Violences conjugales dans les couples LGBTQ+ : toujours un sujet tabou ?

Aujourd’hui en France, les violences conjugales au sein des couples LGBTQIA+ restent marginalisées et peu prises au sérieux. Nombreuses sont les causes de ce tabou. Entre la pression sociale à « réussir sa relation homosexuel.le » et le sentiment d’illégitimité à parler, pour les victimes il est difficile de pousser la porte d’un commissariat. Un bon nombre gardent le silence. À l’occasion ce 25 novembre de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, ouvrons le dialogue sur les violences conjugales dans les couples LGBTQ+.

Violences conjugales LGBTQIA+ : une réalité invisible

Lorsqu’on consulte les campagnes contre les violences conjugales, on ne voit presque que des femmes cisgenre avec des coquards, violentées par leur mari. La raison est simple. La plupart des violences conjugales se sont passées au sein des couples hétérosexuels en France. C’est en effet l’homme cisgenre qui les réalise plus sur les femmes que l’inverse. En 2022, 118 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint. 27 hommes ont été tués. Ces chiffres ont été donnés par le ministère de l’Intérieur.

Mais dans les couples LGBTQIA+, tout n’est pas si rose. Un conjoint.e violent.e n’est pas nécessairement du sexe opposé. Malgré les idées reçues, les violences ne sont pas moins dramatiques que dans les couples hétérosexuels. Malgré tout, les réponses apportées aux violences conjugales restent en France particulièrement hétéronormées. Cela complique la prise de parole des victimes.

Violences conjugales LGBTQIA + : aux origines du tabou

Aux origines du tabou sur les violences au sein des couples LGBTQIA+, on trouve d’abord un manque de chiffres et de documents sur la question. Et parler de violences au sein de cette communauté, c’est aussi remettre en question ce modèle de couple dans notre société. En effet, il y a une pression encore plus forte sur les couples homosexuels de « réussir leur relation ».

Si le mariage pour tous a été adopté en France en 2013, il existe une crainte que ces violences conjugales relanceraient le débat. C’est ce qu’explique à 20 minutes Ralph Souchet, vice-président du Groupe Action gay et lesbien du Loiret (GAGL45).

« Il y a une pression en plus pour ces victimes-là. On a réussi à avoir ce droit, on s’en est pris plein la tête. On a dû montrer qu’on était aussi bien que les couples hétérosexuels, alors au moindre couac, c’est panique à bord », explique Ralph Souchet.

La légitimité de la parole LGBTQIA+

Si le sujet est tant invisible, c’est aussi car les victimes de la communauté LGBTQIA+ se retrouvent face à plusieurs obstacles supplémentaires, notamment lors de leur dépôt de plainte. D’après les associations de la communauté, ces personnes sont d’abord souvent confrontées à un sentiment d’illégitimité. Une partie aurait intériorisé le discours médiatique des violences conjugales comme le fait d’un homme sur une femme.

Ainsi, sans se sentir concerné.e et légitime à parler, il est plus difficile de pousser la porte d’un commissariat. Pour 20 minutes, Johan Cavirot, président de FLAG ! – association créée par des policiers et fonctionnaires de justice LGBT – s’exprime sur ce sentiment d’illégitimité :

« C’est déjà dur de parler de violences conjugales, de déposer plainte, mais quand en plus, on fait partie d’une minorité, ça l’est encore plus ».

Raphaël Gérard (LREM) explique lui à Tétu :

« Et quand la victime ose porter plainte, on constate une minimisation de la violence. Les forces de l’ordre, la justice, parfois les médecins ne sont également pas préparé.e.s à l’idée qu’une femme puisse violenter sa compagne ou qu’un homme puisse violenter son compagnon »

De plus, certaines victimes LGBTQIA+ porteraient peu plainte par peur d’être ridiculisées, pas prises au sérieux. Pour une partie, il existe aussi une peur du risque d’outing ou de justification de son orientation auprès de sa famille. Toutefois, il a quelques espoirs que la parole se libère (ou s’écoute, plutôt). Dans le sillage de #MeToo et du Grenelle des violences conjugales, #MeTooGay a notamment été lancé en janvier 2021.

Bien que les violences conjugales au sein des couples LGBTQ+ soient souvent entourées d’un voile de silence, il est impératif de briser ce tabou persistant. Reconnaître la réalité des violences au sein de ces relations permet d’offrir un soutien crucial aux victimes, quel que soit leur genre ou orientation.

Cindy Viallon
Cindy Viallon
Journaliste free-lance, mes sujets de prédilection sont les féminismes intersectionnels, la société et la culture. J’aime déconstruire l’actualité et briser les tabous une fois pour tous·tes !
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