013, se montre prudente : « Comme tous les soignants, je n’en pense pas grand-chose (…). On se prépare, mais notre quotidien n’a pas changé pour le moment« . En effet, depuis l’apparition du Covid, Amandine est passée en service réanimation. Une spécialité qu’elle a dû apprendre sur le tas. Bien loin de Grey’s Anatomy ou Docteur House, elle témoigne à travers son journal de bord sur Instagram : « La réa, c’est douloureux et moche« . Focus sur cette héroïne en blouse blanche.
« Ma vie s’est arrêtée »
« Récits, anecdotes, réalité, bienvenue dans mon monde bienveillant et aseptisé« . C’est avec ces mots que nous accueille Amandine, jeune infirmière, elle-même en couple avec une autre infirmière. D’ailleurs, elles ne parlent plus que de ça à la maison : « on parle de notre boulot tout le temps. On vit réa Covid depuis un mois« . Sa seule bouffée d’air frais ? Pouvoir raconter ses journées sur son blog et sa page Instagram.
Plus qu’un métier, être infirmière est une vocation pour la jeune femme. Infirmière en chirurgie-gynécologie, on lui a demandé d’intégrer le service réa pour pallier à la vague de patients atteints du Covid dès la fin du mois de mars. « Ma vie s’est arrêtée. » raconte-t-elle. En effet, elle a dû s’occuper de patients en détresse respiratoire aiguë. Intubés, ventilés par des machines dans des états très critiques et « qui demandent des soins très spécifiques que je ne connaissais pas il y a encore trois semaines« .
Forcée d’apprendre sur le tas, Amandine travaille dans des conditions très difficiles avec pour seul soutien ses collègues, qu’elle reconnaît à peine à cause des masques et des visières qu’ils sont dans l’obligation de porter toute la journée. Mais qu’importe, il faut tenir. Et c’est loin d’être facile lorsqu’on est infirmière en service réanimation.
Quotidien d’une infirmière en temps de Covid-19
Les séries médicales à succès nous donneraient presque une image glamour des urgences. Mais il n’en est rien, comme le raconte notre infirmière : « la réa, c’est douloureux et moche. Il y a beaucoup d’oedèmes sur la face, de la salive qui coule, des pansements partout pour protéger des escarres« .
Elle se doit aussi de prendre soin des patients dans le coma : « on leur parle, mais ils ne répondent pas« . Elle les masse, les tourne et les lave toutes les 4 heures. Toujours en veillant a préparer psychologiquement les familles qui viennent rendre visite à leur proche. « On doit les prévenir que le visage qu’ils vont voir n’est pas le visage habituel de leur proche. Mais on a beau avertir, c’est toujours choquant. On les soutient, on leur dit que nous aussi nous sommes très affectés« .
Et il y a malheureusement ceux qui s’éteignent après des jours de lutte acharnée contre le Coronavirus. Amandine s’occupe alors de la toilette mortuaire, spécialement mise en place pour lutter contre l’épidémie : « la mise en bière se fait de façon immédiate et selon un protocole spécifique. C’est très spécial, très dur, un deuil impossible pour les familles« .
Baisse des admissions avant le déconfinement
En sortant de ses journées de travail harassantes, l’infirmière peut heureusement retrouver du réconfort auprès de sa compagne, mais aussi à travers les applaudissements à 20 heures. « J’ai l’impression qu’on m’applaudit. Je les prends pour moi, j’aime bien« .
Et parfois, elle a de très belles surprises en arrivant au travail : « nous avions ce patient pris en charge depuis trois semaines pour lequel nous n’avions plus aucun espoir. Et pourtant, il a commencé à aller mieux sans qu’on sache pourquoi. Hier, je suis allée le voir, il parlait, il avait conscience de ce qui se passait, il m’a reconnue, c’était très émouvant pour tout le monde« .
Alors que nous entrons dans la première phase du déconfinement, Amandine a déjà pu constater une baisse des entrées en réanimation. Ses collègues et elle peuvent souffler un peu. Et même si elle ignore encore quand elle réintégrera son service d’origine, elle est certaine de ne pas vouloir travailler en réa et serre les dents en attendant. Celle qui n’a pas eu de congés depuis août 2019 et espère une revalorisation de son salaire confie : « je plafonne à 1600 euros pour des journées ultra-chargées, des dimanches, des jours fériés, des Noël loupés. Je crois que j’ai besoin d’un break. »
N’hésitez pas à lui laisser un petit mot sur sa page Instagram ou son blog. Un grand merci Amandine ! À vous et à tous ceux qui ont oeuvrés chaque jour au péril de leur santé, pour que le pays continu de tourner durant le confinement.