Alors que la langue de signes est la seule langue accessible naturellement à un.e enfant sourd.e, seul.e.s 5 % d’entre elleux l’ont pour langue maternelle. Cela s’explique par le fait que les 95 % majoritaires ont des parents entendant.e.s. La communauté des sourd.e.s et malentendant.e.s signant est ainsi parmi la plus isolée dans notre société, car c’est une langue trop peu parlée par les entendant.e.s. Pourtant, la langue des signes mériterait davantage d’attention et une démocratisation de son apprentissage. Voici les bonnes raisons de l’apprendre dès aujourd’hui.
Qui utilise la langue des signes ?
Selon la Fédération Nationale des Sourds, il y a 300 000 sourd.e.s en France. Seul.e.s un tiers d’entre elleux pratiquent couramment la langue des signes. Cette fédération lutte justement pour la reconnaissance de cette langue afin de sortir les sourd.e.s et malentendant.e.s de l’isolement dans lequel iels sont plongé.e.s. En effet 34 % d’entre elleux sont inactif.ve.s à cause de la restriction d’accès à l’emploi, aux loisirs et à l’isolement.
On parle de déficience auditive lorsqu’une personne est en dessous du seuil de 20 dB dans les deux oreilles. Il en existe quatre types : légère, moyenne, sévère ou profonde. En l’occurrence, une personne malentendante sera atteinte d’une perte d’audition qualifiée de moyenne à sévère. Néanmoins, elles peuvent généralement communiquer par la parole et être aidées d’appareils auditifs ou d’implants cochléaires par exemple.
On considère qu’une personne est sourde lorsqu’elle souffre d’une perte d’audition profonde. Cela signifie qu’elle n’entend pas ou presque plus. Dans ces cas-là, la plupart des concerné.e.s échange grâce à la langue des signes. Cela étant dit, on peut aussi voir des personnes malentendantes et entendantes l’utiliser, même si cela se fait trop rare, car les sourd.e.s restent fort exclu.e.s dans les lieux publics et administrations.
Pourquoi apprendre la langue des signes ?
1 – Développer une ouverture d’esprit
Tout apprentissage de langue nécessite de l’attention et de l’intérêt pour ses locuteur.rice.s. Ainsi, l’observation de l’autre vous permettra de développer votre ouverture d’esprit.
Par ailleurs, parler la langue des signes vous permettra d’échanger avec des milliers de personnes auxquelles vous n’aviez pas accès jusqu’alors. Cela fonctionne comme n’importe quelle langue étrangère finalement, vous pourrez ouvrir votre champ de relations sociales et de culture.
2 – Pouvoir parler à un bébé
Ces dernières années, de plus en plus de parents ont fait le choix d’utiliser la langue des signes pour communiquer avec leur nouveau.elle-né.e. En effet, saviez-vous qu’il est possible de commencer à associer des phrases et des gestes simples dès les 6 mois du nourrisson ?
Les bébés apprennent plus rapidement à communiquer avec des gestes qu’à parler, et cela ne retarde en rien l’apprentissage de la parole. L’usage de la langue des signes avec votre enfant vous permettra de développer votre complicité, de diminuer la frustration, les pleurs et de lui donner confiance.
Aussi, la langue des signes facilite l’expression des enfants avec des troubles de la parole. Par exemple, celleux qui souffrent de troubles du spectre autistique ou de troubles dys, la langue des signes s’avère utile pour faciliter la communication. Vous éloignerez donc par la même les frictions, les tensions et les frustrations inhérentes aux difficultés de communication.
3 – Une ouverture intellectuelle grâce à la langue des signes
C’est connu, apprendre une nouvelle langue stimule l’intellect. Un grand nombre de linguistes et de psychologues s’accordent pour dire que le plurilinguisme offre son lot de bienfaits cognitifs.
Apprendre la langue des signes vous permettra de développer votre capacité de concentration, d’écoute et de réflexion. Qui plus est, il est prouvé qu’il vous sera plus facile d’apprendre une énième langue ensuite !
4 – Améliorer l’accessibilité des personnes sourdes et malentendantes
Les personnes malentendantes et sourdes restent inexorablement exclues de notre société. Puisque trop peu parlent leur langue, elles se voient obligées de rester entre elles et n’ont pas accès au même confort.
Par exemple, lorsqu’elles vont à des rendez-vous médicaux, les informations ne sont que résumées. Ces difficultés de communication lèsent celleux qui utilisent la langue des signes. Alors, si vous appreniez ce langage, vous seriez en mesure d’aider les signant.e.s et d’améliorer leur accessibilité.
5 – Parler sans faire de bruit
Vous êtes dans un lieu public, mais vous ne voulez pas déranger, parler la langue des signes vous permettra d’échanger en toute discrétion. Vous pourrez donc discuter en silence à la bibliothèque, au cinéma ou encore au théâtre. Et si vous avez réussi à endormir bébé par miracle, parler en langue des signes s’avérera fort utile pour ne pas le.a réveiller.
À l’inverse, vous pourrez vous servir de la langue des signes pour communiquer dans des endroits bruyants. Que vous soyez en boîte, à un concert ou un match, vous pourrez communiquer aisément sans avoir à crier ou à vous répéter.
Signer, mais en quelle langue ?
Les historien.ne.s remontent l’existence de communautés sourdes signantes à l’Antiquité. Si son principe a presque toujours existé, il a fallu attendre le XVIIIe siècle pour que l’Abbé de l’Epée pense à regrouper des sourd.e.s pour les enseigner dans leur langue. Alors, iels accèdent à une plus grande visibilité sociale avant de subir de grandes discriminations jusqu’au Réveil des Sourd.e.s vers 1975 (mouvement culturel pour la réhabilitation de la LSF). Ce n’est que depuis la loi Fabius en 1991 que les enfants ont accès à un enseignement en langue des signes. Elle n’est reconnue comme une langue à part entière que depuis 2005.
C’est un langage qui est aussi visuel que gestuel qui se sert de l’alphabet manuel, des mimes, de l’imitation et de l’expression du visage. Pour parler la langue des signes, il vous faudra veiller à la position de vos doigts, de votre main, à vos mouvements, à l’emplacement de ceux-ci ainsi qu’à l’expression de votre visage.
Par ailleurs, sachez que la langue des signes se décline dans plusieurs langues, elle n’est pas universelle. Certains signes de base sont identiques, certes, mais elle utilise des références culturelles inhérentes à chaque pays ou régions. Par exemple, certains pays occidentaux miment la casquette pour dire « garçon ». Dans certaines langues des signes orientales, on fera plutôt un geste vertical représentant un keffieh. Il existerait plus de 100 langues des signes, variant également selon le pays à l’instar des langues orales (anglais/américain, français/québécois, etc.). Il existe même des variations régionales, en fonction des villes par exemple.
Comment apprendre la langue des signes ?
Vous êtes convaincu.e mais vous ne savez pas comment vous former à cette langue ? Sachez qu’il existe une multitude de moyens pour cela. Vous pouvez prendre des cours auprès d’associations (municipales, universitaires, etc.). Il est aussi possible de s’adresser directement à l’Académie de la Langue des Signes Française (ALSF) ou à l’organisation Visuel, qui offre des cours éligibles au Compte Personnel de Formation.
Si votre rythme de vie ne vous permet pas de vous rendre à ces cours, d’autres solutions s’offrent à vous. D’abord, moult livres et dictionnaires sont à votre disposition pour acquérir du vocabulaire, comme :
- Le dictionnaire de poche bilingue LSF
- À portée de main – initiation à la langue des signes
- 115 signes du quotidien en crèche, à l’école ou à la maison, pour les plus petit.e.s
Si vous n’êtes pas un.e grand.e lecteur.rice, vous pouvez opter pour des vidéos YouTube ou des comptes Instagram (@lsfcombat par exemple). Ces plateformes regroupent de nombreuses pages et vidéos qui vous guideront dans l’apprentissage de cette langue. Enfin, vous pouvez utiliser des applications mobiles comme l’incontournable Elix ou Bébé signe pour communiquer avec votre enfant.
La langue des signes est un très beau langage dont l’apprentissage est plein de vertus. D’ailleurs, dans ce processus, il vous est tout à fait possible de vous adresser à une personne malentendante. Bien que vous ne parliez pas la même langue, vous saurez sûrement trouver un terrain de compréhension. D’une part, vous pourrez interpréter des gestes; d’autre part, les sourd.e.s et malentendant.e.s lisent souvent sur les lèvres. Il vous faudra simplement essayer de parler bien en face avec votre tête droite, en faisant des phrases courtes et en articulant le mieux possible.