À l’aube d’Halloween, les monstres sont de sortie. Ils ressuscitent à travers les costumes effroyables ou autour d’histoires anxiogènes racontées la lampe sous le menton. Cette année, sorcières, vampires, loups-garous et zombies ont de la concurrence. D’autres créatures surnaturelles, qui animent mythes et légendes, sont aussi conviées à ce grand bal de l’horreur et leur genre se conjugue au féminin. Elles suscitent des frissons rien qu’à leur évocation.
De la gorgone Médusa et sa tête couverte de serpents, à Némésis, déesse ailée considérée comme la vengeance incarnée en passant par les Furies, les vierges impitoyables qui punissent les criminels… les monstres féminins habitent ces textes anciens. Qu’elles soient déesses, esprits ou monstres, ces femmes mythologiques ont fait trembler plus d’un homme par leur pouvoir et leur nature insaisissable. Elles ressortent des livres poussiéreux pour dresser les poils et donner une leçon à la gent masculine !
Némésis, la déesse de la vengeance divine
Au premier abord, Némésis n’éveille pas vraiment la crainte. Elle n’a pas le physique répugnant ordinairement attribué aux monstres. Perchée sur des ailes immaculées et dépeinte avec un visage pur semblable à celui d’un ange, elle paraît inoffensive. Mais les apparences sont parfois trompeuses. Dans la mythologie grecque, Némésis incarne une justice froide et implacable. C’est la personnification du châtiment.
Némésis est celle qui rétablit l’équilibre quand les hommes se croient supérieurs. « Fléau des hommes mortels », c’est ainsi que Hésiode la présente dans Théogonie. Balance dans une main et épée dans l’autre, elle part aux trousses de ceux qui ont des excès d’égo. C’est d’ailleurs elle qui a fait sombrer Narcisse, l’homme amoureux de son reflet, et qui l’a poussé à sa propre perte.
La peur qu’elle suscite vient de son impartialité : personne, pas même les puissants dieux de l’Olympe, ne peut échapper à son jugement. Elle fait régner l’ordre et ramène les Hommes à la raison, qu’importe leur grade. Elle a même eu le culot de recaler Zeus, un peu trop entreprenant à son goût. Pour ne pas se faire réprimander par ce dieu tout puissant, elle s’est même transformée en oie. Némésis n’est pas un monstre dans sa définition pure, mais elle fait partie des montres féminins les plus respectés de la mythologie.
Baba Yaga, la sorcière des forêts noires
Créature sortie de la mythologie slave, la Baba Yaga a de quoi figer le sang des petits et des grands. Reprise sous une forme plus candide dans « Le Voyage de Chihiro », elle n’est pas aussi sympathique que la sorcière Yububa revisitée par Miyazaki. Rien qu’à la description, elle lève les poils et provoque l’effroi général. La Baba Yaga est une vieille dame au corps squelettique, aux dents de fer et au nez tranchant.
Elle vit dans une maison dressée sur des pattes de poulet et sillonne les paysages de l’Est européen. Elle ne se déplace pas avec un simple balai en paille comme les sorcières conventionnelles. Baba Yaga traverse le ciel, accompagnée d’un mortier et d’un pilon. Les villageois la craignent comme le loup blanc. Ceux qui daignent se mettre en travers de son chemin risquent de se faire dévorer tout cru ou de servir pour ses futures potions. Même si elle vit en ermite, la Baba Yaga n’œuvre pas seule. Elle a toute une armée de forces maléfiques à ses côtés. C’est un des monstres féminins à évoquer lors des soirées trouilles.
Médusa, la redoutable Gorgone
Au-delà d’être un des monstres féminins les plus populaires, Médusa est aussi une icône féministe, croisée parfois sous le hashtag #MeToo. L’histoire de Médusa fait tristement écho à l’actualité du 21e siècle. Prêtresse d’Athéna dotée d’une beauté envoûtante, Médusa s’est faite violée par Poséidon dans un temple à l’effigie de la déesse. Furieuse, Athéna décide de la condamner une deuxième fois. Elle lui jette un sort irrémédiable qui la métamorphose à tout jamais en Gorgone. Médusa, victime de l’indicible, se retrouve alors emprisonnée dans un corps hybride avec des serpents dressés sur le crâne.
Mais dans son malheur, elle hérite d’un puissant pouvoir. Elle peut pétrifier quiconque croise son regard. Symbole de la beauté corrompue et de la vengeance divine, elle succombe aux coups de Persée. Le héros grec la décapite d’un revers d’épée et tend sa tête comme un trophée. Ensuite, il s’en sert de façon stratégique pour figer ses ennemis. Encore plus glauque que tous les scénarios de films d’horreur.
Lilith, démon rebelle contre l’autorité masculine
Lilith appartient à deux traditions. L’une l’associe à un mythe sumérien et l’autre à une légende juive. Souvent dépeinte comme la première femme d’Adam, Lilith a précédé Ève dans le Jardin d’Eden. Alors que sa successeuse porte désormais l’étiquette de la pécheresse, Lilith, elle, ne s’est pas laissée faire sous le pommier. Créée en même tant qu’Adam, elle n’a pas apprécié que monsieur se prenne pour un être supérieur. Alors, elle a pris la fuite de son plein gré et abandonné celui avec qui elle devait bâtir l’humanité. Elle a fini par batifoler avec des démons.
Mais Dieu, vraiment fou de rage, ne lâche pas Lilith de sitôt. Il la punit en faisant mourir cent de ses enfants par jour. Dans l’imaginaire, les amalgames se créent et la hissent en démon tueuse d’enfant. Cependant, ce qu’il faut retenir, c’est que Lilith est un de ces monstres féminins badass qui a défié l’autorité masculine.
Lorelei, la nymphe qui envoûtait les marins
Lorelei, créature marine mystérieuse à la frontière de la nymphe et de la sirène, hante encore les eaux du Rhin. Moins repoussante que le monstre du Lochness, elle n’est reste pas moins menaçante. Assise sur un rocher qui dépasse légèrement du fleuve, elle est semblable à ces muses dénudées au-devant des tableaux d’époque. Mais sous l’habit de la jeune femme séduisante et facile, Lorelei cache une voix qui peut s’avérer fatale. C’est une arme imparable.
Lorsque son chant retentissait, les marins du large étaient comme ensorcelés. Ils lâchaient la barre et n’avaient plus du tout le contrôle sur leur bateau. Nombre d’entre eux ont péri dans des naufrages, bercés par cette mélodie piège. Son nom est devenu synonyme de danger et de séduction mortelle. Derrière cette beauté et cette douceur musicale, Lorelei est une figure tragique : une jeune femme trahie en amour, transformée en esprit vengeur, cherchant à attirer les hommes à leur perte. La plupart des monstres féminins ne sont pas nés sous cette forme abominable, ils sont devenus ainsi des suites de traumas ou de représailles.
Kali, déesse de la destruction
Kali a tout d’un personnage de cauchemar. Avec sa peau bleue, ses dix bras tentaculaires, ses colliers de crânes autour du cou et sa langue de serpent ensanglantée, elle met à l’amende toutes les créatures gores du 7e art. Elle est la figure la plus terrifiante du panthéon hindou. Incarnation sinistre de la déesse-mère Shakti, elle combat les forces du mal et les réprime dans une violence inouïe. Avec ses morceaux de victimes en pendentif, elle provoque instantanément la panique.
Déesse de la destruction et du renouveau, mais aussi symbole de l’amour maternel, elle tue pour protéger. Mais le sang lui est rapidement monté à la tête. Shiva s’est alors allongée sous ses pieds pour la calmer et la ramener à sa mission première. Elle boucle le tableau des monstres féminins. Vénérée, il vaut mieux éviter de l’utiliser dans le folklore d’Halloween par respect pour la religion hindouiste.
Ces monstres féminins, qui appartiennent à l’ombre, sont rarement exploités dans les films d’épouvante. Pourtant, ils sont bien plus prometteurs que Frankestein ou Dracula. Ils montrent un autre visage des femmes, loin de la peureuse en sanglots. Idéal pour donner du sens à vos costumes…