Le SMIC, une affaire de femmes ? Voici les causes de cette réalité persistante

Parmi les bonnes nouvelles de ce début du mois de novembre : la revalorisation du SMIC. Les 2,4 millions de salarié.e.s concerné.e.s verront leur salaire mensuel augmenter de 2 % sur leur fiche de paye. S’il fallait poser un visage sur le SMIC, il prendrait les traits d’une femme. Selon les estimations, les profils qui perçoivent cette rémunération « minimum » sont majoritairement féminins. Si les femmes sont piégées en bas de l’échelle et peinent à gagner leur vie convenablement, ce n’est pas seulement à cause de cet épais plafond de verre qui culmine au-dessus de leur tête. Voici pourquoi les femmes sont aussi nombreuses à rester bloquées au SMIC. 

Plus de femmes payées au SMIC que d’hommes

En France, le SMIC s’élève désormais à 1 426,30 € net pour 35 heures hebdomadaires. Soit deux fois plus qu’en Hongrie et trois fois plus qu’en Macédoine du Nord. Même si la France fait partie des huit pays où le SMIC atteint plus de 1000 €, les salarié.e.s qui touchent ces minces revenus se retrouvent vite dans le rouge à la fin du mois. 62 % des Français au SMIC sont des Françaises. Certaines d’entre elles campent sur ce bas salaire toute leur vie. Arrivées à la retraite, elles se retrouvent dans une situation précaire, à écumer les banques alimentaires.

Selon une enquête menée par la Dares, branche qui dépend du ministère du Travail, les jeunes de moins de 25 ans et les femmes sont plus souvent rémunérés sur la base du SMIC. Un portrait-robot qui ne surprend qu’à moitié. Les femmes sont comme greffées à ce salaire plancher. Dans le monde du travail, elles partent avec de nombreuses pénalités. Avoir un sexe féminin est déjà un sacré désavantage. En 2024, les femmes touchent encore 24,4 % de moins que leurs homologues d’après l’enquête de l’Observatoire de l’égalité femme-homme. Même si elles sont plus diplômées que les hommes, elles se font rares aux postes de cadre. Seules 21 % d’entre elles tiennent les rênes d’une entreprise.

Si les femmes sont prisonnières du SMIC et stagnent sur ce désolant salaire, ce n’est pas parce qu’elles sont « sans ambitions ». Ces femmes ont certainement de plus grandes exigences et de meilleures prétentions salariales, mais de nombreux obstacles se dressent sur leur carrière et les empêchent de passer la barre symbolique des 1 500 €.

Le travail à temps partiel, une pénalité

En 2020, les femmes étaient trois fois plus nombreuses à prendre un temps partiel que les hommes : 27 % d’entre elles, contre 8 % d’entre eux. Les motivations ne sont pas les mêmes non plus d’un genre à l’autre. Les femmes, elles, réduisent leurs horaires par obligation familiale. À l’inverse, les hommes amputent quelques heures de travail pour exercer un emploi parallèle. Ou suivre une formation ou des études.

Dès que la famille s’agrandit, c’est la femme qui sacrifie sa carrière et qui diminue ses horaires de boulot. Les responsabilités domestiques et parentales incombent quasi toujours aux femmes. Ce temps partiel est souvent contraint (subi plutôt que choisi) et s’accompagne généralement de revenus modestes, proches du seuil minimum. Si les femmes sont sous-payées et doivent se contenter du SMIC, c’est en partie à cause des inégalités qui s’infusent dans le couple.

Le problème des choix d’orientation

Sur les bancs de l’école, les femmes sont parfois influencées dans leurs choix de carrière et poussées à prendre une voie plus qu’une autre. Lors de ce fameux entretien d’orientation, elles ne sont pas spécialement encouragées à rejoindre des filières scientifiques et à embrasser le métier d’ingénieur, faute de modèles. En 2021, la part des filles dans le secteur scientifique descendait à son niveau de 2002, à moins de 45 %.

Dans les manuels scolaires, les représentations de genre ne sont pas non plus à la gloire des femmes. Les hommes, eux, sont dépeints en héros et occupent des rôles de leader tandis que les 6,1 % de  femmes qui s’y logent sont souvent des « renforts émotionnels », des soutiens, rien de plus. Cette idée qui prétend que les femmes ont un don inné pour réconforter ne tarde pas à s’inscrire dans l’esprit des étudiantes, qui se persuadent d’être « faites » pour ces métiers. Or, les métiers traditionnellement associés aux femmes ne sont pas payés à leur juste valeur. Les aides à domicile et les assistantes maternelles, métiers dits « de femmes » dépassent guère le SMIC. Les ingénieurs, eux sont mieux lotis. Ils touchent presque le double. Les femmes paient le prix des préjugés.

Les interruptions de carrière

Avec les grossesses et les congés maternité, les femmes ont une carrière hachée. Lorsque les femmes deviennent mères, elles mettent leur vie professionnelle entre parenthèses. Elles troquent les piles de dossiers contre les couches. Même si le congé parental protège l’emploi des mères, il se fait ressentir sur le bulletin de salaire. Selon plusieurs études croisées recueillies par l’Ined, l’arrivée du premier enfant fait chuter le revenu salarial des mères de 40 %.

Le retour au travail après une longue interruption peut souvent se faire à des niveaux de salaire plus bas, voire au SMIC. Si les femmes sont plus nombreuses à être au SMIC, c’est également parce qu’elles ont une carrière moins linéaire que les hommes. Le congé maternité les éloigne des postes « clés » et les freine dans leur « décollage » professionnel.

Pour toutes ces raisons à la fois évidentes et aberrantes, les femmes sont bloquées au SMIC, alias le point mort. Et lorsqu’elles commencent à gravir les échelons, le syndrome du coquelicot les ramène à zéro.

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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