Ce simple geste de la main popularisé sur TikTok peut signaler les violences conjugales

Les victimes de violences conjugales sont souvent condamnées à un mutisme forcé. Par peur de représailles, elles dissimulent leurs calvaires et camouflent leur bleu à renfort de fond de teint. Elles sont seules contre ce monstre en habit ordinaire. C’est trop risqué d’appeler la police quand la bête rôde. Pour lancer un SOS sans se faire repérer par leurs bourreaux, elles peuvent exécuter un geste d’alerte avec la main. Main ouverte, pouce plié, poing fermé… ce signe codé indique discrètement « aidez-moi, je suis en danger ». Popularisé sur TikTok et devenu universel, il permet aux victimes d’appeler au secours en quelques secondes. Ce geste de la main, qui s’apparente à un cri silencieux, a libéré des femmes de l’enfer des violences conjugales.

Un geste en trois étapes devenu viral

En 2022, les violences conjugales ont augmenté de 15 %. Sur les 244 000 victimes recensées en France, seul un quart d’entre elles ont franchi les portes du poste de police pour déposer plainte. Celles qui vivent l’indicible derrière les murs de leur foyer veulent témoigner. Mais elles craignent d’être doublement frappées si leur bourreau découvrait la vérité. Elles savent que si elles parlent, leurs jours sont comptés. À défaut de ne pas pouvoir prononcer un mot, elles peuvent mimer leur détresse à main levée. Cette partie du corps, qu’elles n’ont jamais osé utiliser contre leurs tortionnaires, peut devenir leur plus précieuse arme pour sortir du calvaire.

Ce geste de la main a été pensé par la Canadian Women’s Foundation pendant le premier confinement pour combattre la recrudescence de violences conjugales. La victime lève la main, paume vers l’extérieur, elle plie le pouce et abaisse ses autres doigts sur celui-ci. Ce geste symbolise le sentiment d’être enfermé.e, comme retenu.e en otage. Il se suffit à lui seul pour donner l’alerte et illustrer un cauchemar, tristement commun. Baptisé #SignalForHelp il s’est démocratisé au-delà des frontières pour devenir un langage d’alerte international. Le hashtag du même nom cumule d’ailleurs plus de 24 millions de vues sur TikTok.

À travers des vidéos plus ou moins scénarisées, les internautes reproduisent massivement ce geste pour le faire connaître et lui donner une force de résonance. Ces contenus à caractère vital montrent l’exemple et font de la prévention entre les pixels. Ce geste de la main, voué à traduire des violences conjugales en catimini, est un échappatoire. Depuis le début de la campagne, le message de détresse concernant la violence masculine a été diffusé dans plus de 40 pays, et plus de 200 organisations internationales l’ont intégré à leurs actions.

@cdnwomenfdn

Need help, or know someone who needs help? Visit the link below or in our bio. #TikTokForGood #TikTokPartner #domesticabuseawareness #signalforhelp #genderbasedviolenceawareness #abuse #abuseawarenes

♬ Piano Melancholy (Classical Piano Music) – Depleka

@lovyouss

💕Les filles, si vous êtes en situation de danger, faites ce signe de la main, et on comprendra. Ce geste est un appel à l’aide. 🙏🏽💕

♬ Overcome – Skott

Un appel de détresse qui a déjà sauvé

La main, qui incarne la violence et qui évoque les coups, peut servir de drapeau rouge et envoyer un « mayday » feutré. Cet organe, qui donne les gifles et laisse des stigmates sur la peau, peut aussi les dénoncer. Grâce à ce geste de la main, visibilisé sur la toile, des victimes ont pu s’extraire des griffes de leurs tyrans et signaler des violences conjugales sans un bruit. Loin d’être anecdotique ou expérimental, il a déjà fait ses preuves dans la vraie vie.

C’est grâce à lui qu’une adolescente américaine a pu fuir son ravisseur en novembre 2021. La jeune fille, qui avait été enlevée, a fait ce geste depuis la banquette arrière, en espérant qu’un automobiliste le capte de l’autre côté de la fenêtre. Par chance, un conducteur connaissait la nature de ce geste et ce qu’il induisait. « La personne qui a appelé le 911 est restée derrière le véhicule pendant 7 miles (11 kilomètres) pour transmettre des informations à la police […]. La police a pu arrêter la voiture et secourir l’adolescente », décrit la chaîne américaine CNN. La justice a inculpé l’homme de 61 ans, auteur du kidnapping, pour enlèvement, séquestration et possession d’images à caractère sexuel.

À Milan, une jeune femme de 19 ans a aussi plié le poing pour vendre la peau de son violeur. À la sortie d’un concert, elle s’apprêtait à regagner son hôtel quand un homme lui a sauté dessus. La victime l’a ensuite tiré dans un fast-food pour le piéger, à son tour. Elle a tendu sa main et plié les doigts devant le manager, qui n’a pas tardé à appeler la police. Ce geste de la main signe la délivrance des victimes de violences conjugales.

Les autres moyens discrets pour signaler des violences

Ce geste de la main, plus efficace et prudent qu’un appel à destination du 17, est prescrit à toutes les victimes de violences conjugales. Pour interpeller le public sans se mettre en danger, les victimes peuvent aussi se dessiner un point noir au creux de la paume ou trouver refuge dans un bar labellisé « lieu sûr ». L’application Umay, qui lutte contre le harcèlement de rue, répertorie 6500 safe places partout en France pour se mettre à l’abri et demander de l’aide.

Dans le même esprit, le gouvernement a également lancé une application nommée Ma Sécurité. Elle permet d’échanger par écrit avec un.e gendarme ou un.e policier.ère. Le tchat reste ouvert non-stop. Ce dispositif a ainsi permis d’arrêter un conjoint violent à son domicile en 30 minutes près de Rennes. Les nouvelles technologies peuvent prendre l’étoffe de boucliers et faire passer des messages d’urgence, imprononçables à l’oral. Ce sont de précieux relais.

Ce geste de la main est un rempart contre les violences conjugales. Dans un mouvement, les victimes peuvent révéler ce que la bouche tait depuis tant d’années. Mais elles attendent encore que le gouvernement leur tende une main et traite le mal (ou mâle) à la racine… Si vous êtes en danger, appelez le 3919. 

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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