Le 19 janvier dernier, un rapport du Projet européen sur les violences faites aux femmes, commandé en 2018 par la préfecture de police et terminé un an plus tard, a été diffusé. Si le nombre de suicides forcés reste (très) peu documenté, un constat accablant est fait : 1 136 femmes victimes de violences se sont suicidées en 2017 dans l’Union européenne, a rapporté en décembre 2021 Le Parisien. Des chiffres passés sous silence durant 2 ans, malgré les demandes répétées d’élu.e.s, de collectifs et d’associations. On vous fait le point.
Le harcèlement tue
Elles font partie des oubliées, des invisibles…des mortes. 1 136 femmes se sont suicidées en 2017 dans l’Union européenne, selon le rapport du Projet européen, à cause des violences psychologiques et physiques répétitives de leur conjoint ou ex. En France en 2017, 209 femmes ont été poussées au suicide.
Ce rapport s’appuie également sur une étude réalisée en 2015 en France, qui indique qu’une femme sur 200 déclare avoir déjà fait une tentative de suicide en raison de violences psychologiques (humiliations, insultes, isolement, chantage, etc.).
« C’est donc près d’une femme victime par jour que font les violences au sein du couple en France en 2017, et non une tous les trois jours, comme il est rapporté habituellement si l’on considère restrictivement les seuls féminicides », appuie le rapport dévoilé par le Parisien
Mais, les violences domestiques n’ont pas de frontières. En Inde, une femme au foyer se suicide toutes les 25 minutes, soit 22 372 femmes, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur.
« Les femmes au foyer représentaient 14,6 % du total des 153 052 suicides enregistrés en Inde en 2020, et plus de 50 % du nombre total de femmes qui ont mis fin à leurs jours »
Qu’est-ce que le suicide forcé ?
Contrairement à ce que peut laisser croire ce terme, le suicide forcé ne signifie pas qu’une personne est contrainte de se donner la mort à cause d’un pistolet braqué sur sa tempe. Cet « homicide des temps modernes » est le résultat de multiples harcèlements et violences psychologiques et physiques subis par les victimes, qui les pousse à se tuer.
« La victime se suicide comme un acte ultime de libération de toutes les souffrances endurées, mais aussi parce que la honte et la culpabilité deviennent insupportables », explique Yael Mellul, ancienne avocate et présidente du groupe de travail sur les violences psychologiques et l’emprise, dans le cadre du Grenelle à France Inter
Une arme juridique contre le suicide forcé
Ce n’est qu’après que les barres des 100 victimes de féminicides ont été atteintes que le gouvernement français a réagi. Désormais, grâce à la loi du 30 juillet 2020 votée suite au Grenelle des violences conjugales, l’emprise psychologique sur les victimes de violences conjugales est entrée dans le Code civil.
Entrée en application le 25 novembre 2020, lors de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le suicide forcé est depuis considéré comme une circonstance aggravante. Les auteurs des violences encourent 10 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende.
« En le caractérisant dans la loi, on va dire à ces femmes victimes de cette emprise : « Vous n’êtes pas à l’origine de ce qui vous arrive, vous en êtes les victimes’. (…) Étant donné que l’emprise psychologique est souvent préalable aux violences physiques. »
Une victoire pour les victimes de violences puisque la justice reconnait enfin que le harcèlement peut pousser au suicide. Toutefois malgré ces mesures, le nombre de victimes de violences ne cesse de croitre. 14 femmes ont été tuées depuis début janvier 2022, relaie l’organisation NousToutes sur son compte Instagram. Un chiffre accablant, qui montre qu’il faut davantage sensibiliser et agir pour cette cause. Ne fermons plus les yeux ! Les féminicides et les violences psychologiques et physiques sont des crimes.
Si vous êtes victimes de violences :
- Composez le 17, le 18 ou envoyez un SMS au 114 pour contacter Police Secours.
- Composez le 115, si vous devez fuir de votre domicile en urgence, pour une demande de mise à l’abri
- Le 3919 : numéro d’écoute national, anonyme et gratuit, est accessible 24h/24 et 7j/7
