Droits LGBT+ aux États-Unis : comment un tel climat de terreur a pu s’installer ?

Aux États-Unis, les droits sur la vie privée reculent et le clan conservateur de la Cour suprême s’en frotte les mains. Après avoir enterré le droit à l’avortement le 24 juin 2022, les politiques de droite s’emparent d’un nouvel os à ronger : le drapeau LGBT+. Depuis mars dernier, des mesures rigoristes et effrayantes entachent les couleurs arc-en-ciel.

Mariage gay, utilisation de pronom, chirurgie de réassignation de sexe… les réactionnaires grignotent les libertés individuelles de la communauté LGBT+ et se gavent de lois stigmatisantes. Ce come-back vers l’ère puritaine n’augure rien de fameux pour les minorités de genre. Décryptage. 

Des lois majeures pour les droits LGBT+ dans le viseur de la Cour Suprême

Aux États-Unis, depuis juin dernier, les mariages gays ne se font plus sous le signe d’une cérémonie clinquante, mais sous la pression du chronomètre. Ces unions express, dépouillées, sans bagues ni invité.e.s battent leur plein. Loin de faire partie de ces tendances minimalistes, le but de cette manœuvre n’a rien de romantique. Les couples homosexuels se ruent vers la mairie pour officialiser leur relation, avant qu’il ne soit trop tard.

Ce scénario catastrophe digne d’un film de science-fiction agite le pays de l’Oncle Sam, qui se fait doucement défigurer. Pour cause, après le retrait de l’IVG de la constitution, la Cour suprême a pris d’assaut les droits LGBT+. À la Cour suprême, sommet des décisions, les Républicains conservateurs occupent la majorité des sièges. Ces politiques de l’extrême ne font pas dans la demi-mesure.

Guidé.e.s par des idéologies archaïques, directement puisées dans les années 50, iels effacent insidieusement un pan de l’Histoire. D’abord, celui de l’avortement, pourtant autorisé depuis 1973 aux États-Unis, et maintenant celui de la communauté LGBT+. Le juge Clarence Thomas, l’un des plus conservateurs, se justifiait en invoquant « le devoir de corriger les erreurs » passées de la Cour suprême.

Révoquer le mariage gay, la menace plane

Derrière les colonnes de ce bâtiment, un grand tri juridique s’opère. Et la suppression de l’IVG n’en est qu’un avant-goût. En effet, l’arrêt « Lawrence vs Texas », en vigueur depuis 2003 interdit les lois pénalisant les relations sexuelles entre personnes du même genre. Clarence Thomas a affirmé sa volonté de revoir la copie au même titre que l’arrêt « Obergefell v. Hodges », équivalent du mariage pour tous en France.

Certains États s’en donnent à cœur joie, enfonçant un peu plus le clou des discriminations LGBT+. Le procureur général du Texas, Ken Paxton, a par exemple confirmé qu’il se tiendrait prêt à interdire les relations homosexuelles dans son État. Cette hostilité politique gronde dangereusement sur les droits LGBT+. Selon la chaîne américaine NBC News, entre janvier et mars dernier, près de 240 projets de loi à caractère LGBTphobes avaient été déposés aux États-Unis.

Entrée en vigueur de la loi « Don’t say gay » à l’école, un signe fort

Cette machination anti-LGBT débute dès la cour de récréation avec la loi « Don’t say gay », effective en Floride depuis le 1er juillet dernier. Cette mesure radicale qui signifie littéralement « ne parlez pas des gays » interdit aux enseignants d’évoquer orientation sexuelle ou identité de genre en classe. Malgré les polémiques, le gouverneur républicain de Floride Ron DeSantis a signé ce texte de loi à l’origine nommé « House Bill 1557 ».

Et sa modestie est certainement restée au même niveau que sa tolérance, puisqu’il n’a pas manqué de se féliciter. « Nous allons nous assurer que les parents puissent envoyer leurs enfants à l’école pour qu’ils apprennent, pas pour qu’ils soient endoctrinés », déclarait-il au moment de signer. Derrière les murs de l’école, les jeunes qui s’associent à la communauté LGBT+ doivent choisir entre rester au placard ou faire un coming-out forcé. Et le corps enseignant fait aussi face à ce dilemme.

Des restrictions en cascade pour les personnes trans

Les États conservateurs à l’image de la Floride ou du Montana pourraient tristement revêtir le titre de vainqueur en transphobie. Aux États-Unis, 5 % de la génération Z se déclare transgenre ou non-binaire d’après des recherches du Pew Research Center. Cette minorité de genre est une « proie facile » pour les réactionnaires qui n’hésitent pas à durcir le ton. En mars dernier, c’est la nageuse américaine transgenre Lia Thomas qui essuyait cette défiance. Première nageuse à remporter un titre universitaire sur un 457 mètres nage libre, son bonheur a été coupé court par les polémiques.

La jeune femme, pointée du doigt pour ses « avantages physiologiques », a nourri les conservateur.rice.s, affamé.e.s de lois infâmes. Cet événement, pain bénit pour les détracteur.rice.s, a inspiré un texte de l’Ohio, interdisant aux femmes trans de participer à des compétitions sportives féminines dans le cadre scolaire. Cette aversion des athlètes trans n’est pas nouvelle puisqu’elle se manifestait déjà par des « tests de féminité ». En revanche, d’autres barrières inédites ont été posées.

Le degré de sûreté pour les personnes trans est en chute libre aux États-Unis. Au Montana par exemple, depuis le 9 septembre, les personnes transgenres n’ont plus le droit de modifier leur acte de naissance pour changer d’identité. Le Texas, lui, a dégainé des enquêtes sur les parents et les médecins d’enfants trans. Ce retour en arrière qui étiquette la transidentité comme une « monstruosité » grogne aussi en Alabama.

Des attaques plus virulentes des citoyen.ne.s hostiles

Et ce mouvement de haine ronge le pays de l’intérieur. À Washington D.C, encore épargné par les lois anti-LGBT+, ce sont des gangs militants qui font régner le chaos. Un groupuscule « Libs of TikTok », suivi par plus de 1 million d’abonné.e.s, a notamment attaqué un hôpital pour enfants. Le motif de cette agression ? Le centre aurait offert des soins aux enfants trans.

Certains États se sont transformés en prisons à ciel ouvert outre-Atlantique. Et les droits LGBT+ s’amincissent progressivement, sur fond de rancœur politique. D’après la Human Rights Campaign, l’année 2021 a été l’année la plus meurtrière jamais enregistrée pour les personnes trans. Après cinq décennies de progrès, un expert de l’ONU, Victor Madrigal-Borloz, confirme que certains droits LGBT+ « sont délibérément bafoués ».

Une haine anti-LGBT qui ulcère le pays depuis des années

Les États-Unis et la communauté LGBT+ ont rarement fait bon ménage. Même si le pays a inauguré la première gay pride, il recense aussi de multiples dérives moins scintillantes. Au total, 698 000 personnes ont déjà subi une thérapie de conversion. Cette pratique médicale scandaleuse est un simple lavage de cerveau pour éviter de tomber dans la marmite LGBT+. Ce pays où les armes à feu sont reines a aussi été le théâtre d’attentats homophobes.

Que ce soit en 1973, dans une boîte de nuit LGBT+ d’Orlando ou en 2013 dans un bar gay de Seattle, ces attaques démontrent une animosité viscérale. Sous le mandat de Trump, les droits LGBT+ ont fait un pas en arrière. L’ex-élu de la Maison-Blanche, véritable aimant à controverses, a détérioré davantage la situation. Il avait notamment abrogé une circulaire fédérale permettant aux transgenres d’utiliser les toilettes de leur choix.

L’ancien président s’était également fait remarquer en suspendant les visas pour les conjoint.e.s de diplomates homosexuels non marié.e.s. Son passage à la maison blanche a assombri le visage de la Cour suprême. En quatre ans, il a désigné un tiers des neufs juges de la plus haute juridiction.

Joe Biden à la rescousse pour épargner les droits LGBT+

Joe Biden tente tant bien que mal de démêler ce grand capharnaüm politique. Cependant, son parti démocrate n’est plus en position de force, ce qui affaiblit ses prises de décision. En plein mois des fiertés, il a signé un décret contre les législations homophobes.

Dans les grandes lignes, ce texte impose au ministère de la Santé et des Services sociaux de publier de nouvelles directives pour élargir l’accès des patient.e.s LGBT+ à des soins de santé complets. Mais devant cette horde de conservateur.rice.s rugissante, cette lueur d’espoir a peu de chance de se faire entendre. En prime, les pro-Trump sont dans les starting-blocks, prêt.e.s à piétiner les moindres droits LGBT+.

L’esprit étriqué de Donald Trump rôde toujours sur les bancs de la Cour suprême. Le drapeau LGBT+ vacille sur fond de méfiance. Rappelons que les homicides et violences proférés contre la communauté LGBT+ ont augmenté de 86 % suite à l’arrivée de Trump au pouvoir. Aujourd’hui cette répression s’inscrit noir sur blanc au détour de lois. Il faudra attendre les élections présidentielles de 2024 pour voir un éventuel revirement.

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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