Bien que les mutilations génitales féminines soient interdites et vont à l’encontre des droits humains, de nombreuses femmes sont encore victimes de ce fléau dans le monde. À l’occasion aujourd’hui de la Journée internationale de la tolérance zéro à l’égard des mutilations génitales féminines, on fait le point.
Que sont les mutilations génitales féminines ?
Les mutilations sexuelles féminines (MSF) sont selon l’Unicef « toutes les interventions aboutissant à l’ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme ou toute autre mutilation des organes génitaux féminins pratiquées pour des raisons non médicales ». Généralement, cette pratique se fait avec un couteau ou une lame de rasoir sans anesthésie. On vous laisse imaginer les dégâts autant physiques que psychologiques…
D’où vient cette pratique ?
Les raisons de ces pratiques barbares sont multiples et varient en fonction des régions et des facteurs socioculturels au sein des familles et des communautés. Mais, les mutilations sont principalement la manifestation d’une profonde inégalité entre les sexes.
En effet, dans certaines communautés, cette pratique servirait de garantie de chasteté des femmes pour les préserver pour le mariage, qui est un prérequis à la succession. Pire, les MGF sont considérées comme un rite de passage de l’enfance à l’âge adulte, obligatoire pour les filles.
200 millions de jeunes filles et de femmes excisées
Les MSF sont interdites par loi et sont une violation des droits humains reconnues à l’échelle internationale depuis 1997. Pourtant, aujourd’hui encore en 2022, plus de 200 millions de jeunes filles et de femmes, toujours en vie, en sont victimes, dans 30 pays africains, du Moyen-Orient et de l’Asie, selon un rapport de l’Organisation mondiale de la Santé.
Toujours d’après cette étude, les excisions seraient pratiquées sur un peu moins d’un quart de jeunes filles de moins de 15 ans, c’est-à-dire 44 millions.
Mais penser que ces pratiques n’existent pas en France est une erreur. De nombreuses femmes sur le territoire français en sont victimes : 60 000, selon un rapport du gouvernement paru en 2019. Ces dernières sont principalement originaires du Mali, du Sénégal, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire et de la Guinée.
« Avant, on parlait du Mali, du Sénégal ou de la Mauritanie, désormais il y a le Soudan ou l’Erythrée, poursuit Isabelle Gillette-Faye. Mais il faut sortir des stéréotypes, car une petite fille arrivée du Kurdistan irakien, d’Indonésie ou du Pakistan est aussi à risque… Rappelons que l’excision est pratiquée sur 4 continents sur 5, qu’elle n’est dictée par aucune religion, mais par l’objectif de contrôler le corps des femmes », observe Isabelle Gillette-Faye, sociologue et directrice de la fédération GAMS à 20 minutes
Des conséquences psychologies & physiques très graves
Ces mutilations illégales sont dangereuses pour les femmes et les filles à bien des égards. Elles ont des conséquences très lourdes, tant au niveau physique que psychologique. L’OMS en liste de nombreuses parmi elles : des douleurs violentes, saignements excessifs, fièvres, infections, problèmes sexuels, risque de complication lors de l’accouchement, voire, la mort.
Sur le long terme, les survivantes de ces atrocités en subissent également les conséquences psychologiques avec des risques de dépression, anxiété, stress post-traumatique…
« Il faut bien comprendre que ces opérations sont très souvent faites en dehors d’un espace médicalisé, par des exciseuses traditionnelles qui utilisent des objets contondants tels que des rasoirs ou des ciseaux, et le tout sans anesthésie. En dehors des douleurs immenses ressenties sur le moment, il y a de grands risques d’infection derrière, des risques obstétricaux également, et des cas d’hémorragies qui peuvent conduire au décès de la jeune fille », explique Camille Romain des Boscs, directrice de l’association Vision du Monde à Magicmaman
La pandémie ralentit la lutte contre les mutilations génitales féminines
Le COVID a engendré une crise mondiale dont les conséquences ont contribué à creuser davantage les inégalités entre les femmes et les hommes dans certaines populations. Selon une déclaration conjointe de la Directrice générale de l’UNICEF et de la Directrice exécutive de l’UNFPA,
« deux millions de cas supplémentaires de mutilations génitales féminines pourraient se produire au cours de la prochaine décennie parce que la COVID-19 oblige les écoles à fermer et perturbe les programmes qui contribuent à protéger les filles contre ces pratiques néfastes »
En effet, début mai 2020, le Soudan avait par exemple interdit les mutilations génitales féminines avec une peine de 3 ans d’emprisonnement en cas d’infraction. Mais cette bonne nouvelle s’est peu à peu évaporée à cause de la pandémie. L’ONG Plan International avait annoncé un taux d’excision plus élevé.
« Nous observons ces dernières semaines une augmentation massive des MGF (toutes les interventions incluant l’ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme) », alerte en ce sens Sadia Allin, responsable de l’ONG Plan International en Somalie
Les confinements ont restreint les militant.e.s d’agir sur place et de sensibiliser les communautés aux dangers extrêmes de cette pratique.
Outre, la journée internationale contre les MGF du 6 février, un plan a été lancé par le gouvernement. Les associations agissent également, pour lutter contre ces pratiques en sensibilisant sur les dangers. Au sein même de ces communautés, des femmes dénoncent ces agissements et luttent pour son éradication. Tel est le cas de Mariam Kako, victime d’excision à l’âge de 5 ans.
« J’ai appris tous les problèmes pour la santé et les dangers liés à cette pratique. Nous devons vraiment y mettre fin, pour la santé de nos filles », raconte Mariam à UNICEF
À l’occasion de la Journée internationale de tolérance zéro à l’égard des mutilations sexuelles féminines, ne fermons plus les yeux sur ces violences. Les mutilations génitales sont des crimes contre les femmes, leur corps et leur liberté.