Qui est la DJ Barbara Butch, victime de cyberharcèlement depuis la cérémonie des JO ?

Elle était au centre de l’un des tableaux artistiques phares de la cérémonie d’ouverture des JO. Véritable reine de la soirée, avec son diadème étincelant sur la tête, elle a mis le feu aux platines et donné le tempo lors de cette scène inclusive marquante. Depuis ce passage à l’écran, jugé par certaines personnes polémique et insultant envers la communauté catholique, la DJ française, qui se revendique comme une « militante de l’amour queer », fait face à une terrible vague de haine. L’artiste, qui a fait du body positivisme et de la cause LGBT+ son principal refrain, est plutôt bien armée contre les haters. Mais cette fois-ci, les propos reçus en DM ou largués sous ses posts ont été d’une telle virulence qu’elle a décidé de déposer plainte. Voici ce que vous devez savoir sur Barbara Butch, l’emblème des nuits parisiennes, victime de cyberharcèlement depuis sa performance.

Barbara Butch, « menacée de mort, de viol, de torture »

Barbara Butch, bien connue des boîtes confidentielles de la capitale, a quitté temporairement ses clubs de prédilection pour mettre l’ambiance à la cérémonie d’ouverture des JO. Celle qui exerce ordinairement son art dans l’ombre, s’est prêtée à la lumière de ce grand spectacle d’inauguration. Protagoniste de la partie intitulée « Festivités », cette alchimiste sonore a endossé le prestigieux rôle de cheffe d’orchestre lors de ce chapitre artistique. Elle a accompagné les pas de danses des drag queen et animé ce défilé rafraîchissant. Peu de temps après sa prestation, elle s’est dite honorée d’avoir pu participer à une cérémonie d’une telle envergure. Mais très rapidement, les injures ont succédé aux jets de fleurs et aux compliments.

Barbara Butch, héroïne d’une scène polémique, accusée de se moquer d’un tableau à connotation biblique, subit de plein fouet les retombées de cette performance. Elle, qui prône la tolérance et l’amour universel, est désormais encerclée par les haters. Féministe engagée, lesbienne affirmée et fille d’une famille juive, Barbara Butch est malheureusement familière aux critiques. Toutefois, cette fois-ci, les attaques sont montées crescendo et ont pris une tournure effrayante.

« J’ai commencé à recevoir des messages plus horribles les uns que les autres, comme par exemple « la prochaine fois que tu joueras, je prendrai un couteau et je te trancherai la gorge sur scène »», déclare-t-elle dans les colonnes du Parisien

Dans un communiqué relayé sur le compte Instagram de cette virtuose des platines, Audrey Msellati, son avocate a également parlé de menace « de mort, de torture et de viol ». Elle faisait aussi état d’injures « à caractère antisémite, homophobe, sexiste et grossophobe ». Pour freiner ses détracteur.rice.s dans cette déclaration de guerre 2.0, Barbara Butch a déposé plainte le 30 juillet. Une enquête a été ouverte dans la foulée par le parquet de Paris et l’office central de lutte contre les crimes contre l’humanité et les crimes de haine a été saisi.

Du rêve d’être saxophoniste aux platines des boîtes inclusives

Au lieu de propulser la carrière de Barbara Butch et de révéler son talent à la face du monde, cette cérémonie d’ouverture des JO l’a fait connaître sous de sombres titres. Pourtant, si lors de cet événement, elle s’est attirée les foudres d’un public rigide d’esprit qui écrit des horreurs à temps plein, il en faut bien plus pour ternir sa réputation dorée. Ce carton d’invitation à cette grand-messe du sport est déjà un beau sacre pour celle qui a percé dans les bars intimistes parisiens.

La quarantenaire, dont les termes « gouine » et « grosse » sont inscrits en lettre capitale sur sa peau, a une personnalité haute en couleur. Petite, elle se voyait à la tête d’un groupe de jazz, avec un saxophone se faisant presque l’extension de sa bouche. Mais finalement, elle a emprunté un tout autre itinéraire et opté pour un registre plus festif, à son image. Elle a commencé à tutoyer les platines dans un restaurant de Montpellier dont elle était propriétaire.

Puis, elle est revenue à ses racines, la Ville Lumière, qui a éclairé son parcours. Désormais, elle prend ses quartiers au Rosa Bonheur ou à la Machine du Moulin Rouge, des lieux bien connus des oiseaux de nuit parisiens. Si ses rêves ont évolué au fil des années, ses convictions, elles, n’ont jamais bougé. Au contraire, elles n’ont fait que croître. DJ féministe inspirante, Barbara Butch défend depuis toujours la liberté d’être soi.

@barbarabutch/Instagram

Au-delà des beats, une DJ qui élève sa voix contre la grossophobie

Cette DJ aux doigts d’argent se sert de son art pour faire résonner ses combats personnels et délivrer des messages pacifistes. Au gré de ses sets qui sont une douce alchimie musicale de vintage et de pop, elle souhaite remixer la société actuelle et lui apporter un souffle inclusif. Elle n’hésite d’ailleurs pas à faire tomber ses vêtements pour bousculer les standards et clamer l’amour de soi.

Muse de Jean-Paul Gaultier, elle posait nue en tenue d’Ève pour faire la promotion de la fragrance « Belle », un adjectif élogieux aux multiples incarnations. En 2020, elle faisait également la Une du magazine culturel français Télérama, la chaire en seul habit, et côtoyait ce titre symbolique : « pourquoi on rejette les gros ? ».

« Je tiens à la représentation du corps gros, qui n’est montré que sous le prisme du régime, de stéréotypes limitants pour les personnes grosses », insistait-elle dans une interview pour le magazine et site web LGBT+ français Têtu en 2021

Débarrassée des diktats et des conventions, Barbara Butch est un « role model » body positive sur les réseaux sociaux. Il suffit de parcourir son compte Instagram pour le comprendre. Plus qu’une mosaïque de photos, c’est une vitrine qui fait la promotion du self love et de la joie de vivre.

@barbarabutch/Instagram

La cause LGBT+, l’autre combat qui rythme son quotidien

À la fin de ce show monumental pour lancer le coup d’envoi des JO de Paris 2024, Barbara Butch délivre un baiser furtif à sa compagne Camille Robbins. Transparente avec sa communauté, elle partage régulièrement des parties de sa vie intime avec sa dulcinée, qui deviendra bientôt sa femme. Lesbienne et fière de l’être, la DJ met aussi ses partitions au service des minorités. En 2023, elle fondait son label, « Muy Lesbienne Records », au titre à la fois piquant et provocateur. Et lorsqu’elle n’a pas son casque greffé sur les oreilles, elle poursuit toujours cette quête. Elle ne baisse jamais les armes. Artiste au grand cœur, elle a d’ailleurs été coordinatrice du pôle LGBT du bureau d’accueil et d’accompagnement des migrants.

Son engagement sans limites lui a ainsi valu une récompense en 2021. Lors d’une cérémonie organisée par l’association des journalistes LGBT+, elle a été nommée personnalité de l’année aux OUT d’or. C’est presque encore plus honorifique qu’un trophée récolté aux Victoires de la Musique.

« À travers mon activité de DJ et mon militantisme, j’ai toujours promu l’amour et l’inclusivité – pour moi, c’est ce qui sauvera le monde, même lorsque celui-ci se délite », clamait-elle sur les réseaux sociaux

@barbarabutch/Instagram

Barbara Butch, DJ française charismatique, défenseuse d’une société plus juste, n’a pas pu savourer son heure de gloire. Toutefois, rien ne semble pouvoir mettre en sourdine ses valeurs et sa foi en l’amour.

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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